Les derniers cow-boys ! Présentation et carnet de voyage du convoi terrestre (SPoT) qui approvisionne la station Amundsen-Scott.

Les cow-boys, les « wranglers » (gardiens de troupeaux), guidaient et protégeaient le bétail du point d’élevage au point de vente, d’une zone de pâturage à une autre. Les douze cow-boys de SPoT (pour South Pole Overland Traverse. En français : Convoi terrestre vers le Pôle Sud), guident, tractent et prennent soin de nos approvisionnements : des centaines de milliers de litres de carburant, 16 motoneiges neuves et deux chargeurs à roues Caterpillar. En presque un mois, ce convoi logistique, qui suit à peu près la route de l’explorateur Scott de 1911-1912, traverse la mer gelée de Ross, monte sur le plateau polaire, affronte le « Sastrugi National Park », cette plaine immense faite de vagues de glace sculptées par le vent, et finalement déroule vers le Pôle Sud et notre station. 

Douze hommes, chacun sur son tracteur, tirent derrière eux le traîneau salle commune et cuisine, le traîneau logement/couchage (avec deux WC incinérateurs qui brûlent les déjections au lieu de les noyer : c’est une sorte d’incinérateur rapide doté d’une petite cheminée extérieure qui évacue la chaleur et quelques cendres à chaque usage), le traîneau atelier, le traîneau station électrique, cinq « magic carpets » transportant des citernes souples de carburant (160 000 litres). Ce sont des tapis épais tractés derrière un tracteur, sur lesquels sont disposées diverses charges. Il y en a un pour transporter les deux chargeurs Caterpillar à roues et deux pour les 16 motoneiges neuves. Les journées de ces douze hommes qui assurent ce convoi logistique vers le Pôle Sud et notre station sont réglées comme du papier à musique : réveil matinal, petit-déjeuner et départ. Une pause au déjeuner et arrêt final en fin de journée pour remise en condition du matériel, repas et une nuit de repos. Mais ça, c’est la théorie sur le papier… sans l’Antarctique, le blizzard, le brouillard, le froid ou la chaleur (oui, la chaleur), les ennuis mécaniques, les problèmes de chargement, les « sastrugis », les « gremlins » divers.

Pour ce premier voyage de la saison long de 1 600 kilomètres, qui servait aussi à valider les nouveaux traîneaux d’habitation et le groupe électrogène, le drame a été évité de peu. La première tempête a bouché toutes les tuyauteries d’aération des baraques sur skis. Au milieu de la nuit, l’alarme CO₂ les a tous réveillés… avec seulement 19 % d’oxygène restant dans leurs chambres. Le tueur silencieux, le gaz carbonique, a été vaincu par un simple système d’alarme, et nos douze aventuriers ont échappé de peu à la mort. Après avoir passé le reste de la nuit à réouvrir les aérations à l’aide de bambous de tailles diverses, il a fallu réinventer la ventilation des préfabriqués. Ceux-ci avaient été élaborés et construits trop loin de leur lieu d’utilisation pour résister à tout ce que le continent le plus aride, le plus froid et le plus venteux du monde avait à leur infliger. Il faudra certainement encore quelques traversées pour que tout soit finalement mis au point. 

Avec d’autres, je me suis porté volontaire « to walk the line ». Rien à voir avec le chanteur Johnny Cash. Il s’agit de suivre le tuyau de transfert du carburant emporté au Pôle Sud par le convoi SPoT. Le trajet nous mène entre les deux stations de pompage. La tuyauterie passe sous la station élevée, descend dans le « Beer can », la cage d’escalier géante qui orne un côté de la station. Puis c’est le tunnel, sous la glace dans toute sa longueur, vers les « arches », les hangars sous la glace. De là, on suit le côté gauche de l’arche de stockage de la nourriture jusqu’à l’entrée de la soute à carburant sous la glace. On cherche les fuites, toutes les heures. En deux jours, nous aurons pompé 102 000 gallons de fuel. Il en faut 300 000 pour passer l’hiver. Mais SPoT va revenir et on aura le quota ! 

Ci-dessous, la traduction, par Copilot AI, le journal de bord du convoi et de quelques moments clés de leur périple tels qu’Andy, le chef du détachement, les a décrits dans son rapport de situation quotidien. La version originale est rédigée dans un style très riche, avec un sens de l’humour qui neutralise le drame, une touche de stoïcisme, un peu d’histoire, le tout enveloppé d’humilité face aux éléments et aux défis quotidiens. J’espère que la version française restera proche de l’original ! 

