La relation entre la France et l’Italie en terrain miné

Les deux forces politiques qui soutiennent le nouveau gouvernement à Rome, le Mouvement Cinq Etoiles (M5S, antisystème) et la Ligue (extrême droite), ont fait campagne sur la défense des intérêts italiens, y compris et surtout en Europe.

Remise en cause de certains règles européennes, contrôle de l’immigration, rééxamen de projets d’infrastructure, autant de sujets où l’Italie et la France sont parfois sur une route de collision.

Et cela d’autant plus que la relation entre ces deux pays, pourtant très proches, s’est nettement détériorée. « La relation franco-italienne est problématique depuis 2011 et l’intervention en Libye », remarquait ainsi récemment dans un entretien avec l’AFP, Jean-Pierre Darnis, professeur à l’université de Nice (sud de la France) et consultant auprès de l’Institut des Affaires internationales à Rome.

De plus, note cet expert des rapports entre les deux pays, « la situation s’est récemment aggravée après certaines affaires »: le rachat du chantier naval STX par l’Italien Fincantieri, les tensions entre le groupe français Vivendi et l’Italien Mediaset ou encore la situation à la frontière à Vintimille qui cristallise les difficultés entre les deux pays sur la question migratoire.

Dans ce contexte, « n’importe quel incident devient une affaire d’Etat », comme la convocation, très inhabituelle, de l’ambassadeur de France à Rome, Christian Masset, le 30 mars après le contrôle d’un migrant par des douaniers français en territoire italien, jugé inadmissible par les autorités à Rome.

– Pas céder à la panique –

Pour autant, les milieux français n’entendent pas céder à la panique. Le discours volontiers nationaliste de la Ligue ou du M5S ne signifie pas nécessairement la fin de toute collaboration, fait-on valoir dans ces milieux à Rome.

Il faudra « aller au contact, faire preuve de patience, d’apprentissage et renforcer les liens notamment à travers la société civile, pour démonter nos intérêts communs », estime un de ces Français de Rome, ayant requis l’anonymat.

En Europe, où le président français Emmanuel Macron, a un agenda ambitieux de réformes, il faudra là aussi avancer prudemment, sujet par sujet et chercher avec le nouveau gouvernement italien des sujets d’intérêt commun, par exemple sur l’Europe sociale, l’agriculture ou encore la politique industrielle.

« Il y a aussi des convergences en matière économique, comme la réforme du pacte budgétaire européen », remarque ainsi M. Darnis.

Il faudra aussi veiller à ne pas donner de leçons, « mais les Français en sont-ils capables ? », s’interroge-t-il.

Or, « pour modeler +sa+ nouvelle Europe, Emmanuel Macron a découvert qu’il a besoin de l’Italie autant que de l’Allemagne », relevait cet semaine l’éditorialiste du Corriere della sera.

Le président français a d’ailleurs été le premier et le seul dirigeant européen à appeler Giuseppe Conte alors qu’il n’avait pas encore accepté formellement son mandat à la tête du gouvernement italien.

Deux dossiers peuvent cependant alourdir sérieusement le climat entre les deux pays: la question migratoire et la liaison Lyon-Turin.

Le M5S, mouvement auquel appartient le ministre des Transports, Danilo Toninelli, n’a jamais caché son peu d’enthousiasme pour cette liaison ferroviaire, dont les travaux ont pourtant déjà commencé et des milliards d’euros dépensés.

« Tous les grands travaux seront soumis à une évaluation attentive du rapport coût-bénéfice, en vérifiant la durabilité environnementale et économique », a indiqué mercredi M. Toninelli, promettant une réponse dans les prochaines semaines.

Sur l’immigration, le patron de la Ligue et nouveau ministre de l’Intérieur, Matteo Salvini, a lui promis que « la belle vie » pour les migrants était désormais terminée.

Il veut accélérer les expulsions de ceux déjà présents et empêcher de nouvelles arrivées, après avoir réclamé à maintes reprises que les pays voisins de l’Italie, dont la France, prennent aussi leur part du fardeau.

« Je vais certainement demander une réunion avec le ministre français parce qu’il y a un manque d’équilibre dans la gestion, dans les chiffres, dans les coûts », a-t-il ainsi assuré cette semaine, interrogé par l’AFP.

ob/cn/nas

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