En raison de son impact social sur le port de Marseille et de son importance pour la « continuité territoriale » entre la Corse et le continent, le dossier est suivi de près à Paris. Mais également à Bruxelles, qui veille au respect de la concurrence et surveille de près les aides publiques accordées.
La SNCM, dont les navires à la coque blanche et bleue desservent la Corse et le Maghreb a suscité quatre offres de reprises. Toutes prévoient des centaines de suppressions d’emplois.
« Les marins et les sédentaires sont très inquiets » avant l’audience de vendredi, alors que certaines offres paraissent « assez dramatiques » socialement, témoigne Jean-François Simmarano, de la CGT.
Déposées début septembre au tribunal, elles émanent de cinq repreneurs potentiels — deux ont présenté une offre conjointe. Les juges doivent entendre les candidats, à huis-clos, à partir de 09H00. Leur décision éventuelle devrait être rendue en octobre.
Pour les salariés, la compagnie maritime et son actionnaire majoritaire Transdev, pressé d’en finir avec ce dossier encombrant, l’audience aura un goût de déjà-vu. Après la mise en redressement judiciaire en novembre 2014 et plusieurs audiences, le tribunal de commerce avait retoqué le 10 juin dernier trois offres, car elles n’apportaient pas « de garanties sérieuses de viabilité économique ».
Depuis, les candidats de l’époque, qui promettaient de sauver au maximum 900 emplois, ont revu leur copie… mais pas le nombre de postes conservés.
Deux nouveaux candidats, le groupe Stef et le consortium corse Corsica Maritima sont cependant entrés dans la course pour l’acquisition de la compagnie, qui cumule les déboires depuis des années.
La concurrence acharnée de Corsica Ferries, qui bat pavillon italien, a durement affecté la SNCM, qui bat pavillon français offrant des garanties sociales supérieures, tandis que les difficultés économiques et les grèves à répétition ont terni son image. La gestion erratique de l’entreprise par ses actionnaires est également durement mise en cause par les syndicats.
-saison réussie-
La Société nationale Corse-Méditerranée, qui existe sous sa forme actuelle depuis les années 1970, a déjà traversé de nombreuses crises. Mais aujourd’hui, son avenir est suspendu à la menace de lourdes condamnations de Bruxelles, qui exige de la compagnie le remboursement à l’Etat de plus de 400 millions d’euros d’aides publiques, considérées comme illégales.
Le repreneur peut espérer échapper à cette sanction s’il prouve qu’il y a « discontinuité économique », c’est à dire suffisamment de différence entre la compagnie actuelle et celle qu’il entend mettre en place. Tous les candidats à la reprise s’attachent à démontrer qu’ils remplissent cette condition.
Pour la CFE-CGC, l’audience de vendredi pourrait cependant « ne pas être conclusive », les juges disposant encore d’un peu de temps. D’autant que « la trésorerie n’est pas mauvaise » permettant à la SNCM de subsister jusqu’à la fin de l’année « sans véritable problème économique et financier », selon M. Simmarano.
La compagnie vient en effet, après une saison réussie et des économies à tous les niveaux, d’annoncer son premier bénéfice depuis 2009, à 2,1 millions d’euros entre janvier et août. Elle prévoit néanmoins toujours de terminer l’année dans le rouge.
Les syndicats veulent surtout éclaircir la question de la délégation de service public (DSP). Ce mécanisme de subvention destiné à assurer la continuité territoriale, que la SNCM partage avec sa concurrente La Méridionale pour maintenir des lignes pas forcément rentables à l’année vers la Corse, devra être modifié à partir de 2016 en vertu d’une décision de justice.
Sur ce point, indispensable pour étudier sérieusement les dossiers de reprise selon Pierre Maupoint de Vandeul de la CFE-CGC, la balle est dans le camp de l’Assemblée de Corse.
L’Etat, actionnaire à 25% de la SNCM aux côtés de Veolia (66%) et des salariés (9%), « doit prendre ses responsabilités et cesser de l’abandonner, comme il le fait depuis un an », plaide de son côté M.Simmarano.
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STEF