L’économie calédonienne est en chute libre: le PIB a reculé de 13,5 % en 2024, les finances publiques sont exsangues et les recettes fiscales ont diminué de 21% après les violences de mai 2024, qui ont fait 14 morts et causé plusieurs milliards d’euros de dégâts.
Face à ce marasme, l’examen du « pacte de refondation » prenait mercredi une importance cruciale. La nouvelle ministre des Outre-mer Naïma Moutchou, qui a participé en visioconférence, a affirmé que « la détermination du gouvernement reste entière » malgré le décalage du calendrier initial en raison de la situation politique à Paris.
« Le Premier ministre Sébastien Lecornu a fait de la Nouvelle-Calédonie une priorité du gouvernement. Et le président de la République partage complètement cette volonté d’avancer. Avancer sans précipitation, mais sans pause », a-t-elle déclaré, cité par le média local Les Nouvelles Calédoniennes.
Et la nouvelle ministre d’annoncer sa venue prochaine dans la collectivité française du Pacifique pour « poursuivre le dialogue avec l’ensemble des partenaires ».
La crise politique fait peser l’incertitude sur la mise en oeuvre de l’accord de Bougival, alors que le report des élections provinciales doit être adopté avant la fin du mois et la réforme constitutionnelle d’ici la fin de l’année, tout en freinant la reprise économique du territoire.
Pendant ce temps, une mission interministérielle conduite par Claire Durrieu pour accompagner la Nouvelle-Calédonie dans la refondation de son modèle poursuit ses travaux à Nouméa.
Le futur pacte doit permettre « de définir les mesures d’urgence indispensables pour créer un choc de confiance et relancer l’activité économique », ainsi que d’adopter « des réformes structurelles de long terme », a estimé cette haute fonctionnaire.
– Réformes sous condition –
Parmi les demandes locales figure la transformation en subvention du prêt garanti par l’Etat (PGE) d’un milliard d’euros destiné à soutenir l’équilibre des comptes publics calédoniens à la suite de événements de mai 2024.
Mardi, le président du gouvernement calédonien Alcide Ponga a signé la deuxième tranche de ce PGE, soit 240 millions d’euros, après 560 millions en mars.
Mais ce prêt est conditionné à des réformes fiscales dont l’adoption en août par le Congrès, l’assemblée délibérante du territoire, s’est déroulée dans un climat tendu.
Le plan de 160 millions d’euros d’économies sur trois ans prévoit 27 millions d’euros d’économies sur les allocations familiales, mais aussi une exonération d’impôt pour les nouvelles entreprises et une baisse de 10 points de l’impôt sur les sociétés.
Depuis, plusieurs mouvements dont le FLNKS vitupèrent contre ces mesures qu’ils jugent « inégalitaires ». Le président du groupe UC-FLNKS au Congrès, Pierre-Chanel Tutugoro, a d’ailleurs décliné l’invitation aux réunions sur le pacte de refondation, estimant que celui-ci découle d’un accord de Bougival que son mouvement dénonce.
Mais il a présenté mercredi ses propres propositions. « La seule voie responsable et équitable est d’accroître les recettes publiques », a déclaré M. Tutugoro, qui a déposé une proposition de « loi du pays » créant un impôt de solidarité sur le patrimoine pour les contribuables dont les biens dépassent 840.000 euros.
« Les principales inégalités viennent aujourd’hui des patrimoines et des successions, largement délaissés par l’impôt », soutient le mouvement. En 2019, selon l’Institut de la statistique (ISEE), les 20% les plus riches concentrent 44 % des revenus, contre 5% pour les 20% les plus modestes. C’était avant les émeutes, qui ont encore creusé les inégalités.