Migrants: les Etats-Unis mettent la pression sur les gouvernements d’Asie du sud-est

Le secrétaire d’Etat John Kerry s’est entretenu par téléphone avec son homologue thaïlandais « pour discuter de la situation des migrants dans la mer d’Andaman et évoquer la possibilité pour la Thaïlande de leur fournir des abris temporaires ».

« Nous appelons les gouvernements de la région à ne pas repousser les nouveaux bateaux qui arrivent », a déclaré le porte-parole du département d’Etat Jeff Rathke, alors que c’est jusqu’ici la politique adoptée par les pays de la région.

Il a appelé les gouvernements « à travailler ensemble rapidement, d’abord et avant tout pour sauver la vie des migrants ».

Le destin tragique de milliers d’exilés du Bangladesh ou de Birmanie fuyant la misère ou les persécutions dans leur pays d’origine fait écho au drame des migrants qui tentent de gagner l’Union européenne en traversant la Méditerranée.

En Asie du sud-est, cet exode dure depuis plusieurs années, mais il prend depuis quelques jours une tournure particulièrement catastrophique. Les filières clandestines se retrouvent soudain désorganisées par le nouvelle politique répressive de la Thaïlande.

Ne pouvant plus se rendre dans ce pays, traditionnelle voie de passage, les trafiquants ont donc abandonné en mer près de 8.000 migrants.

Certains ont tout de même réussi à rallier ces derniers jours les côtes malaisiennes et surtout indonésiennes où la police a décrit des scènes terribles de migrants se jetant par-dessus bord, avant d’être récupérés.

« Ils étaient en train de s’entretuer », a dit Sunarya, chef de la police de la ville de Langsa, où des centaines de migrants ont débarqué vendredi. « Comme le bateau était surchargé, il fallait se débarrasser d’une partie des gens, qui étaient probablement en train de se défendre ».

Abandonné cette semaine par le capitaine et l’équipage, ce bateau a été repoussé d’abord par l’Indonésie puis par la Malaisie. Les vivres venant à manquer les deux groupes – Rohingyas d’un côté et Bangladais de l’autre – se sont alors affrontés pour obtenir le peu de nourriture qui restait, a expliqué Mohammed Koyes, survivant bangladais.

« Lorsque nous avons demandé de la nourriture, ils nous ont battus. Nous, les Bangladais, étions très faibles donc nous ne pouvions pas nous battre », a-t-il ajouté.

– Jeté à la mer –

Les affrontements se sont encore amplifiés lorsque le bateau a commencé à sombrer, ajoute Mohammed Amin, que d’autres passagers ont jeté à la mer. Il a dérivé six heures avant d’être secouru.

« Dieu merci, nous avons survécu, j’ai une femme et des enfants en Malaisie », confie-t-il.

Près de 600 migrants ont été déjà trouvé refuge dans la province d’Aceh à Sumatra. D’après les pêcheurs indonésiens qui ont porté secours à de nombreux migrants, certains étaient blessés, victimes manifestement de coup de couteau.

Dans ce contexte, les appels aux gouvernements de la région se sont de plus en plus pressants chaque jour.

Le secrétaire général de l’ONU Ban Ki-moon a appelé les pays à sauver les migrants tandis que le Haut-Commissaire pour les droits de l’homme des Nations Unies, Zeid Ra’ad Al Hussein, s’est dit « consterné » et a dit craindre « de nombreux décès ».

Mais l’Indonésie est restée ferme.

Les migrants « ne seront pas autorisés à entrer dans notre région. S’ils le font cela pourrait créer des problèmes sociaux », a déclaré le général Moeldoko, chef de l’armée de l’Indonésie, d’après les médias d’Etat.

La Birmanie, pays où vit 1,3 million de Rohingyas est montrée du doigt par ses voisins. Mais Rangoun a insisté pour dire qu’il ne s’agissait pas de son problème et a menacé de boycotter le sommet régional organisé par la Thaïlande le 29 mai.

Le Premier ministre malaisien, Najib Razak, a déclaré samedi que son gouvernement espérait une « réponse positive » de la Birmanie avec laquelle il est en contact pour tenter de régler le problème des milliers de migrants de la minorité persécutée des Rohingyas qui fuient le pays.

En Thaïlande, la marine a découvert une centaine de Rohingyas sur une île dans le sud-ouest alors qu’un autre bateau transportant 300 personnes dont de nombreux enfants amaigris et affamés, aperçu près des côtes thaïlandaises est reparti vendredi en mer.

Chaque printemps, des milliers de bateaux bondés de migrants traversent le golfe du Bengale. Des centaines meurent chaque année, selon les Nations Unies.

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