En fin de matinée, un groupe de grévistes opposé à la loi travail a occupé brièvement un poste de haute tension (225.000 volts) en Loire-Atlantique, qui alimente la région de Saint-Nazaire. Résultat: 125.000 foyers privés d’électricité pendant plus d’une heure et demie.
A Paris, des manifestants ont envahi le poste d’aiguillage à la gare de Lyon, empêchant tout départ durant une heure.
La journée avait commencé par de nombreux blocages et barrages filtrants: centrale de Flamanville, gare de Lorient, chantiers navals STX de Saint-Nazaire, usine Renault Cléon près de Rouen…
Alors que les grèves persistent aussi dans les raffineries, dans les ports et docks, l’énergie ou encore le secteur du traitement des déchets, le Premier ministre Manuel Valls a évoqué son « sentiment de gâchis » à propos de l’impact économique du conflit social.
Des milliers d’opposants à la loi réformant le droit du travail battaient également le pavé dans plusieurs villes, en attendant une manifestation nationale à Paris, le 14 juin, à l’appel de l’intersyndicale (CGT, FO, FSU, Solidaires, Unef, Fidl, UNL): Rennes, Nantes, Brest, Rouen, Grenoble, Toulouse, Auch…
Un face-à-face tendu entre forces de l’ordre et jeunes au visage dissimulé a eu lieu à Nantes, où un manifestant a été blessé à l’arcade sourcilière, et au moins une personne interpellée. A Rennes, les policiers ont chargé des manifestants qui tentaient d’accéder à la rocade.
Sur un site Arkema près de Lyon, entre 1.300 et 5.000 personnes ont manifesté en marge d’une visite du ministre de l’Economie, Emmanuel Macron.
Dans les secteurs de l’énergie, la CGT a lancé un appel à la grève reconductible, tandis que la CFE-CGC-Energies et l’Unsa-Energies se sont jointes à la mobilisation jeudi. Des arrêts de travail ont été votés dans 16 des 19 centrales nucléaires françaises, et des militants ont basculé plus d’un million de foyers en tarifs heures creuses en Ile-de-France, ainsi qu’à Lorient et près de Cherbourg.
Pour le symbole, des manifestants ont brièvement bloqué Radiall, l’entreprise du patron du Medef, Pierre Gattaz, dans l’Isère. Ce dernier avait créé la polémique en comparant certains militants CGT à des « terroristes ». Un mot « inadapté », a-t-il ensuite reconnu.
– L’Unsa-ferroviaire suspend la grève –
A la pointe de la mobilisation, le patron de la CGT, Philippe Martinez, a accusé l’exécutif de refuser le dialogue, lui renvoyant la responsabilité d’éventuelles grèves pendant l’Euro.
Mais le gouvernement entend « tenir sur le fond » du projet, sur lequel près de 400 amendements ont été déposés en commission au Sénat.
A la SNCF, où les négociations d’entreprise sont dans leur phase finale, le trafic des trains était perturbé pour la deuxième journée consécutive, après la reconduction de la grève mêlant revendications propres aux cheminots et loi Travail. L’entreprise publique a recensé 15,2% de grévistes, contre 17% mercredi. Seulement 40% des Transiliens et RER circulaient en moyenne, le tiers des Intercités, la moitié des TER et six TGV sur dix.
Le trafic devrait néanmoins s’améliorer, l’Unsa-ferroviaire, deuxième syndicat à la SNCF, ayant annoncé « suspendre son préavis » tout en affirmant ne « rien s’interdire dans les jours à venir » pour « maintenir la pression sur les négociations ».
Dans les transports parisiens, la CGT-RATP a appelé à une grève illimitée pour des questions salariales et contre la loi Travail. Mais le trafic était normal dans le métro, les bus, les tramways et sur le RER A.
Le trafic aérien était légèrement perturbé, notamment à Orly et Lille où Air France a annulé 10% des vols, en raison d’une grève des contrôleurs aériens à l’appel de la CGT-fonction publique contre « l’inacceptable » loi travail.
En revanche, les cinq syndicats des aiguilleurs du ciel ont levé leur préavis de grève pour le week-end, après négociation sur les effectifs et les primes.
Mais les difficultés vont arriver plus tard: à Air France, les trois syndicats de pilotes appellent à faire grève du 11 au 14 juin pour des raisons purement internes -défendre l’emploi et protester contre une modification de certaines règles de rémunération.
Le début de leur mouvement coïncidera avec les premiers jours de l’Euro de football (10 juin-10 juillet) organisé en France.