L’Amoco Cadiz et la litanie des marées noires en Bretagne

Retour sur cinquante ans de marées noires en Bretagne:

– 1967: Torrey Canyon –

Le 18 mars 1967, le Torrey Canyon, un des plus gros pétroliers de l’époque, affrété par BP et chargé de 121.000 tonnes de brut, s’échoue sur un récif entre les îles Scilly et la pointe sud-ouest de l’Angleterre.

Au bout de dix jours, les autorités britanniques font bombarder l’épave pour tenter de brûler le pétrole qui y reste. Mais déjà une bonne partie de la cargaison s’est échappée, en direction de Guernesey et des côtes bretonnes. C’est la première grande marée noire.

Les nappes brunes atteignent la côte de Granit rose le 10 avril. Militaires et bénévoles se mobilisent pour nettoyer: on monte des barrages à la hâte, on étale de la paille, de la sciure, de la craie… des fosses sont creusées en urgence.

Les oiseaux marins paient un lourd tribut. L’accident a lieu en pleine période de migration: 25.000 oiseaux y trouvent la mort.

Après règlement à l’amiable avec l’armateur américain en 1969, les États français et britannique se partagent 3 millions de livres sterling, équivalent actuel de 39 millions d’euros.

– 1976: Boehlen –

Le 15 octobre 1976, le pétrolier est-allemand Boehlen se brise dans une violente tempête au large de l’île de Sein, à l’ouest du Finistère. 7.000 tonnes de brut viennent souiller la côte sauvage du cap Sizun.

Le désastre écologique se double d’un drame humain: 25 des 32 membres de l’équipage meurent dans le naufrage ainsi que 2 plongeurs et 1 soldat lors des opérations de pompage et nettoyage de l’épave.

– 1978: Amoco Cadiz –

Le 16 mars 1978, en pleine tempête, le supertanker Amoco Cadiz vient s’éventrer sur les rochers devant le petit port breton de Portsall (nord-Finistère). 227.000 tonnes de brut se répandent sur 360 km de littoral, de Brest à Saint-Brieuc.

Une armée de bénévoles et militaires vient nettoyer les plages de sable blond et les rochers de granit, souillés par cette marée noire, la plus importante jamais causée par l’échouement d’un pétrolier.

Le désastre a tué entre 19.000 et 37.000 oiseaux. 30% de la faune et 5% de la flore marine sur 1.300 km2 ont été détruits, selon l’association Bretagne vivante.

Au terme d’un marathon judiciaire, le groupe pétrolier américain Amoco est condamné en 1992 à verser l’équivalent de 35 millions d’euros aux communes polluées et près de 160 millions d’euros à l’Etat français.

– 1980: Tanio –

Le 7 mars 1980, le pétrolier malgache Tanio chargé de 26.000 tonnes de fuel lourd, se casse en deux sous la violence d’une tempête, au nord de l’île de Batz (nord Finistère). 8 membres d’équipage périssent et 6.000 tonnes de fuel se répandent sur les sites classés de la côte de granit rose.

– 1999: Erika –

Le 12 décembre 1999, le pétrolier Erika, affrété par Total, se brise et sombre au large de Penmarc’h, pointe sud du Finistère, laissant s’échapper 20.000 tonnes de fioul lourd.

Poussé par les tempêtes de fin d’année, le pétrole vient souiller 400 km de côtes, du Finistère à la Charente-Maritime. Après un mois de nettoyage, 115.000 tonnes de fioul et déchets sont récupérées.

Cette marée noire aurait tué de 150.000 à 300.000 oiseaux et le préjudice économique est évalué à près d’un milliard d’euros (estimation du cabinet Mazars et Guérard).

Au terme d’un marathon judiciaire, Total est reconnu définitivement responsable en 2012 et les collectivités locales et associations lésées reçoivent un total de 200 millions d’euros d’indemnités.

Sources principales: AFP et le Cedre (Centre de documentation, de recherche et d’expérimentations sur les pollutions accidentelles des eaux).

ot/alc/jlv

BP

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