 

Journal de bord du convoi logistique de la station Amundsen-Scott

Plongez-y, on en apprend énormément sur l’Antarctique. Ce journal de bord exceptionnel court du 19 novembre dernier au 2 décembre. Bonne lecture ! Éric Chevreuil

 


Date : 19/11/25

Heure : 20:47

Nombre dans le groupe : 12

Altitude : 559 mètres

Température : –11,2 °C (prise tard dans la soirée)

Vent : 2 nœuds

Distance parcourue aujourd’hui : 37 km

Distance restante : 562 km

Vitesse moyenne : 8,9 km/h

Intentions : Rester au sec, monter et aller vers le sud

Messages : Aujourd’hui, nous avons passé la première moitié de la journée à vérifier une seconde fois l’intégrité structurelle de nos nouveaux bâtiments (bilan de santé impeccable). Nous avons également, une fois de plus, lutté contre notre fondeuse à neige en surchauffe, ressoudé les nombreux supports cassés ou en train de se briser des chenilles de notre véhicule radar, et sécurisé les parties les plus vulnérables de nos charges de carburant en préparation des montées à venir. Nous avons déjeuné, laissé notre vaisselle non lavée s’empiler dans l’évier, sellé nos engins et repris la piste pour tirer les dernières heures de conduite de la journée. En avant donc ! 


Date : 20/11/25
Heure :
21:37
Nombre dans le groupe : 12
Altitude : 1 523 mètres
Température : –14,7 °C
Vent : 18 nœuds (≈ 33 km/h)
Distance parcourue aujourd’hui : 66 km
Distance restante : 496 km
Vitesse moyenne : 10,1 km/h
Intentions : Gravir la colline avant que la tempête à l’horizon ne nous atteigne

Messages :
Alors que SPoT-1 atteint la terre, nous tournons nos visages directement vers le continent et entrons dans la vallée du glacier Leverett. La calotte glaciaire que nous surfions s’est solidement ancrée contre le plateau continental et se soulève en longues dunes de glace ondulantes. En entrant dans les montagnes, il y a un massif sur notre flanc gauche qui, à première vue, me fait toujours penser à une gigantesque créature marine surgissant à la surface. Il est facile d’imaginer une nageoire dorsale ou caudale juste hors de vue. Eh bien, chaque navire a besoin de sa baleine blanche…Dans l’ensemble, cependant, la vue de la traversée sous la ligne d’horizon reste à peu près la même. Ce qui se trouve en dessous ressemble à de la neige. De la neige, des plaques de glace bleue de plus en plus fréquentes, et l’apparition soudaine de collines ondulantes contre lesquelles nous devons lutter. Mais nous n’aurions pas pu rêver d’une plus belle journée pour le faire. C’est un vrai plaisir d’admirer le magnifique paysage dans ce qui est si souvent un corridor venteux et neigeux.


Date : 22/11/25
Heure :
16:22
Nombre dans le groupe : 12
Altitude : 2 522 mètres
Température : –18,3 °C
Vent : 21 nœuds (≈ 39 km/h)
Distance parcourue aujourd’hui : 1,6 km
Distance restante : 457 km
Vitesse moyenne : 1,6 km/h
Intentions : Avancer

Messages :
Tout ce que nous avons pu faire aujourd’hui a été de déplacer notre camp et nos charges d’un seul kilomètre. Nous nous sommes réveillés ce matin sous de fortes chutes de neige et un vent soufflant, réduisant la visibilité dans le camp à environ 5–6 mètres, ce qui nous a cloués sur place pendant plusieurs heures en attendant une amélioration des conditions. Vers l’heure du déjeuner, nous pouvions voir suffisamment pour déplacer le camp et toutes nos charges hors des congères accumulées, puis nous nous sommes abrités pour le reste de la journée. Nous garderons un œil attentif sur les fenêtres météo qui pourraient nous permettre de voyager, bien que les prévisions pour les deux prochains jours semblent identiques.  Mot du jour : Chionophobie. Nom. La peur intense et irrationnelle de la neige.


Date : 23/11/25
Heure : 21:55
Nombre dans le groupe : 12
Altitude : 2 485 mètres
Température : –19 °C
Vent : 16,6 nœuds (≈ 30,7 km/h)
Distance parcourue aujourd’hui : 45 km
Distance restante : 412 km
Vitesse moyenne : 4,8 km/h
Intentions : Numéro chanceux 4,9 ? Est-ce trop demander ?

