Les Européens en quête de réponses au drame de Lampedusa

Le dossier va s’imposer dès mardi à la table de la réunion des ministres de l’Intérieur qui se retrouvent à Luxembourg. Le président de la Commission européenne José Manuel Barroso se rendra ensuite mercredi à Lampedusa à la demande de l’Italie, a annoncé dimanche le Premier ministre italien Enrico Letta.

La France a par ailleurs l’intention de mettre la question de l’immigration au menu du Conseil européen des 24 et 25 octobre. « Les chefs d’Etat doivent traduire leur indignation en faits et en actes », a affirmé dimanche le chef de la diplomatie française, Laurent Fabius.

Ces déclarations interviennent alors que la politique migratoire des pays de l’UE fait l’objet de vives critiques depuis le naufrage de jeudi, dont le bilan pourrait atteindre plus de 300 morts. Sont notamment mis en cause le manque de coordination inter-UE, la faiblesse des moyens débloqués et l’égoïsme des pays les plus riches.

A Bruxelles, les experts font remarquer que les bonnes paroles prononcées après chaque catastrophe se heurtent à la complexité d’un dossier politiquement explosif, notamment à l’approche du scrutin européen du printemps 2014.

« En temps de crise », se pencher ensemble sur les questions d’immigration « réclame du courage », souligne un responsable de l’UE.

De fait, « les politiques migratoires, fragmentées, sont entre les mains des Etats-membres et considérées à l’aune de préoccupations intérieures », a ainsi déploré Michele Cercone, le porte-parole de la commissaire aux Affaires intérieures, Cecilia Malmström.

Certains responsables soulignent toutefois que les capitales n’ont pas la capacité à faire face seules et appellent à une véritable « politique européenne de l’immigration globale, solidaire et équilibrée », comme l’a déclaré samedi le ministre belge des Affaires étrangères, Didier Reynders.

Surveillance accrue des côtes libyennes

A court terme, il est peu probable que les règles en place ne soient remises en cause. Il en va ainsi du principe dit de Dublin II, datant de 2003, qui stipule que les candidats à l’asile dans l’UE doivent déposer leur demande dans le pays par lequel ils sont entrés.

Ce système est inlassablement dénoncé par les Etats du sud, au premier rang desquels l’Italie, la Grèce ou l’Espagne, qui réclament un mécanisme de répartition de la gestion des demandes d’asile.

En réponse, les pays du nord affirment prendre leur part du fardeau puisque plus des deux-tiers des 102.700 demandes accordées en Europe en 2012 l’ont été par l’Allemagne, la France, le Royaume-Uni, la Suède ou la Belgique.

Si aucune avancée n’est attendue sur cette question, les Européens pourraient s’entendre pour renforcer la lutte contre les réseaux criminels exploitant les migrants, les sanctions contre les passeurs ainsi que le contrôle des frontières maritimes.

L’Italie insiste sur la nécessité de mieux surveiller les côtes de la Libye, d’où partent un nombre croissant de bateaux clandestins, une augmentation liée au désordre régnant dans ce pays depuis la chute du régime Kadhafi.

Ce contrôle est notamment du ressort de l’agence Frontex de surveillance des frontières européennes, créée en 2004. « Tout le monde reconnaît que Frontex n’est pas dimensionné au niveau où il devrait être », a déclaré dimanche M. Fabius, en qualifiant de « honte » le fait que son budget annuel ne dépasse pas 60 millions d’euros.

En complément, l’UE a mis au point Eurosur, un programme destiné à améliorer la coordination entre les Etats membres pour mieux « pister, identifier et secourir » les navires chargés de migrants en danger. Le Parlement européen doit donner son aval cette semaine à cet outil dont le coût est évalué à 244 millions d’euros pour la période 2014-2020.

Mais ces avancées ne portent pas sur le renforcement des patrouilles et des moyens d’intervention en mer, un sujet sensible comme le démontre la polémique lancée ce week-end sur la faiblesse des services de secours déployés par l’Italie pour réagir au naufrage de Lampedusa.

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