Un syndicat d’officiers français déplore l’opacité autour d’un incident sur un navire de Corsica Ferries

Le Mega Express Five de la Corsica Ferries, qui peut transporter 2.000 passagers, avait talonné sur un haut-fond en s’écartant du chenal de sortie obligatoire du port de L’Ile-Rousse le 31 mai, provoquant un enfoncement de la coque sur 50 mètres et une voie d’eau.

Sans prévenir les autorités, ni procéder aux vérifications d’usage en raison des risques pour les passagers et l’équipage ainsi que pour l’environnement, il avait poursuivi sa route jusqu’à Toulon, effectuant encore trois rotations avec la Corse jusqu’au 2 juin.

La direction de la compagnie, dont tous les navires battent pavillon italien et les équipage sont multinationaux, avait ultérieurement reconnu l’incident, indiquant qu’une « vibration » avait été ressentie à bord mais n’estimant alors pas nécessaire d’immobiliser le navire ni de prévenir les autorités.

Le 2 juin, le Mega Express Five avait toutefois été immobilisé à Ile Rousse, la direction de Corsica Ferries décidant alors de l’envoyer dans le port italien de La Spezia pour y être réparé.

Les travaux de réparation du navire accidenté ont duré jusqu’au 9 juin, selon la compagnie.

La CFE-CCG des officiers (SNCNMM), s’est « étonnée » dans un communiqué « de la déclaration du porte-parole de la Préfecture maritime de Toulon parue dans Le Marin (publication spécialisée, ndlr) du 12 juin, selon lequel +A aucun moment nous n’avons été informés d’un talonnage. Le contrat de confiance entre le capitaine d’un navire et le centre opérationnel de l’État côtier prévoit pourtant d’être prévenu de manière sincère et complète+ ».

Or, a rappelé le SNCNMM, « tout navire a l’obligation de signaler immédiatement au CrossMed tout incident de navigation sous peine de sanctions pénales ».

Les officiers français sont « habitués à un formalisme autrement plus rigoureux du CrossMed, quant au signalement d’incidents, parfois très mineurs, qui peuvent concerner leurs navires », a souligné le syndicat.

Evoquant le naufrage du navire de croisière Costa Concordia en Toscane (32 morts en janvier 2012), le SNCNMM a souligné que « la minoration ou le déni d’un accident et/ou la mauvaise gestion des suites d’un accident par le bord et les services de la compagnie maritime et/ou le manque d’informations qui devraient être transmises aux autorités sont autant de facteurs contribuant à déboucher sur une catastrophe. »

Dans une lettre ouverte au secrétaire d’Etat aux Transports, Frédéric Cuvillier, la CGT-Officiers a accusé la Corsica Ferries de « mettre ses passagers en danger ».

« Ce n’est pas l’évènement de mer en lui-même qui heurte l’ensemble de notre profession, mais bien les suites calamiteuses données à l’incident », a souligné la CGT-Officiers.

« Si des approximations avec les règles fondamentales de sécurité de la part de la compagnie aux bateaux jaunes ont souvent été rapportées, il semble cette fois-ci que celle-ci ait franchi une limite, au-delà de tout ce que l’on pouvait imaginer », a ajouté le syndicat.

Reprochant à la Corsica Ferries d’avoir « dissimulé la vérité », la CGT-Officiers demande notamment pourquoi le CrossMed n’a pas été prévenu et comment le Mega Express Five a pu poursuivre sa route avec un enfoncement de 50 mètres et une voie d’eau jusqu’à son port de destination, effectuant ensuite trois autres traversées supplémentaires avec des milliers de passagers.

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