Messages :
La journée a commencé avec 91 cm (3 feet) de neige fraîche et légère sur nos plateformes de bâtiments et une alarme de monoxyde de carbone hurlant à 03:30 du matin. 19% d’oxygène dans les chambres. Le chiffre chanceux du jour devait être 3. Il semblerait que les abondantes chutes de neige de la veille et de la nuit aient gelé à la fois les conduits d’entrée et de sortie d’air de notre module d’hébergement pendant que nous dormions, et que tous les dormeurs à la respiration lourde aient fait le reste. Eh bien, nous ne dormions plus. Le conduit d’entrée d’air forcé est assez simple à atteindre, mais la sortie se trouve facilement à 3,7 mètres du sol. Heureusement, avec l’aide d’un drapeau de camp en bambou de 2,7 mètres de long, même un petit camarade aux yeux encore embrumés sous sa coiffe de nuit pouvait asséner quelques coups solides depuis le sol, et faire tomber la croûte glacée. À partir de là, la manœuvre classique de la pelle comme cale de porte, a laissé entrer la brise et a rafraîchi l’endroit. (Vraiment, quel propriétaire n’a pas connu ça ?)

À ce moment-là, la moitié de l’équipe semblait prête à déclarer la nuit terminée et s’est dirigée vers la cuisine pour un café matinal. L’autre moitié s’est traînée dans ses chambres pour tenter une dernière heure de sommeil. Bientôt, nous étions tous de nouveau éveillés et occupés à dégager le fondeur de neige, qui avait réussi à être simultanément gelé et en surchauffe. Nous extirper d’un camp à moitié enseveli dans une combinaison de neige légère et de vent fort fut un défi modéré, mais nous avons réglé cela et nous nous sommes mis à glisser et patiner, a chercher de l’adhérence. Pas trop de mal. Hélas, pas très fonctionnel non plus, puisque 3 de nos charges nécessitaient presque simultanément une assistance de remorquage.

Avec quelques réarrangements créatifs des traineaux, nous avons fini par trouver une routine qui nous a permis de tituber le long de cette route enneigée. Et enfin, nous avancions – à, oui, a une vitesse moyenne de 4,8 km/h.


Date : 25/11/25
Heure : 20:33
Nombre dans le groupe : 12
Altitude : 2 549 mètres
Température : –17,8 °C
Vent : 14 nœuds (≈ 25,9 km/h)
Distance parcourue aujourd’hui : 27 km
Distance restante : 335 km
Vitesse moyenne : 4,5 km/h
Intentions : Des kilomètres de sourires. Des sourires crispés si nécessaire, mais des sourires.

Messages :
Un sastrugi, sous un autre nom, serait probablement une autre forme de glace.

Un sastrugi est une sorte de ventifact neigeux. C’est-à-dire une ondulation étonnamment dure de neige sculptée par des vents implacables en quelque chose qui ressemble à une illustration de Tim Burton représentant une vague déferlante. Ce champ de sastrugi particulier – d’environ 209 km de large – ressemble, au premier coup d’œil, à un océan houleux soudainement figé. Sous la bonne lumière, les formations de vagues prennent de magnifiques teintes argentées et blanches et, lors d’une mauvaise année, peuvent mesurer près de 1,8 mètre du creux au sommet. L’état du Parc cette année, je suis très, très heureux de le rapporter, est un misérable ordinaire, banal, classique. Les vagues brise-dos que nous rencontrons mesurent en moyenne seulement 91 cm de haut, bien qu’elles soient aussi nombreuses que jamais et tout aussi « amusantes ». Tracer une nouvelle route à travers des sastrugi n’est, je pense, pas une expérience que la plupart des gens sont susceptibles d’oublier.


Date : 26/11/25
Heure : 21:31
Nombre dans le groupe : 12
Altitude : 2 661 mètres
Température : –22 °C
Vent : 13,8 nœuds (≈ 25,6 km/h)
Distance parcourue aujourd’hui : 32 km
Distance restante : 303 km
Vitesse moyenne : 6,4 km/h
Intentions : Nous en rirons tous un jour – une fois les larmes séchées

Messages :
La première tâche de ce beau mercredi dans le pays de la neige en colère fut de terminer les quelques travaux mécaniques nocturnes de la veille. Tout le monde était mobilisé et nous n’avons pris la route qu’environ 40 minutes plus tard que d’habitude.

