« On subventionne massivement les flottilles qui ont l’empreinte environnementale la plus forte, et tout ça avec un bilan économique et social pas très bon », résume Didier Gascuel, professeur en écologie marine à l’Institut Agro de Rennes et coauteur de l’étude. « On est dans une situation absurde dans laquelle la société ne finance pas les bonnes flottilles ».
En se basant sur des données publiques, les chercheurs ont dressé « la première évaluation multicritères de l’impact des flottilles de pêche », sur la base de dix indicateurs sociaux, économiques et environnementaux, s’est félicitée Claire Nouvian, présidente de l’association de défense des océans Bloom, qui a contribué à la mise en place du groupe de recherche.
L’étude dresse un paysage contrasté des flottilles françaises de pêche de l’Atlantique Nord-Est (70% des pêches métropolitaines).
Les flottilles utilisant les « arts dormants » (filets, lignes, casiers) ont ainsi un bon bilan environnemental et un très bon bilan en termes de création d’emplois et de valeur ajoutée. Leur seul point noir concerne la capture d’espèces sensibles, comme les oiseaux marins ou les cétacés.
La pêche à la coquille, à l’aide de dragues qui raclent les fonds marins, a aussi un « impact environnemental relativement bon », selon M. Gascuel. Peu émettrice de CO2 et respectueuse de la ressource, la drague à coquille ne contribue qu’à 6% de l’abrasion des fonds marins.
A l’inverse, la pêche au chalut de fond a une « très forte empreinte environnementale », en contribuant notamment « de manière très forte » à la surexploitation des ressources, et surtout à l’abrasion des fonds marins.
Les flottilles de l’Atlantique Nord-Est raclent chaque année 612.000 km2 de fonds marins, une superficie équivalente à la France métropolitaine, dont les chaluts et sennes de fond sont responsables à 90%.
Ces flottilles, qui doivent dépenser beaucoup d’énergie pour tirer des chaluts de fond, sont également « les plus subventionnées », principalement via la détaxe du gazole pêche, selon l’étude.
D’une manière générale « les chalutiers industriels ne sont aujourd’hui rentables que grâce aux subventions, qui sont supérieures à leur excédent brut d’exploitation », souligne M. Gascuel.
En outre, les chalutiers pélagiques industriels génèrent « 10 fois moins d’emplois par tonne débarquée », que la flottille des filets, lignes et casiers côtiers « alors même qu’elle reçoit 7 fois plus de subventions par emploi », selon l’étude.
Pour Mme Nouvian, « les subventions créent des conditions d’opération totalement artificielles qui génèrent une incitation à surexploiter » les océans.