Après cinq ans d’enquête, la commission d’instruction de la Cour a transmis le dossier le 7 mai au parquet général de la Cour de cassation pour qu’il prenne ses réquisitions d’ici trois mois sur un éventuel procès devant la CJR pour Edouard Balladur et son ex-ministre de la Défense François Léotard, a-t-on appris lundi auprès du parquet général.
Les deux anciens responsables ont été mis en examen en 2017 pour « complicité d’abus de bien sociaux ».
« Je n’étais informé de rien sur l’existence de commissions, de rétro-commissions, (…) de réseaux officieux et d’autres officiels », s’était défendu M. Balladur, entendu à cinq reprises plus de 20 ans après les faits, selon l’un de ses interrogatoires dont a eu connaissance récemment l’AFP.
L’affaire de Karachi doit son nom à l’attentat du 8 mai 2002 qui avait fait quinze morts, dont onze employés français de la Direction des chantiers navals (ex-DCN), et blessé douze autres dans la ville portuaire pakistanaise. Tous travaillaient à la construction d’un des trois sous-marins Agosta vendus à ce pays sous le gouvernement Balladur (1993-1995).
L’enquête antiterroriste, qui privilégiait initialement la piste d’Al-Qaïda, explore depuis 2009 la thèse de possibles représailles à la décision de Jacques Chirac, tombeur d’Edouard Balladur à l’élection présidentielle, d’arrêter le versement de commissions dans ces contrats après son élection.
En creusant cette hypothèse, les magistrats avaient acquis la conviction que les comptes de campagne de M. Balladur, pourtant validés, avaient été en partie financés par des rétrocommissions – illégales -, à hauteur de 13 millions de francs (près de 2 millions d’euros), en marge de ces contrats de sous-marins au Pakistan et de frégates à l’Arabie Saoudite (Sawari II).
Pour examiner ce volet financier, une deuxième procédure avait été confiée en 2011 à des magistrats financiers, qui a abouti au renvoi devant le tribunal correctionnel de six protagonistes. Leur procès doit se tenir en octobre à Paris, huit ans après l’ouverture de cette enquête, déclenchée par des plaintes de familles.
Les cas d’Edouard Balladur, 90 ans aujourd’hui, et de François Léotard, 77 ans, avaient été disjoints en 2014.