Ferry incendié: dix morts et incertitude sur d’éventuels disparus

Quelque 427 personnes, dont les 56 membres d’équipage ont été transportées saines et sauves à bord de navires ou directement à terre, a affirmé lundi le ministre italien des Transports Maurizio Lupi. La liste d’embarquement du navire battant pavillon italien et affrété par la compagnie grecque Anek faisait état de 478 personnes à bord, dont 422 passagers, mais le ministre a affirmé que ce chiffre était à considérer avec prudence.

Sur cette liste, on retrouve les noms des 427 rescapés, dont les 56 membres d’équipage, mais « il appartient au port d’embarquement (Patras en Grèce) de vérifier la coincidence entre la liste d’embarquement et les passagers », a-t-il affirmé lors d’une conférence de presse.

Il est en tout cas « absolument prématuré » de parler de disparus, a souligné le ministre. « Nous ne connaissons pas le chiffre définitif de passagers », a-t-il insisté, expliquant que, dans ces conditions d’incertitude, les opérations de recherche continuaient. Certains des rescapés n’étaient même pas sur la liste d’embarquement, a-t-il encore expliqué.

« La liste (d’embarquement) est peut-être inexacte », a reconnu lundi soir le ministre grec de la Marine marchande, Miltiadis Varvitsiotis. Il a réclamé des autorités italiennes, avec lesquelles la communication n’est pas toujours bien passée, a-t-il dit, une confirmation des identités des personnes évacuées du ferry, « pour tranquiliser les familles ».

Sur les 371 passagers récupérés sur le ferry, 234 sont Grecs, 54 Turcs, 22 Albanais, 22 Italiens et 10 de nationalité suisse, selon M. Lupi.

Le commandant du ferry, Argilio Giacomazzi, a été le dernier à quitter le navire en détresse, conformément aux traditions maritmes. Les opérations d’évacuation du Norman Atlantic, qui ont débuté dimanche peu après un violent incendie, ont pris fin mais un des navires, le San Giorgio, transportant une partie de ces rescapés, est toujours aux côtés du ferry pour participer aux recherches d’éventuels disparus, selon la marine militaire italienne.

Pendant plus de 24 heures, une noria de navires et d’hélicoptères ont évacué des centaines de passagers, transis de froid et certains souffrant de brûlures, et les 56 membres d’équipage.

Les autorités maritimes italiennes, grecques et albanaises s’étaient lancées dès dimanche matin dans une course contre la montre pour récupérer ces hommes, femmes et enfants, pris au piège parfois pendant plus de 34 heures sur le pont de ce ferry, battu par des vents glacés et enveloppé d’une fumée épaisse, qui a longtemps gêné les secours.

Une cinquantaine de ces rescapés, exténués et transis de froid, sont arrivés lundi matin à Bari (sud-est), à bord du cargo « Spirit of Piraeus ».

D’autres, près de 70, ont pris la direction de la Grèce, d’où ils étaient partis.

« La situation est bonne » pour ces rescapés, en majorité grecs, dont quatre enfants et une femme enceinte, a commenté le préfet de Bari, Antonio Nunziante.

L’un d’entre eux avait toutefois des bandages aux mains, et un médecin a confirmé que certains souffraient de brûlures aux pieds ou aux mains.

Fotis Tsantakidis, chauffeur de camion, a raconté au journal grec Ethnos qu’il s’était réveillé à cause d’une intense odeur de brûlé. « Je suis sorti en courant. Je cherchais un gilet de sauvetage mais j’en ai pas trouvé », a-t-il dit, ajoutant qu’il avait pu embarquer sur le « Spirit of Piraeus » en dépit des fortes vagues rendant la manoeuvre très périlleuse.

Un passager grec n’a pas eu cette chance. Tombé du ferry dans des circonstances peu claires, il est resté plus de quatre heures dans l’eau aux côtés de sa femme, qui a raconté son calvaire à l’agence italienne Ansa.

– « J’ai vu mourir mon mari » –

« J’ai vu mourir mon mari. J’ai essayé de le sauver, mais je n’y suis pas arrivée », a-t-elle affirmé depuis un hôpital de Lecce (sud-est de l’Italie) où elle a pu être transportée après avoir été sauvée.

La plupart des rescapés sont indemnes, mais certains souffrent d’hypothermie ou de problèmes respiratoires.

Les autorités italiennes ont mobilisé quatre remorqueurs dans le but de stabiliser le Norman Atlantic, un ferry de 186 mètres de long.

Il sera probablement remorqué, jusqu’au port de Brindisi ou de Bari, sur la côte sud-est de l’Italie. Un remorquage vers l’Albanie, plus proche, est également envisagé en cas de besoin.

Le feu s’est déclaré sur le ferry dimanche à l’aube dans l’emplacement réservé aux véhicules, par une mer démontée et des vents violents, alors que le bateau assurait la liaison entre Patras, dans le sud-ouest de la Grèce, et Ancône, dans l’est de l’Italie.

Le ferry, construit en 2009, avait récemment été inspecté. Selon l’amiral Giuseppe de Giorgi, chef d’état-major de la marine militaire italienne, un problème avait été détecté sur l’une des portes pare-feu, mais il avait été réglé avant le départ du ferry, totalement fiable pour la navigation.

Le parquet de Bari a toutefois ouvert une enquête criminelle pour tenter d’éclaircir les circonstances de ce drame et désigner les responsables.

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