Energies marines: des ports investissent mais les industriels tardent

Après l’inauguration en grande pompe en décembre par le Premier ministre Manuel Valls des deux premières usines d’éoliennes de France, à Montoir-de-Bretagne, près de Saint-Nazaire, Alstom « va commencer à expédier les premières machines (nacelles et générateurs d’éoliennes) l’année prochaine », pour les Etats-Unis, assure François Chevalier, directeur des territoires du port de Nantes/Saint-Nazaire.

Le port entend s’ériger en hub de référence pour les EMR dans un pays en retard en matière d’éoliennes offshore comparé au Danemark, au Royaume-Uni ou à l’Allemagne. La construction des pièces destinées aux champs français viendra ensuite.

Nantes accueille à partir de mardi le salon Thetis des EMR, alors que les quatre premiers parcs éoliens français doivent tourner à l’horizon 2020 au large de Fécamp, Courseulles (Normandie), Saint-Brieuc (Bretagne) et Saint-Nazaire.

Le quatrième port français a ainsi commencé depuis deux ans à mettre en oeuvre un plan d’adaptation aux pièces géantes des EMR, de près de 80 millions d’euros sur cinq ans. La démolition des bunkers de la Seconde guerre mondiale a démarré fin mars pour neuf mois. 2016 sera consacrée au renforcement d’un quai et d’une écluse. Saint-Nazaire promet plus de 140 hectares en tout aux EMR, à terme.

Pour l’heure toutefois, écrivait l’hebdomadaire Le Marin en avril, les deux bâtiments Alstom érigés sur 30 ha « paraissent un peu vide » et le site n’emploie qu’une quarantaine de personnes. Alstom a promis d’en embaucher 300 à terme.

– ‘Quai EMR’ –

Bien que beaucoup plus modeste en terme de trafic global, Cherbourg affiche des ambitions similaires dans les EMR. Le port a ainsi lancé en 2013 un plan d’au moins 90 millions d’euros sur quatre ans. Il a inauguré fin mars un « quai EMR unique en France », selon le port, de 320 mètres de long et pouvant recevoir des charges de 15 tonnes par m2, contre 5 tonnes pour un quai conventionnel. Il a commencé la construction sur la mer d’un polder de 39 ha et promet à terme 100 ha pour les EMR.

Alstom doit y construire une à deux usines qui fabriqueront des pièces complémentaires à celles de Saint-Nazaire et y embaucher 500 personnes. Le port, en quête depuis des années d’un nouveau moteur d’activité, espère que les parcs éoliens marins normands et les 11 hydroliennes dont le gouvernement a décidé la construction au large de Cherbourg, dans l’un des plus forts courants du monde, lui serviront de tremplin.

Mais le chemin est encore long avant de pouvoir comparer l’activité EMR d’un port français à celle d’Esbjerg, au Danemark, premier port au monde pour l’éolien offshore, domaine dans lequel il s’est lancé en 2002. Le port danois a investi 130 millions d’euros en 10 ans dans l’éolien.

Des élus bas-normands se sont rendus en 2012 dans ce hub par lequel transite quelques centaines d’éoliennes chaque année et qui affiche 2.500 emplois dans le secteur, à et autour d’Esjberg, pour 11.500 dans le pétrole et le gaz.

– ‘Vigilants’ –

Contrairement à Saint-Nazaire, Cherbourg attend encore la pose de la première pierre Alstom. Le permis de construire a été demandé et accordé pour une usine. Mais il n’est plus question de démarrage des travaux en septembre, comme évoqué un temps à Cherbourg.

Un permis de construire pour une usine d’éoliennes, le port du Havre rêverait d’en avoir, ne serait-ce que la demande. Areva y a annoncé cinq usines et 750 emplois, selon un élu local. Mais le deuxième port français attend toujours, et depuis un an, « un signal fort » de l’industriel pour débloquer les 57,4 millions d’investissement prévus dans les EMR.

« Inquiets ? C’est un grand mot. Nous sommes vigilants », explique Emmanuel Ludot, directeur adjoint du Port du Havre. « Vous connaissez la situation d’Areva (qui traverse la plus grave crise de son histoire, NDLR) ». La construction du parc de Saint-Brieuc, dont les éoliennes Areva doivent être construites au Havre, est différée d’un an car son promoteur a décidé de changer de modèle d’éoliennes, rappelle-t-il.

Et les activités éoliennes d’Areva, comme celles d’Alstom, sont en cours de fusion via des sociétés à 50/50, avec respectivement l’espagnol Gamesa et l’américain General Electric (GE), « ce qui entraîne nécessairement un décalage », ajoute un élu local.

Surtout, les engagements ont été réaffirmés depuis ces annonces. GE a même promis en 2014 l’implantation de son siège mondial pour les EMR près de Nantes.

Autre port qui attend beaucoup des EMR, Brest, où la première hydrolienne de France doit être reliée au réseau en juin, et qui va lancer via la Région Bretagne un plan de 220 millions d’euros sur 2015-2020 pour notamment agrandir un polder qui permettra de proposer 50 ha EMR. La Région « espère deux ou trois contractualisations » avant 2016.

mhc-sf-asl-clc/am/bir/ggy

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