La forteresse de Calais aiguise l’appétit des passeurs vers les côtes anglaises

La lutte contre ces « filières criminelles de passeurs » sera d’ailleurs l’une des têtes de chapitre d’un nouvel accord signé conjointement jeudi à Calais entre le ministre de l’Intérieur Bernard Cazeneuve et son homologue britannique Theresa May.

Encore faut-il pouvoir les identifier… Car ils sont à la fois partout et nulle part: « Nous avons le plus grand mal à faire la différence entre un migrant lambda et un passeur. Ils se fondent parfaitement dans la masse », confie à l’AFP une source policière locale.

Lorsqu’on les repère, leur visibilité agace parfois, comme à Téteghem, près de Dunkerque. Postées à l’entrée du camp, les voitures luxueuses immatriculées en Grande-Bretagne sont autant de preuves d’un quadrillage méticuleux. « Dans ma ville, les trois quarts des passeurs sont anglais », affirme le maire Franck Dhersin. L’argent serait blanchi notamment dans des boîtes de nuit outre-Manche par les têtes du réseau, à l’en croire.

Difficile en tout cas de brosser un portrait-robot du passeur-type, tant profils et prestations sont variés.

Certains, les plus démunis, opèrent à titre individuel, dans le but parfois de financer leur propre passage. « Tout se monnaye: du contact téléphonique d’un autre passeur pour une dizaine d’euros au trou d’une cisaille dans un grillage pour 100-150 euros », explique un militant associatif habitué du camp calaisien de la « New Jungle » qui abrite une grande partie des 3.000 migrants estimés dans la région.

Cibles privilégiées des forces de l’ordre, particulièrement la nuit où les passeurs font monter les migrants dans les camions depuis des parkings, aires industrielles ou d’autoroutes, les filières plus organisées brassent des sommes considérables.

– 1,4 million d’euros en six mois –

Le démantèlement d’un réseau mi-août, à l’issue d’une enquête ouverte début mai par le parquet de Boulogne-sur-Mer, où six passeurs ont été mis en examen pour leur implication dans un trafic de ressortissants albanais à bord de camions, a ainsi révélé un chiffre d’affaires de 1,4 millions d’euros depuis…février, selon Anne-Laure Arassus, chef-adjoint de l’Office central pour la répression de l’immigration irrégulière et de l’emploi d’étrangers sans titre (Ocriest).

Le voyage proposé par ce réseau depuis l’Albanie et dont 255 personnes ont pu bénéficier coûtait entre 9.100 et 9.800 euros par personne. « Une très belle prise », se félicite-t-elle.

Les prix diffèrent selon la prestation – de 500 à 700 euros pour le passage d’Érythréens à partir du Calaisis jusqu’à 20.000 euros pour un voyage « all inclusive » depuis l’Asie via des réseaux vietnamiens avec avion et prise en charge de l’hébergement – selon cette haute responsable policière.

Ils varient également selon le profil supposé: « Les tarifs sont plus chers pour les Syriens, réputés plus riches: avocats, ingénieurs, médecins… Ils payent donc deux fois plus », avance un responsable de l’Auberge des migrants, François Guennoc.

Les mesures de sécurisation à coups de fils barbelés, grilles de 4 m de haut et caméras de vidéosurveillance du port de Calais depuis début juin, ont cependant rendu le voyage de ce côté-ci quasiment impossible. Restait alors l’option tunnel sous la Manche mais, ici aussi, la sécurisation du site de 650 hectares et ses 28 kilomètres de clôture a été renforcée.

Une conjoncture à laquelle s’adaptent pourtant les organisations criminelles qui se frottent les mains en proposant des formules de passage plus sûres mais de plus en plus chères.

Les tarifs ont ainsi quasiment doublé: « L’ouverture d’un camion se monnayait 500 euros il y a encore quelques mois, aujourd’hui c’est 800-900 euros car il y a plus de policiers, de chiens renifleurs… », constate M. Guennoc. « Avec les nouvelles grilles, il faut faire appel à des +techniciens+ », poursuit un autre responsable associatif.

Face à ces difficultés accrues, certains réseaux commencent même à contourner ou abandonner Calais.

Un nombre croissant de migrants sont chargés loin de la cité portuaire, parfois « dès la sortie de Paris mais aussi dès la Belgique ou les Pays-Bas », selon Mme Arassus.

Et de nouvelles pistes mènent notamment vers le port de Zeebruge dans la Belgique voisine. « Un petit afflux » est également observé du côté de Ouistreham (Calvados), sur la côte normande, d’après le maire Romain Bail, qui se dit « très attentif ».

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