Accord international pour réduire la pollution du secteur maritime, les ONG très critiques

Londres, 7 juil 2023 (AFP) – Un accord international pour réduire les émissions de gaz à effet de serre du fret maritime, secteur très polluant, a été promulgué vendredi par l’Organisation maritime internationale (OMI), mais il moins ambitieux qu’espéré et très critiqué par les ONG.

« Les États membres de l’OMI (…) ont adopté une stratégie de réduction des gaz à effet de serre du fret maritime avec des objectifs améliorés », écrit l’organisation, qui dépend de l’ONU, dans le communiqué publié vendredi.

L’accord met en avant « une ambition commune améliorée d’atteindre la neutralité carbone pour le fret maritime international près de 2050 », et vise une réduction des émissions de CO2 « d’une moyenne d’au moins 40% d’ici 2030 comparé à 2008 ».

Ce compromis prévoit aussi des objectifs « indicatifs » (donc non contraignants) de réduction des émissions polluantes d’au moins 70% d’ici 2040, avec en ligne de mire au moins 80%, comparé à 2008.

Le secrétaire d’État français chargé de la Mer Hervé Berville, a quant à lui salué une « étape majeure dans notre course vers la neutralité climatique » avant l’adoption de « mesures contraignantes ».

« Nous nous sommes certes assis à la table des négociations avec des ambitions plus fortes que l’accord final obtenu », a-t-il cependant admis, « mais il s’agit indéniablement d’un succès (…) obtenu à l’unanimité, auquel la France a pris toute sa part ».

L’Union européenne réclamait en effet lors des négociations cette semaine au siège de l’OMI à Londres un objectif plus ambitieux de zéro émission nette en 2050 avec deux étapes intermédiaires: réduction de 29% en 2030 et 83% en 2040.

Les îles-États du Pacifique, particulièrement menacées par le réchauffement climatique, voulaient aller plus loin, soutenues par les États-Unis, le Royaume-Uni et le Canada: -96% d’ici 2040.

En 2018, l’OMI avait donné aux transporteurs l’objectif de réduire leurs émissions de CO2 de 50% en 2050 par rapport à 2008, ce qui était largement jugé insuffisant.

– « Profondément inquiets » –

A l’inverse, nombre de gros exportateurs comme la Chine, le Brésil, l’Argentine, entre autres, ont freiné, affirmant que des objectifs trop stricts profiteraient aux pays riches, aux dépens des pays en développement.

Ils s’opposaient notamment au projet d’une taxe carbone, soutenu par le président français Emmanuel Macron et par des entreprises comme le géant du fret maritime Maersk.

Une éventuelle taxe n’apparaît désormais dans le projet d’accord que dans un éventail de mesures proposées pour réduire les émissions du fret.

Le vice-secrétaire général de la Chambre internationale de la marine marchande (ICS) Simon Bennett a félicité un accord « historique » qui « donne un signal très fort aux exploitants de navires et surtout aux producteurs d’énergie » qui doivent désormais fournir « des carburants marins sans émissions de gaz à effet de serre en très grandes quantités pour qu’une transition aussi rapide soit possible ».

La très grande majorité des 100.000 navires du secteur, qui transportent 90% des marchandises dans le monde, sont propulsés par du fioul lourd. Le secteur est responsable de près de 3% des émissions de CO2 mondiales, d’après l’ONU.

Le représentant au MEPC des îles Marshall, Albon Ishoda, a jugé d’après le texte de son discours en clôture des réunions reçu par l’AFP, que la nouvelle stratégie « gardait possible un réchauffement climatique limité à 1,5 degré, et engageait le secteur vers une transition énergétique équitable ».

« Il reste toutefois beaucoup de travail pour s’assurer que le réchauffement plafonné à 1,5 degré (…) devient une réalité », insiste-t-il.

Les ONG écologistes se sont montrées très critiques.

Elles demandaient de cibler -50% d’ici 2030 et la neutralité carbone d’ici 2040.

L’accord « n’est malheureusement pas à la hauteur des attentes », regrette Harjeet Singh, responsable de la stratégie politique mondiale du Climate Action Network International, insistant sur la « disparité évidente » avec les objectifs de l’accord de Paris.

Greenpeace a aussi jugé l’accord « trop faible » dans un secteur qui a « trop longtemps (…) fonctionné à l’abri des regards ».

« Le niveau d’ambition de l’accord est très inférieur à ce qui est nécessaire pour garder le réchauffement climatique planétaire sous 1,5 degré, et la formulation du texte est vague et non contraignante », déplore quant à elle l’association Clean Shipping Coalition.

« Les représentant de la société civile sont profondément inquiets », conclut l’ONG Ocean Campaigns.

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