Comme le terrain est resté hostile tout au long de la journée, le déroulé fut largement dicté par la météo. Ce qui avait commencé par une bonne lumière du jour permettant de voir les nombreux obstacles à mesure qu’ils s’approchaient s’est progressivement transformé en une soupe blanche et uniforme d’un ciel couvert sans relief. La différence entre les deux peut se décrire comme la différence entre conduire une vieille voiture sur une route de campagne pleine de nids-de-poule et faire s’écraser un petit avion dans un champ de maïs. Ni l’un ni l’autre n’est agréable, mais l’un est pire.

Le grand moment d’excitation aujourd’hui est arrivé dans l’après-midi, lorsque Brenden a vu une poche de carburant trainée par Josiah rompre sa sangle avant sur un morceau de glace tranchant et rouler hors de la plaque sur laquelle elle reposait. Grâce à l’alerte rapide et à l’arrêt immédiat, aucun dommage n’a été causé et nous avons pu transférer en toute sécurité 5 300 litres de carburant hors de cette poche jusqu’à ce que nous puissions la remettre sur son support, où elle a été sanglée de nouveau. Toute la bataille a duré environ 2 heures, avec la participation de tous ceux qui étaient à proximité. Et puis nous sommes repartis.

Et puis nous nous sommes arrêtés de nouveau. Presque immédiatement, l’un après l’autre, 4 tracteurs ont glissé et se sont retrouvés coincés sur de la glace dure. Le dîner fut une pile de pizzas et un accompagnement de raviolis.


Date : 28/11/25
Heure : 20:21
Nombre dans le groupe : 12
Altitude : 2 885 mètres
Température : –24,7 °C
Vent : 10 nœuds (≈ 18,5 km/h)
Distance parcourue aujourd’hui : 48 km
Distance restante : 230 km
Vitesse moyenne : 6,8 km/h
Intentions : Essayer de découvrir des choses plus agréables que de rouler sur des sastrugi frais.

Messages :
Il existe beaucoup de choses dans ce monde qui sont pires que de rouler sur des sastrugi frais. L’une d’elles est de devoir regarder quelqu’un d’autre rouler sur des sastrugi frais tout en remorquant quelque chose auquel vous tenez. Même si ce n’est que pour aller déjeuner. Juste une pensée au hasard.

Un des contributeurs à tout le « plaisir » d’hier fut la poussée de croissance des sastrugi au milieu du Parc. Éparpillés dans ce paysage dur comme de la meringue se trouvaient une série de sastrugi plus grands que moi. Certes, moins nombreux que ceux que nous avons vus ici l’an dernier, mais grands tout de même. Aujourd’hui, les petites excroissances neigeuses pointues ont rétréci jusqu’à une moyenne beaucoup plus gérable de 60 à 90 cm. De plus, nous avons voyagé toute la journée avec assez de lumière pour enfin être capables de différencier une dénivellation de 1,2 m d’un bloc de 1,2 m au milieu de la route. Ainsi, nous avons pu accélérer la vitesse du Petit Convoi qui Pouvait jusqu’à un tonitruant 6,8 km/h. On aurait dit que nous fuyions la scène d’un braquage de banque, à nous voir passer.

Mais il semblerait que nous ayons oublié qu’il est formellement interdit de sourire les cheveux au vent à l’intérieur des limites du Parc. Le prix de notre transgression fut de découvrir que notre robinet de cuisine s’était ouvert en roulant et avait déversé presque toute notre eau potable durement pelletée sur la route juste avant le déjeuner. Ensemble, nous avons prié pour que notre dette karmique soit entièrement réglée et avons cessé ces maudits sourires.

SPoT-1 : en avant, sombrement, vers le sud. Probablement. (C’est peut-être encore l’est ?)


Date : 29/11/25
Heure : 21:10
Nombre dans le groupe : 12
Altitude : 2 949 mètres
Température : –27,9 °C
Vent : 4,2 nœuds (≈ 7,8 km/h)
Distance parcourue aujourd’hui : 76 km
Distance restante : 154 km
Vitesse moyenne : 9,3 km/h
Intentions :

  1. Sortir de la poêle ; chercher un changement de décor.
  2. Passer deux jours de suite sans se battre avec le fondeur de neige.

Messages :
Chaque fois que le convoi SPoT-1 se prépare à partir, nous commençons par un appel radio où chaque conducteur de tracteur s’identifie à son tour comme présent et prêt à bouger. Chaque jour de plus sur la piste, nos appels radio ressemblent de plus en plus à la programmation d’un festival de rock. Parmi d’autres, nous avons désormais : Discovery and the Loaders, Big Dog Woof Woof, et simplement : Jeison. Pathfinder, alias Prinoth, alias 350, joue généralement le rôle de maître de cérémonie, invitant les « groupes » à se présenter – puis c’est parti pour la course.

