Depuis la mi-décembre, la plupart des grosses compagnies maritimes internationales ont décidé de dérouter leur navire pour éviter le passage par le canal de Suez, par lequel transite habituellement 12% du commerce mondial.
Les vaisseaux contournent désormais l’Afrique en passant par le cap de Bonne Espérance, ce qui rallonge le voyage entre l’Asie et l’Europe de 10 à 20 jours en moyenne, selon Arthur Barillas, directeur général d’Ovrsea, un commissionnaire de transport.
Les compagnies maritimes ont déjà annoncé des hausses de tarif importantes pour couvrir les frais liés à ce détour. CMA CGM a doublé le prix d’un conteneur de 40 pieds entre l’Asie et la Méditerranée (3.000 à 6.000 dollars).
Même chose pour le leader du secteur, l’italo-suisse MSC, dont les tarifs sont passés de 2.900 à 5.900 dollars pour le transport d’un conteneur de 40 pieds sur le même trajet.
Les attaques des rebelles Houthis en mer Rouge – 23 depuis le 19 octobre selon l’armée américaine – en représailles des bombardements israéliens sur Gaza ont conduit à ces soudaines hausses de tarif, mais pas seulement.
– Nouvel an chinois –
« Il y a un vrai afflux en provenance d’Asie », explique Arthur Barillas. Jusqu’au Nouvel an chinois, le 10 février prochain, « tous les bateaux sont pleins », assure-t-il.
Les clients se pressent de faire acheminer leurs marchandises avant ces célébrations qui mettent le pays, premier exportateur mondial, à l’arrêt pendant une semaine.
Face à cela, « la concurrence réagit de manière uniforme. Il y a dix compagnies qui se partagent 80 à 90 % du volume (de marchandises) transporté et toutes affichent des taux très élevés car les bateaux sont pleins », souligne-t-il.
L’un des indicateurs de référence pour mesurer le taux (tarif) de fret des marchandises acheminées depuis la Chine, le Shanghai Contenarized Freight Index (SCFI), a quasiment doublé en quelques semaines.
Une hausse aussi brutale rappelle les années Covid, au cours desquelles les taux de fret avaient atteint des niveaux inédits dans l’histoire du transport maritime international en raison de la désorganisation des chaînes logistiques.
Cependant, « tout le monde ne paye pas le double. Seulement quelques uns », assure Niels Rasmussen, analyste en chef pour Bimco, principale association mondiale de transporteurs maritimes.
En effet, la plupart des entreprises ne paient pas les taux « spot » mais ont des contrats de long terme avec les grandes compagnies maritimes. « Si vous regardez le tarif moyen pour tout ce qui sort de Chine et passe par la majeure partie de l’Europe et de la Méditerranée, vous constaterez que l’augmentation est de 15 à 20 % », précise M. Rasmussen.
– Elections à Taïwan –
Les professionnels constatent aussi une pénurie de conteneurs en Asie en raison de la durée plus longue des voyages.
Pour autant, « les transporteurs sont bien mieux armés pour gérer opérationnellement ces déroutements comparé aux perturbations observées durant la pandémie », affirme la plateforme israélienne de réservation et de paiement de fret Freightos dans sa note hebdomadaire.
Les compagnies ont en effet utilisé les profits faramineux engrangés en 2021 et 2022 pour acheter des centaines de nouveaux bateaux qui commencent à être livrés.
Les attaques en mer Rouge ne sont pas les seules à troubler le commerce international. La sécheresse historique qui frappe le canal de Panama, obligeant les autorités à ralentir le transit et les navires à patienter plus longtemps avant de pouvoir l’emprunter, perturbe aussi les échanges.
Surtout, les transporteurs scrutent avec attention l’issue des élections présidentielle et législatives à Taïwan prévues le 13 janvier prochain, de peur d’une autre crise impliquant la Chine dans la région.
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