« Cette cargaison ne contient rien d’autre que des armes obsolètes qui doivent être renvoyées à Cuba après qu’elles auront été modernisées (en Corée du Nord) conformément à un contrat légal », a déclaré mercredi le ministère nord-coréen des Affaires étrangères, cité par l’agence de presse officielle KCNA.
« Les autorités panaméennes doivent laisser les marins qui ont été appréhendés et le navire partir sans délai », a ajouté le ministère.
De son côté, une commission d’experts de l’ONU réclamée par le Panama pour inspecter l’armement saisi devrait se rendra sur place le 5 août, a annoncé le ministre panaméen de la Sécurité, José Raul Molino, lors d’une conférence de presse à Manzanillo, près de Colon (nord).
L’ONU a imposé un embargo sur le commerce des armes avec la Corée du Nord dans le cadre des sanctions imposées à ce pays en raison de son programme nucléaire militaire.
Une porte-parole du département d’Etat américain, Marie Harf, a indiqué que les Etats-Unis avaient « fait savoir aux Cubains que nous discuterons avec eux de ce navire très prochainement ».
En 1962, l’installation par les Soviétiques de missiles nucléaires à Cuba avait placé le monde au bord de l’affrontement nucléaire.
Le ministère cubain des Affaires étrangères a déclaré mardi que ces armes « défensives », datant de l’ère soviétique et qualifiées d' »obsolètes », appartenaient à Cuba et devaient être réparées en Corée du Nord avant d’être rapatriées sur l’île.
« S’il se confirme que la cargaison viole les résolutions de l’ONU, nous attendons du comité de sanctions du Conseil de sécurité qu’il prenne des mesures rapidement », a réagi mercredi le gouvernement sud-coréen, félicitant le Panama pour l’interception du navire.
Le secrétaire général de l’ONU Ban Ki-moon a fait savoir mercredi soir qu’il était « certain » que le comité sur les sanctions du Conseil de sécurité « se saisirait rapidement » de l’affaire.
« Contrebande »
« La cargaison est illicite car elle n’a pas été déclarée. Ce qui n’est pas répertorié, même si c’est obsolète, est de la contrebande », a affirmé mercredi M. Mulino.
Le 10 juillet, le Chong Chon Gang, en provenance de Cuba, a été contrôlé alors qu’il s’apprêtait à entrer dans le canal de Panama, les autorités suspectant la présence à bord de drogue, parmi une cargaison de 220.000 quintaux de sucre.
Les inspections finalement menées vendredi, malgré la résistance de l’équipage, ont permis de découvrir sous des sacs de sucre roux des conteneurs renfermant du matériel militaire.
Il s’agit selon Cuba de « 240 tonnes d’armes défensives obsolètes – deux missiles complets sol-air Volga et Pechora, neuf fusées en pièces détachées, deux avions de type Mig-21 et 15 moteurs pour ce type d’appareil -, toutes fabriquées au milieu du siècle passé et qui devaient être réparées et revenir dans notre pays ».
Selon des analystes à Séoul, la Corée du Nord est effectivement capable de vendre à l’étranger un service de réparation de missiles.
« Mais on ne peut exclure la possibilité que la Corée du Nord importe des pièces pour ses propres missiles datant de l’ère soviétique », a dit à l’AFP Shin In-Kyun, président du Korea Defence Network, un centre d’études privé.
Parallèlement, la justice panaméenne s’apprêtait à interroger les 35 membres de l’équipage, détenus dans une ancienne base militaire américaine, Fort Sherman.
Pendant ce temps, dans le port caribéen de Colon, environ 150 personnes continuent d’extraire, dans une nuée d’abeilles attirées par le sucre, les 220.000 sacs de cette denrée entreposés dans le cargo, mis à l’eau en 1979 et présentant des signes de délabrement avancé, a constaté un photographe de l’AFP à bord.
Les sacs ont été déposés en vrac dans les soutes plutôt que rangés sur des palettes, dans l’intention de décourager toute volonté d’inspection inopinée, selon des observateurs.
Cuba, seul régime communiste d’Amérique et un des rares alliés de la Corée du Nord, détient de l’armement soviétique datant de la fin des années 80 et, n’ayant pas acquis d’armes depuis, a besoin de les moderniser, selon les déclarations de La Havane.
Mais Anya Landau French, éditrice du blog The Havana Note et spécialiste des relations américano-cubaines, se demande pourquoi La Havane aurait choisi de le faire en Corée du Nord alors que Cuba a pris soin dernièrement de préserver ses relations avec Washington, en s’abstenant notamment d’accueillir l’informaticien fugitif Edward Snowden.