L’approbation par la Turquie, le mois dernier, de plans visant à développer à Istanbul un canal de navigation comparable à ceux de Panama ou de Suez a ouvert le débat sur la Convention de Montreux.
« Canal Istanbul » est le plus ambitieux de ce que le président Recep Tayyip Erdogan appelle ses « projets fous », qui l’ont vu transformer l’infrastructure de la Turquie avec de nouveaux aéroports, ponts, routes et tunnels au cours de ses 18 années au pouvoir.
Le gouvernement argue que ce canal permettrait de doter Istanbul d’un nouveau pôle d’attractivité en plus de soulager le Bosphore, l’un des détroits les plus congestionnés du monde.
Plus de 41.000 navires l’ont emprunté en 2018, selon les autorités turques.
Mais les opposants affirment qu’outre son impact sur l’environnement, le projet pourrait compromettre la Convention de Montreux, datant de 1936, qui garantit le libre passage des navires civils dans les détroits du Bosphore et des Dardanelles, aussi bien en temps de paix que de guerre.
Dans leur lettre ouverte, 104 amiraux à la retraite affirment qu’il est « inquiétant » d’ouvrir un débat sur le traité de Montreux, estimant qu’il s’agit d’un accord qui « protège au mieux les intérêts turcs ».
La lettre des amiraux a suscité une vive riposte de la part de responsables du gouvernement, tandis que le parquet d’Ankara a ouvert une enquête.
« Non seulement ceux qui ont signé, mais aussi ceux qui les encouragent, devront rendre des comptes devant la justice », a déclaré sur Twitter Fahrettin Altun, chef de la communication du président Erdogan.
M. Erdogan devrait aborder ce dossier lors d’une réunion lundi à 12H00 GMT, a indiqué la présidence.
Le porte-parole de la présidence, Ibrahim Kalin, a déclaré que cette prise de position des amiraux lui « rappelait l’époque du coup d’État ». « Ils doivent savoir que notre estimée nation et ses représentants ne permettront jamais cet état d’esprit », a-t-il tweeté.
Le gouvernement d’Erdogan a résisté à une tentative de coup d’État en juillet 2016, qu’il a imputée aux partisans du prédicateur musulman Fethullah Gulen, basé aux États-Unis.
La lettre est considérée comme l’intervention de militaires la plus importante en politique depuis lors.
Le maire d’Istanbul, Ekrem Imamoglu, du parti d’opposition CHP, est lui aussi un farouche opposant au projet Canal Istanbul pour des raisons financières et environnementales, raison pour laquelle le ministère de l’Intérieur a ouvert une enquête sur lui en novembre dernier.