Dans une déclaration devant la chambre des députés, après une minute de silence observée en mémoire des 800 victimes du naufrage survenu le week-end dernier, le chef du gouvernement italien Matteo Renzi a estimé que « ce qui arrive aujourd’hui avec la vente de personnes » rappelle l’époque de la traite de millions d’esclaves d’Afrique vers l’Amérique.
« Combattre les trafiquants d’hommes signifie combattre les marchands d’esclave du XXIème siècle. Ce n’est pas seulement une question de sécurité et de terrorisme, mais de dignité humaine », a-t-il déclaré à la veille du sommet européen qui doit prendre des mesures pour lutter contre les trafics de passeurs en Méditerranée à partir de la Libye.
« Je suis optimiste que l’Europe puisse changer d’approche. La convocation d’un Conseil européen est un pas en avant extraordinaire », s’est-il félicité.
Dimanche, il avait évoqué la possibilité d' »interventions ciblées » contre les passeurs en Libye, sans en préciser les modalités.
La ministre de la Défense Roberta Pinotti a indiqué de son côté mercredi que l’Italie était « prête à prendre la tête d’une mission internationale » si celle-ci devait être décidée et approuvée par les Nations unies et l’Union européenne.
« Des négociations sont en cours avec l’UE et l’ONU pour un mandat international en vue de lutter contre les marchands de mort et pour couler leurs bateaux avant qu’ils ne prennent la mer », avait déjà déclaré mardi son homologue de l’Intérieur Angelino Alfano.
M. Renzi a également demandé que les opérations de surveillance des mers Triton et Poseidon au large de la Grèce soient renforcés. Il a aussi indiqué que l’Italie proposerait qu' »une équipe européenne gère » désormais les procédures d’asile, « patrimoine non d’un seul pays mais de tous les 28 ».
Il a mis en garde ses partenaires européens contre les solutions simplistes: « il est simpliste de dire +tous doivent retourner chez eux+, ou que nous devons tous les accueillir », et condamné avec virulence le populisme anti-immigrés de certains Européens.
Le chef du gouvernement italien a aussi plaidé pour que les causes des départs soient combattues « à leurs racines ». Avec l’ONU, l’Europe « doit avoir une stratégie à long terme en Afrique », en ayant une présence forte dans les pays au sud de la Libye. « L’Afrique doit devenir l’élément clé de la politique italienne et mondiale », a-t-il dit.
M. Renzi a par ailleurs condamné l’assassinat de 28 Ethiopiens par un groupe se réclamant en Libye de l’Etat islamique (EI). Ils étaient « des migrants potentiels qui auraient sans doute voulu monter eux-mêmes sur les bateaux » à destination de l’Italie, a-t-il dit.