Dès que la capitulation de la Rochelle, en 1628, eut délivré le cardinal de Richelieu de son principal souci, il résolut de créer sans retard la flotte militaire dont an siège mémorable venait de lui démontrer l’impérieuse nécessité. Mais, pour atteindre ce but, il lui fallait concentrer dans sa main puissante tous les pouvoirs, tous les droits, toutes les attributions des personnages qui présidaient à l’administration des affaires maritimes. À cet égard, Richelieu avait déjà pourvu au plus pressé : en 1626 et 1627, il avait acquis du duc Henri de Montmorency la charge d’amiral de France, supprimé du même coup celle de vice-amiral, et ajouté aux droits dont il héritait ainsi ceux qui appartenaient encore à la couronne sur le littoral maritime du royaume ; enfin, il s’était fait nommer Grand-maître, chef et surintendant général de la navigation et du commerce.
Possédant, dès lors, pour la direction des affaires navales de la France, toute l’autorité qu’il pouvait ambitionner, le cardinal se mit à l’œuvre. Il voulut d’abord connaître l’exacte vérité en ce qui concernait la vaste administration dont la charge venait de s’ajouter à ses autres attributions. Une inspection détaillée, qu’il fit passer sur le littoral de l’Océan et, l’lus tard, sur celui de la Méditerranée par deux fonctionnaires ayant son entière confiance, lui révéla d’étranges choses : partout des ruines, des conflits, des abus de pouvoir, des dénis de justice, et absence totale de protection pour les faibles ; finalement, nos populations maritimes fuyant les ports et les côtes du royaume pour échapper à tant de maux : telle était, au vrai, la situation. Par des ordonnances et des règlements précis, par la réorganisation de la justice et la répression des abus les plus criants, enfin par la création de compagnies jouissant du privilège de commercer avec les échelles du Levant, les Indes, le Sénégal, Madagascar, etc., Richelieu pourvut aux premières nécessités en ce qui regardait la sécurité, les besoins et, par suite l’accroissement si désirable de nos populations maritimes. Il put ensuite consacrer ses soins à cette flotte militaire qui lui tenait tant à cœur. Une commission composée du surintendant des finances, de deux conseillers et d’un secrétaire d’État, se trouvait déjà chargée d’étudier et de résoudre, sous la présidence du grand-maître, les principales questions relatives à la marine. Mais ce fut à des gens du métier, à des marins, que Richelieu confia la tâche d’établir un règlement détaillé pour administration et la discipline de la flotte. Un de ses parents, le commandeur de la Porte, intendant général de la navigation, et le chef d’escadre de Mantin furent les principaux rédacteurs de la très remarquable ordonnance de 1634. Ce nouveau code maritime emprunta une bonne partie de ses dispositions à la législation hollandaise ; complété par d’autres édits que Richelieu fit rendre à diverses époques sur l’organisation des arsenaux, il servit de base aux célèbres ordonnances de Colbert et de Seignelay. Ce fait augmente singulièrement l’intérêt des principales mesures qu’il édictait, concernant l’établissement de notre nouvelle marine.
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