La Commission « accepté la requête soumise par la France et l’Allemagne qui lui ont demandé d’examiner ce projet sur la base du règlement de l’UE sur les concentrations », a-t-elle précisé dans un communiqué.
L’exécutif européen explique que certes, « ce projet n’atteint pas les seuils de chiffre d’affaires fixés par le règlement de l’UE » pour les opérations devant être notifiées à Bruxelles.
Mais les autorités de la Concurrence de la France et de l’Allemagne, chargées d’examiner ce dossier, ont décidé de le renvoyer à Bruxelles, estimant que cette opération menacerait d’affecter de façon importante la concurrence dans leurs pays respectifs.
« Sur la base des éléments fournis par ces deux pays » et sans préjuger « de l’issue de son enquête exhaustive », la Commission considère que « l’opération pourrait nuire de manière significative à la concurrence en matière de construction navale, en particulier sur le marché mondial des bateaux de croisière ».
L’exécutif européen va à présent demander à Fincantieri de notifier cette opération pour pouvoir commencer son investigation.
« Cette décision est purement procédurale », a expliqué à l’AFP une source au ministère français de l’Economie et des Finances. « Vu la structure du marché de la construction navale, une fois que la Commission aura eu accès aux éléments du dossier, ce qui n’est pas le cas à ce stade, nous sommes confiants qu’il n’y aura aucune préoccupation de concurrence », a-t-elle ajouté.
Mais de l’autre côté des Alpes, cette décision et surtout la saisie de la Commission par l’Allemagne et la France suscitaient de l’agacement voire de la colère.
– « L’Europe n’existe pas » –
« Enième démonstration que l’Europe n’existe pas ou existe uniquement à sens unique », a fustigé le vice-Premier ministre, Matteo Salvini.
« Je ne comprends pas pourquoi, quand une entreprise italienne respectant les règles s’agrandit, va à l’étranger, fait une acquisition, croît et donne du travail en Europe, on fait une requête à Paris ou à Berlin », ajouté le patron de la Ligue (extrême droite), un des deux partis formant la coalition au pouvoir avec le Mouvement 5 étoiles (antisystème).
« Ce n’est pas ainsi que fonctionne la libre concurrence. Quand ce sont les Français qui achètent, tout va bien: j’en ai assez. Je représente un gouvernement qui n’a plus l’intention de se plier aux intérêts économiques d’autres pays. Si l’Europe existe, qu’il y ait égalité des règles et conditions de marché pour tous, sinon nous en tirerons les conséquences », a-t-il dit ajouté.
« Franchement, (l’instruction) m’a surpris », a déclaré pour sa part le chef du gouvernement italien, Giuseppe Conte.
« Dans de nombreux secteurs d’activités économiques, d’autres pays sont avantagés. Maintenant, nous verrons, c’est un processus qui commence seulement », a-t-il dit. Mais, a-t-il ajouté, « cela me semblerait étrange qu’il y ait des obstacles et des contraintes à cette excellence italienne ».
Contacté par l’AFP, Fincantieri s’est refusé à tout commentaire.
La reprise des Chantiers de l’Atlantique par le groupe italien avait été annoncée en septembre 2017. L’accord conclu alors prévoyait que le groupe transalpin détiendrait 50% du capital, plus 1% supplémentaire prêté par l’Etat français.
Ce feuilleton avait commencé en 2016 lorsque STX France, alors seule unité rentable de STX Offshore & Shipbuilding, avait été mis en vente pour cause de redressement judiciaire.
Fincantieri, contrôlé par l’Etat italien et seul candidat à la reprise, avait alors obtenu le feu vert du gouvernement de François Hollande. Mais Emmanuel Macron, fraîchement élu président de la République, avait demandé en mai 2017 à revoir la participation française à la hausse, visant une répartition à parts égales.
Cette proposition avait été rejetée par Rome – les Italiens insistant pour détenir 51% du capital et le contrôle du conseil d’administration-, avant que les deux pays ne trouvent un compromis en septembre 2017.
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