Si 2008 avait vu un coup d’arrêt, « aujourd’hui nous sommes au-dessus des chiffres d’avant la crise », assure Joël Janijon, directeur marketing de Lagoon, la marque de catamarans du groupe Beneteau-Jeanneau, numéro un mondial avec 250 à 300 unités produites par an sur deux sites, en Vendée et à Bordeaux.
« Depuis 2008, le marché du multicoque a toujours été en croissance de 2 à 3% en moyenne annuelle et aujourd’hui il retrouve une croissance à deux chiffres », appuie Bruno Voisard, dirigeant du chantier Nautitech, basé à Rochefort (Charente-Maritime) qui a produit 35 unités de 40 à 54 pieds (12 à 16 m) pour un chiffre d’affaires de huit millions d’euros. Dont 80% à l’exportation, la norme pour les multicoques français.
– Moins d’un millier par an dans le monde –
Nautitech, qui a recruté 25 salariés début 2014 pour répondre à la demande, a été racheté cet été par le chantier allemand Bavaria: « Bavaria voulait prendre pied sur le marché du multicoque et ce rachat nous donne les moyens d’augmenter la capacité de production. Nous allons doubler la surface de l’usine de Rochefort et, d’ici deux ans, nous fabriquerons de 60 à 70 unités pour un chiffre d’affaires multiplié par deux », explique Bruno Voisard.
Même son de cloche chez Fountaine-Pajot, numéro deux français du secteur: Nicolas Gardies, directeur général, annonce un chiffre d’affaires en hausse de 20% pour 2013/14 avec 120 unités produites par 400 salariés dans ses deux sites de la région rochelaise, et près de 80% à l’exportation.
Certes, « le multicoque reste un marché de niche », tempère Bruno Voisard. « Dans le monde entier, il se fabrique moins d’un millier de multicoques habitables, dont près de la moitié en France. Seulement trois constructeurs au monde produisent plus de 100 unités par an et on est un constructeur important à partir d’une vingtaine d’unités ».
– Une résidence secondaire mobile –
Qu’est-ce qui explique cette santé, pour un catamaran de l’ordre de 200.000 euros (pour les premiers prix), 400 à 500.000 euros en moyenne?
« Le concept de catamaran attire des gens qui ne sont pas des +voileux+ » purs et durs et d’ailleurs n’empiète pas forcément sur le marché du monocoque, estime Joël Janijon. « Au prix d’une résidence secondaire en dur, on a une résidence de quatre chambres qu’on peut déménager. Et le multicoque a un côté familial, avec un grand séjour et chacun sa chambre, l’espace vital est moins contraint qu’un monocoque, on ne se marche pas dessus ». « Stable, spacieux, lumineux, facile à vivre », résume Nicolas Gardies.
Et puis, les multicoques suivent le sillage des croisières: « Le multicoque est particulièrement adapté à la location, qui représente de 30 à 50% des ventes. Aujourd’hui, quand elles renouvellent leur flotte, les entreprises de charter achètent des multicoques, parce que les agences de voyages sont demandeuses. Un catamaran a un taux de location plus élevé qu’un monocoque », analyse le DG de Fountaine-Pajot.
Ont contribué aussi à l’attrait des multicoques habitables un renouvellement régulier des gammes et une attention poussée au design et aménagement intérieurs.
Symbole de la santé du multicoque, l’entreprise Neel trimarans, créée en 2010, a lancé +une niche dans la niche+, le trimaran de grande croisière: « Nous sommes les seuls à produire ce type de navire en série », dit le fondateur, Eric Bruneel. Depuis sa création, le chantier a vendu 12 bateaux de 0,5 à 2,5 millions d’euros, dont 90% à l’exportation. « Créer ce chantier au coeur de la crise était un pari, dit-il, mais le marché est là. Le trimaran est le meilleur bateau pour le grand large, avec des qualités de confort et des performances supérieures au catamaran. » Neel, qui emploie 10 salariés, a lancé la construction d’une usine de 1.000 m2 pour un million d’euros au port de La Rochelle et envisage de doubler ses effectifs sous deux ans.
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FOUNTAINE PAJOT