Sous-marins vendus à la Malaisie en 2002: un ancien patron de la DCNI et un ex-responsable de Thales mis en examen pour corruption

Entendus en mai dans le bureau du juge d’instruction Roger Le Loire, Philippe Japiot, ancien président de la DCNI, la branche internationale de la Direction des constructions navales (rebaptisée récemment Naval group) et Jean-Paul Perrier, ex-directeur général de Thales et ex-président de sa filiale internationale Thint, ont été mis en examen pour « corruption active » et « abus de biens sociaux », a précisé l’une de ces sources.

Dans cette enquête instruite au pôle financier depuis 2010 après une plainte de l’ONG malaisienne anticorruption Suaram, la justice soupçonne que des commissions, dissimulées derrière des contrats de consultants, ont pu servir à corrompre l’ancien ministre de la Défense malaisien, Najib Razak, devenu Premier ministre en 2009, via un de ses conseillers, un expert en questions militaires, Abdul Razak Baginda.

Les juges ont déjà mis en examen deux ex-dirigeants de l’industrie de la défense: Dominique Castellan, qui fut lui aussi président de la DCNI et Bernard Baïocco, ex-président de Thales international Asia (Thint Asia).

Les quatre personnes mises en cause à ce stade dans l’enquête contestent les faits.

L’affaire porte sur la vente en 2002 de deux sous-marins Scorpène et d’un sous-marin Agosta à la Marine Royale malaisienne pour près d’un milliard d’euros. L’opération conclue par la DCNI, alliée avec le groupe d’électronique et de défense Thales, intervenait dans un contexte de durcissement de la réglementation sur la rémunération des intermédiaires.

Ce type de contrats passés en marge de la négociation est au coeur du dossier. L’un d’eux, baptisé C5 « ingénierie commerciale », prévoyait le versement par la DCNI de 30 millions d’euros de frais commerciaux à l’exportation (FCE) à Thint Asia, la structure censée aider le groupe d’armement à promouvoir ses produits, selon une source proche du dossier.

D’après l’enquête, une autre société industrielle, Terasasi, dont l’actionnaire principal était Abdul Razak Baginda, a touché de Thint Asia à peu près la même somme pour des consultations, dans le cadre d’un autre contrat, le C4. Les enquêteurs se demandent si ces prestations auraient pu être un habillage pour masquer le versement de pots-de-vins.

Les juges s’intéressent aussi à un autre contrat, prévoyant le versement par la Malaisie de 114 millions d’euros à une société locale, Perimekar, dirigée à l’époque par l’épouse du conseiller, mais il pourrait échapper à l’enquête, car les faits ne se seraient pas déroulés en France.

Les coulisses de ce marché avaient été découvertes à l’occasion de l’enquête en Malaisie sur l’assassinat en 2006 d’une interprète et intermédiaire mongole, Altantuya Shaariibuu. Cette mannequin de 28 ans, qui était par ailleurs la maîtresse d’Abdul Razak Baginda, avait participé aux négociations.

nal/jf/DS/jmi

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