STX: dix ans mouvementés pour le dernier grand chantier naval français

Les ex-Chantiers de l’Atlantique ont livré en mai 2016 le plus grand navire de croisière jamais construit, l’Harmony of the Seas, après avoir fabriqué des paquebots mythiques comme le France (1960) et Queen Mary 2 (2003). Ils affichent un carnet de commandes « plein » jusqu’en 2026.

STX France emploie 2.600 salariés directs et 5.000 chez ses sous-traitants.

– Cédés par Alstom en 2006

Créés en 1861 et regroupés en 1955 sous le nom de Chantiers de l’Atlantique, les chantiers navals de Saint-Nazaire sont cédés en janvier 2006 par le groupe de construction et d’énergie français Alstom dont ils étaient la filiale depuis 1984.

Les Chantiers, en situation de déficit chronique, sont vendus à 75% au norvégien Aker Yards. L’opération permet de donner naissance au numéro 2 mondial des paquebots avec 40% de part de marché, derrière l’Italien Fincantieri.

– Rachetés par le coréen STX en 2008

Le constructeur naval sud-coréen STX Shipbuilding, déjà actionnaire de référence d’Aker Yards, lance une offre sur la totalité du groupe norvégien avec comme ambition de former le numéro un du secteur.

Il passe un pacte avec le gouvernement français de François Fillon pour garantir à l’Etat français une minorité de blocage dans les chantiers de Saint-Nazaire. Le groupe sud-coréen prend en août 2008 le contrôle d’Aker Yards qui devient STX Europe. Les Chantiers de l’Atlantique deviennent pour leur part STX France.

– Creux de la vague en 2009/2010

Faute de commandes, STX France multiplie les mesures de chômage partiel et de départs volontaires en 2009. La commande d’un paquebot de croisière par l’armateur italien MSC arrive comme une première bouffée d’oxygène.

– Le ciel s’éclaircit fin 2012

L’horizon se dégage vraiment en décembre 2012 avec une commande historique d’une valeur d’un milliard d’euros pour la construction d’un paquebot géant pour le croisiériste américain Royal Caribbean International (RCI). D’autres commandes pour des navires « de très haut niveau de luxe » suivent.

– Mise en vente en 2016

Lourdement endetté, STX Offshore and Shipbuilding est mis en vente en octobre 2016 par la justice sud-coréenne. Les chantiers navals de Saint-Nazaire sont la seule unité rentable du groupe et sont offerts séparément à un potentiel acquéreur.

– L’Italien Fincantieri retenu début 2017

Seul candidat à avoir déposé une offre, le constructeur naval italien Fincantieri est retenu comme « repreneur exclusif » en janvier 2017 par la justice sud-coréenne pour les 66,66% de STX France détenus par le groupe coréen, placé en redressement judiciaire.

Le gouvernement de François Hollande obtient de Fincantieri qu’il ne reprenne que 48% du capital et reste minoritaire pendant sept ans, épaulé toutefois par la Fondazione CR Trieste (7%), l’Etat français conservant environ un tiers du capital et un droit de veto.

Le 19 mai, l’Italien signe un accord pour la reprise de la participation pour un montant de 79,5 millions d’euros. Mais le 31, le nouveau président français, Emmanuel Macron, annonce son intention de « revoir » l’accord.

– Nationalisation temporaire

Le 26 juillet, le ministre de l’Economie Bruno Le Maire menace d’exercer son « droit de préemption » sur STX France, dont l’Etat français détient toujours 33,34%, si son offre d’en « maintenir le contrôle à 50/50 » avec Fincantieri est rejetée.

Les Italiens insistent, eux, pour avoir au moins 51% du capital et le contrôle du conseil d’administration.

Le lendemain, M. Le Maire, qui veut des garanties sur le transfert du savoir-faire et le maintien des postes de travail, annonce une nationalisation temporaire de l’entreprise, le temps de trouver une « solution industrielle » avec l’Italie et Fincantieri.

Paris et Rome se donnent jusqu’au sommet franco-italien du 27 septembre pour tenter de trouver une solution « réciproquement acceptable ».

– Nouvel accord entre Rome et Paris

Le 27 septembre, un accord entre Rome et Paris donne de fait la majorité à l’Italien Fincantieri et un rapprochement entre Fincantieri et le français Naval Group est envisagé.

Fincantieri obtient 50% des chantiers navals de Saint-Nazaire auxquels il faut ajouter 1% « prêtés » par l’Etat français, avec « droit de retour » pendant « 12 ans » si l’Italien ne respecte pas ses engagements.

Les conditions portent sur la gouvernance, le savoir faire des chantiers, les investissements, la préservation de l’emploi et la sous traitance locale.

En contrepartie des concessions françaises, les deux capitales se sont également entendues pour étudier l’opportunité d’un rapprochement entre les groupes français Naval Group et italien Fincantieri d’ici l’été prochain dans le domaine de la défense navale.

ot/sw/fka/aro

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