Cet ancien commandant de la frégate furtive La Fayette avait été jugé en janvier 2014 par le tribunal correctionnel de Marseille à la suite du suicide de son maître d’hôtel, le second-maître Sébastien Wanké, 32 ans, retrouvé pendu le 15 juin 2010 dans un local à l’avant du bateau au retour d’une mission de trois mois contre la piraterie dans l’océan Indien.
Quelque 70 témoins avaient évoqué l’ambiance exécrable que faisait régner Eric Delepoulle à bord, un « pacha », note la cour d’appel dans son arrêt consulté par l’AFP, qui « n’a pas su acquérir la confiance de ses subordonnés », « un homme rigide et froid exerçant son autorité avec une rigueur dépourvue de compréhension ».
La cour note que l’équipage avait refusé de « passer la ligne », une manifestation classiquement organisée lors du passage de l’équateur, et de participer au repas des familles lors du retour à Toulon.
Parmi les témoins entendus durant l’enquête, un ancien capitaine d’armes du Lafayette avait baptisé le vaisseau « bateau de l’enfer ». Le plus exposé aux exigences du commandant, Sébastien Wanké, n’avait pas supporté les très grandes amplitudes de travail et la pression continue d’Eric Delepoulle, qui « exigeait, en mer, une hôtellerie de luxe », avait observé l’avocate générale dans son réquisitoire lors de l’audience du 18 avril.
Le jeune maître d’hôtel avait perdu dix kilos en quelques mois et s’était ouvert à trois personnes au moins de son intention de mettre fin à ses jours.
Sa notation calamiteuse, une semaine avant son suicide, aurait été le coup de grâce. « Les faits reprochés sont graves, note la cour d’appel, puisqu’ils ont conduit au suicide d’un homme et au mal-être d’un autre, caractérisé par un psoriasis ».
Eric Delepoulle est également condamné pour harcèlement moral d’un autre marin du Lafayette, un chef de cuisine qui a démissionné de l’armée après dix-sept années de service.
Le 18 avril, face à la cour, Eric Delepoulle, 45 ans, aujourd’hui en poste à l’état-major des armées, avait convenu être exigeant mais, expliquait-il, « je me devais cette exigence pour la sécurité des marins. J’aurais dû revenir avec l’ensemble des marins qui m’étaient confiés mais je n’ai pas abusé de ma fonction et je n’ai pas harcelé Sébastien Wanké ».
Un pourvoi en cassation a été déposé par la défense de M. Delepoulle.
« Nous ne partageons pas l’analyse de la cour d’appel », a affirmé Louis-Romain Riché, un des avocats du capitaine, qui a plaidé sa relaxe. « Des éléments juridiques qui n’ont pas été pris en compte vont être débattus en par la Cour de cassation ». ll/apo/cr/bir/sd