Le port de Sète (Occitanie) vient de réceptionner une nouvelle pilotine tout électrique. Une première mondiale réalisée par la société Maritime Green Horizon (MGH), lauréat du trophée Port du futur 2018, dans le cadre de son projet Green Pilot.
Propos recueillis par Eugénie Tiger
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Comment est né le projet Green Pilot ?
Jean-Michel Germa : Chez MGH nous venons du secteur de l’énergie renouvelable, éolienne notamment. Au départ, nous avons travaillé sur la problématique du stockage de l’énergie : nous avons notamment breveté un procédé innovant permettant de la stocker en mer. Mais en parallèle de nos recherches, nous avons assisté à un vrai boom des batteries lithium-ion, de plus en plus puissantes et accessibles. Dépassé par le développement de ces batteries, notre procédé de stockage a fini par devenir obsolète. Nous avons donc réorienté notre stratégie en nous concentrant sur un sujet devenu essentiel en ces temps de transition énergétique et environnementale : la décarbonation dans le secteur des transports maritimes. Green Pilot est né de cette réorientation.
Pourquoi avoir commencé par une pilotine ?
La propulsion électrique n’est pas adaptée aux navires hauturiers car leur rayon d’action est trop long. D’où notre intérêt pour les navires de servitude portuaire. Comme nous sommes basés à Montpellier, nous sommes allés à la rencontre des pilotes du port de Sète. Nous avons étudié la manière dont ils utilisent leurs trois pilotines thermiques, notamment la durée des trajets et l’impact des conditions météorologiques. Et nous avons constaté que l’un de ces trois navires pouvait facilement passer au mode de propulsion électrique. Ainsi est née Maguelone, la première pilotine 100 % électrique au monde. Nous avons utilisé une coque existante et remplacé la chaîne thermique par un nouveau moteur entièrement électrique, puis installé une borne de recharge sur le quai.
Quels sont les avantages de cette pilotine électrique ?
Le premier est environnemental, car la pollution est une problématique incontournable pour les ports. Avec son moteur de 200 KW, Maguelone ne consomme pas de carburant fossile et n’émet aucun polluant dans l’atmosphère ou dans l’eau. Elle ouvre des perspectives nouvelles en matière de décarbonation des activités portuaires. Par ailleurs, à vitesse et puissance identiques, ce bateau au moteur silencieux permet une conduite plus souple et confortable. Son rayon d’action est certes limité, car il peut fonctionner environ une heure à pleine puissance (18,5 nœuds), mais les études que nous avons réalisées montrent que les pilotines thermiques n’utilisent jamais toute leur capacité de rayonnement. Si leurs grands réservoirs leur permettent en théorie de naviguer plusieurs jours sans faire le plein, dans les faits leur sorties quotidiennes dépassent rarement les quelques minutes ou quelques heures.
Quelles sont les perspectives de votre projet Green Pilot ?
Aujourd’hui Green Pilot entre en phase de commercialisation. Si cette pilotine a intéressé la station de pilotage de Sète, nous savons qu’elle peut intéresser toutes les autres stations. Pour les accompagner dans ce changement, nous jouons à la fois le rôle de bureau d’études et d’investisseur : en amont, nous évaluons leurs besoins avec précision, en étudiant l’utilisation que les pilotes font de leur navire pour déterminer quels éléments de leur flotte peuvent être propulsés électriquement. Ensuite, nous pouvons également financer l’opération et louer la pilotine à la station pour en réduire le coût. Dès aujourd’hui, la propulsion électrique peut être envisagée pour tous les navires de servitude portuaire à court rayon d’action. En matière de décarbonation des activités portuaires, tout reste encore à faire.
