Entreprises, la dernière digue ? (par Francis Valla)

Pour l’avenir de la Terre et de l’humanité, le sauvetage de l’Océan est la mère de toutes les batailles. Les entreprises maritimes françaises le savent très bien, leurs efforts démontrant à l’envi leur participation résolue au combat commun et leur volonté de le faire en « acteurs citoyens ».

Mais elles ont besoin d’être confortées dans leur légitimité, et que soient ménagées les conditions de leur propre survie, ici, maintenant et sur la durée.

Or, malgré leur résilience, un trop grand nombre d’entre elles sont inquiètes, épuisées, désemparées face à la multitude d’incertitudes, tant nationales qu’internationales, auxquelles elles sont confrontées.

Partagées entre la confiance qu’elles ont dans leurs atouts et l’illisibilité de leur De l’autre, les raisons de croire ne manquent pas : Le « maritime », même si ce fut bien long à concrétiser, est aujourd’hui un secteur majeur et incontournable de l’économie nationale. Indubitablement, le Cluster maritime français (CMF) a créé un élan en constituant un formidable outil pour le faire progresser dans les esprits ; malgré tous les obstacles qui pourraient les décourager, nos entreprises maritimes font preuve d’une résistance admirable, et maintiennent le plus possible leur engagement au service de la France ; nos armateurs traditionnels, en particulier familiaux, rejoints récemment par quelques acteurs nordiques, font plus que tirer leur épingle du jeu, à l’instar de nos chantiers navals, naguère soi-disant avenir (situation aggravée par les atermoiements d’un État aboulique), elles sont de plus exaspérées par la pénible « bipolarité », encore et toujours, de notre contexte national.

D’un côté, l’importance du « maritime » est encore largement sous-estimée et malmenée dans le pays : les retards dans la mise en œuvre du concept de Flotte stratégique frisent le ridicule ; le développement de la flotte de commerce sous pavillon national se heurte à un plafond de verre ; les menaces paralysantes sur des régimes fiscaux pourtant en ligne avec la pratique européenne ne sont toujours pas levées ; les acteurs de nos littoraux sont désarmés face à la politique de la chaise vide menée par l’État (lire l’interview du président de l’A.N.E.L page 60 de M&O 288) ; le brouillard de l’instabilité politique empêche toute lisibilité, présente ou future, du cadre et des règles d’action (l’État infirmant nombre de ses engagements, ne respectant plus aucun délai, repoussant les choix stratégiques indispensables aux professionnels dans absolument tous les domaines, y compris celui des énergies marines renouvelables (lire page 42 de M&O 288)… Le tout dans un contexte international chaotique avec un Donald Trump prêt à taxer les acteurs qui respecteraient les futures normes de l’OMI… face à une Europe tétanisée courbant l’échine dans le Bureau Ovale ou sur les parcours de golf du magnat, incarnant ainsi la maladie du multilatéralisme, encore illustrée en août dernier par les négociations de Genève sur le plastique (lire article page 10 de M&O 288). Et ce au moment même où le maritime a un besoin vital de règles universelles.

condamnés, ou de nos pêcheurs confrontés à une adversité composite qui les use. Tous sont un peu à l’image de notre Marine nationale dont le remarquable taux d’emploi de la flotte est le meilleur du monde, approchant les 80 %…Tous, comme elle, ne cessent de repousser les limites du possible.

Mais pour que nos entreprises maintiennent cet effort, il faut que cesse ce grand écart schizophrénique. Il faut que l’État donne enfin aux professionnels, au premier rang desquels les acteurs du maritime tournés vers le grand large, le cadre STABLE qu’ils méritent. On peut en douter, mais c’est encore faisable.

Comme l’écrivait Victor Hugo : « Si étrange, que semble le moment présent, quelque mauvaise apparence qu’il ait, il ne faut pas désespérer… Les surfaces sont ce qu’elles sont, les courants sous-marins existent. Pendant que le flot s’agite, eux, ils travaillent. On ne les voit pas, mais l’inaperçu construit l’imprévu… ».

N’excluons donc pas que certains responsables politiques, à la sortie du tunnel actuel, évoluent en véritables hommes d’État et qu’ils prennent alors pleinement conscience du rôle stratégique du maritime, vecteur de puissance, de prospérité, et même, sous notre pavillon, de qualité sociale.

Et nous, gens de mer et d’outre-mer, échangeons sans attendre, unissons-nous plus que jamais pour nous imposer et les convaincre que les entreprises sont à la fois l’avant-garde et le dernier rempart de la France maritime !

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