Le phénomène avait déjà été dénoncé il y a quelques années par des ONG, mais semble avoir perduré: Greenpeace, notamment, avait fait campagne contre ces « dispositifs de concentration de poissons », radeaux flottants munis de petites cavités attirant les poissons qui viennent s’y réfugier, avant que les thoniers ne jettent leur filet à la mer pour capturer ces thons, albacore ou listao en tête.
Une pratique d’autant plus dangereuse pour la pérennité de la ressource que ces dispositifs qui voguent au large des Seychelles, attirent massivement des poissons encore juvéniles et n’ayant donc pas eu le loisir de se reproduire.
L’équipe s’est rendue notamment dans les cales d’un navire-usine travaillant pour la société Petit Navire: la journaliste auteure du sujet constate que les poissons mesurent pour beaucoup 45 à 50 centimètres de long, contre un mètre à maturité.
Contacté par l’AFP, Petit Navire n’était pas joignable dans l’immédiat.
S’il affirme dans l’émission que la profession s’est « auto-limitée », Yon Riva, président d’Orthongel, qui représente les principaux armateurs de thoniers tropicaux, reconnaît qu’il y a « trop de DCP utilisés ».
« On diminue la capacité de reproduction de l’espèce, c’est une vérité, elle est scientifique, elle est établie », ajoute-t-il.
Une observation « générale », selon Hubert Carré, directeur du comité national des pêches maritimes et des élevages marins (CNPMEM), interrogé par l’AFP.
« Depuis 2012, la flottille française s’est auto-limitée en matière de DCP, aux alentours de 200 DCP par navire » et s’est en outre équipée de DCP conçus « pour éviter les captures accidentelles de requins et de tortues », affirme M. Carré.
Selon un bon connaisseur du secteur interrogé par l’AFP, ce phénomène de surpêche est surtout à imputer à des pays comme l’Espagne, qui ont accru leur effort de pêche ces dernières années et comptent aujourd’hui jusqu’à 1.000 DCP par navire.
En outre, selon un chercheur qui intervient dans l’enquête, Alain Fonteneau, des dizaines de milliers de ces radeaux dérivent dans l’océan indien, créant un problème de pollution majeur, susceptible d’avoir un impact sur les récifs coralliens.
« En termes de consommation, c’est le poisson le plus mangé en France », a déclaré lors de la présentation de cette enquête, son auteure, Sophie Le Gall. Selon elle, les derniers chiffres s’élèvent à 69.000 tonnes de thon en conserve consommés dans l’Hexagone en 2017.
L’émission pointe également du doigt le fléchage des fonds européens, dont une partie profite d’avantage aux gros thoniers européens alors qu’ils sont censés soutenir la pêche locale artisanale.