La direction de l’usine Koniambo Nickel SAS, dans le nord du territoire français du Pacifique Sud, a fait savoir que ses 1.200 salariés seraient licenciés le 31 août.
Une cinquantaine d’entre eux resteront en activité au-delà pour « assurer le maintien du site en veille froide ».
Les comptes plombés par une dette colossale de 13,5 milliards d’euros, KNS n’a jamais été rentable et recherchait un repreneur depuis le départ en février dernier du groupe anglo-suisse Glencore, son actionnaire principal (49%).
« Si le processus de recherche d’un repreneur se poursuit activement et que trois groupes continuent à montrer un intérêt pour notre entreprise », a-t-elle expliqué, « nous ne disposons ni d’une offre finalisée, ni de visibilité sur le financement des opérations ».
« Par conséquent, nous sommes contraints de poursuivre le processus de licenciement collectif pour motif économique », a ajouté KNS dans un communiqué.
Glencore avait accepté de financer les salaires jusqu’à fin août afin de permettre une mise en veille dite « chaude » des opérations, permettant une reprise rapide des activités en cas de rachat.
Le site KNS recourait également à des sous-traitants employant quelque 500 personnes.
La dette de l’entreprise était jusqu’ici entièrement assumée par Glencore, au terme du pacte d’actionnaires qui liait le groupe à la Société minière du Pacifique Sud (SMSP), détenue par des intérêts publics représentant la collectivité indépendantiste de la province Nord.
KNS a toutefois assuré que la décision de licencier la quasi-totalité de ses effectifs « ne remet pas en cause le processus de recherche d’un nouveau partenaire ».
La Nouvelle-Calédonie subit de plein fouet la crise mondiale du nickel, considéré comme le poumon économique du territoire et qui fait vivre, selon les estimations, 20 à 25% de ses 270.000 habitants.
– Concurrence indonésienne –
Outre KNS, les deux autres usines du secteur sont également menacées de fermeture, victimes notamment de l’essor de l’industrie minière indonésienne dopée aux capitaux chinois et dont l’énergie est subventionnée.
Dans le sud de l’archipel, Prony Resources, la seule qui produit le précieux minerai, est totalement à l’arrêt.
A Nouméa, la SLN, qui produit du ferronickel comme la KNS, affiche une perte nette de 72 millions d’euros au premier semestre, selon les chiffres présentés jeudi par son actionnaire principal, le groupe français Eramet.
Confrontées à la concurrence indonésienne, à la hausse des prix de l’énergie et à l’épuisement des gisements les plus riches, le nickel calédonien rencontre d’importants problèmes de rentabilité.
L’Etat a dû intervenir massivement pour soutenir le secteur ces dernières années. « Plus de 700 millions d’euros d’aide » d’argent public depuis 2016, rappelait en mars le ministre de l’Economie Bruno Le Maire.
Pour sauver le secteur, le gouvernement plaide pour un « pacte nickel » réunissant l’Etat, les collectivités calédoniennes et les industriels. Mais le Congrès de Nouvelle-Calédonie juge trop importante sa participation exigée par l’Etat en échange de son investissement.
Le territoire est toutefois déjà lourdement endetté, notamment par les prêts d’urgence contractés durant la pandémie de Covid-19.
Les difficultés du secteur ont encore été aggravées par l’insécurité qui règne dans l’archipel depuis la mi-mai et perturbe l’approvisionnement en minerai et l’accès des salariés à de nombreux sites.
Les émeutes, causées par un projet de réforme du corps électoral de l’archipel rejeté par les indépendantistes, ont causé la mort de 10 personnes, dont deux gendarmes, et des dégâts sur les infrastructures d’un montant estimé à plus de 2 milliards d’euros.
La crise politique qui a suivi a donné un coup d’arrêt aux discussions sur l’avenir du secteur.
Dès le mois de mai dernier, Thomas Sevetre, le directeur général de la Société minière Georges-Montagnat, un sous-traitant de la SLN, avait averti: « les conséquences (de la crise) pour la mine et la Nouvelle-Calédonie sont catastrophiques ».
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