En franchissant les 2 957 m, nous faisons nos adieux au Sastrugi National Park dans le rétroviseur et entamons la descente de 161 km vers le pôle. La montée balayée par les vents qui façonnent la topographie du Parc est remplacée, de ce côté de la « colline », par des conditions favorisant l’accumulation d’une neige profonde, douce et exceptionnellement sèche. Chaque pas en avant nous enfonce davantage dans un marécage neigeux si profond qu’il peut sembler presque sans fond. Ici, un tracteur qui glisse peut s’enterrer jusqu’au carter inférieur dans une neige semblable à du sucre glace, plus vite qu’il ne faut pour réaliser ce qui vous arrive. Nous avons déjà vu des tracteurs être remorqués par d’autres tracteurs, eux-mêmes remorqués par un autre, avec encore un quatrième en tête ; enfilés comme un chapelet brisé, chacun essayant de désensevelir le malheureux planté derrière lui. Jusqu’à présent, cette année, nous avons franchi cette zone de marécage sans encombres. Nous garderons nos doigts croisés et nos porte-bonheurs sur le tableau de bord en avançant.

Quelque part tout au bout de cela, m’a-t-on dit, se trouve un puissant magicien appelé Oz. Merveilleux. Mais quel étrange endroit pour vouloir y vivre.


Date : 02/12/25
Heure : 19h46
Nombre de personnes : 12
Station : Amundsen-Scott South Pole Station
Altitude : 9 339 pieds
Température : -17 °F
Vent : 8,9 nœuds
Distance parcourue aujourd’hui : 23 miles
Miles restants : 0 mile
Vitesse moyenne : 6 mph
Intentions : Pourquoi ne pas rester un peu 

Messages :

Une lourde brume s’est installée autour de l’axe sud du monde aujourd’hui. Nous nous sommes garés en formation serrée, à 6 miles du Pôle Sud, pour un déjeuner anticipé près du Bord de la Terre Plate. Nous avons rangé un peu la maison, commencé à préparer nos affaires pour l’arrivée, et avons été assez surpris lorsqu’un motoneigiste solitaire est sorti du brouillard et s’est matérialisé sur notre pas de porte.

En suivant ses traces vers la station, absolument rien devant ni de chaque côté de notre colonne n’était visible. À part la petite file déchiquetée de tracteurs derrière nous, le monde entier disparaissait dans un brouillard silencieux, là où normalement la silhouette des télescopes périphériques et le long mégalithe trapu de la station définiraient le paysage.

Une voix à la radio demande si nous nous sommes trompés de chemin.

Et, tout à coup, la voilà. Soudain nous sommes dans le même cercle de visibilité : SPoT-1 et notre destination tant attendue, la station Amundsen-Scott du Pôle Sud. Un bulldozer étonnamment agile surgit devant nous et guide notre route. Nous suivons la piste d’atterrissage des avions à skis, presque jusqu’au secteur sombre au nom intimidant (Dark Sector), puis nous traversons l’aire de stationnement des avions des ONG (organisations non gouvernementales/ touristes) , et arrivons sur une plate-forme oblongue, en forme d’œuf, de neige compactée où nous établissons notre camp temporaire. C’est ici, directement à côté du marqueur cérémoniel du Pôle Sud, de rouge et de blanc rayé, que nous garons notre convoi cette semaine, pendant le déchargement du carburant et du fret qui ont parcouru plus de mille miles à travers l’Antarctique intérieur pour arriver jusqu’ici.

SPoT-1 n’a plus de sud où aller.

Marine & Oceans
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La revue trimestrielle MARINE & OCÉANS est éditée par la "Société Nouvelle des Éditions Marine et Océans". Elle a pour objectif de sensibiliser le grand public aux principaux enjeux géopolitiques, économiques et environnementaux des mers et des océans. Informer et expliquer sont les maîtres mots des contenus proposés destinés à favoriser la compréhension d’un milieu fragile.   Même si plus de 90% des échanges se font par voies maritimes, les mers et les océans ne sont pas dédiés qu'aux échanges. Les ressources qu'ils recèlent sont à l'origine de nouvelles ambitions et, peut-être demain, de nouvelles confrontations.

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