« Pour la première fois au monde, nous avons, via notre stratégie d’écoute passive (…) mesuré les comportements naturels de plusieurs individus en plongées coordonnées », indique le rapport de cette mission, conduite par le bioacousticien Hervé Glotin, de l’Université de Toulon (sud-est de la France), grâce aux drones marins Sphyrna de la société Sea Proven.
Deux « laboratoires autonomes » pilotés à distance ont recueilli dans les fonds marins des enregistrements sonores et des échantillons d’ADN environnemental.
C’est grâce à ces écoutes que les chercheurs ont découvert un phénomène étrange : la chasse « collaborative » du cachalot, par groupes matriarcaux de six individus en moyenne.
Sphyrna Odyssey a pu montrer que « les cachalots sont la plupart du temps en opposition dans leurs phases de plongée ou de remontée. Un cachalot peut très bien plonger seul tandis qu’un autre en profitera pour remonter à la surface pour respirer », ce qui démontre « un comportement de cohésion et intelligent ».
« Les individus effectuent une véritable chorégraphie et utilisent une technique de relais maîtrisée à la manière d’une compétition sportive, afin d’optimiser l’utilisation et la gestion des ressources au sein du groupe », écrivent encore les chercheurs.
Une gestion indispensable à la survie de l’espèce : le cachalot doit ingérer une demi-tonne de proies par jour pour survivre. Cet animal marin, qui est l’un des plus grands prédateurs au monde, se nourrit principalement de calmars,
« Le cachalot est un athlète », explique à l’AFP le professeur Glotin, « il plonge pour manger dans des eaux glacées (jusqu’à 1.200 mètres de profondeur), en apnée pendant une heure, sa chasse doit donc être efficace ».
L’espèce, classée « en danger » d’extinction par l’UICN (Union internationale pour la conservation de la nature), fait face à de nombreuses menaces : les collisions, mais aussi la pollution marine, qui diminue son espérance de vie et son taux de reproduction.
Le trafic maritime intense en Méditerranée vient aussi perturber l’alimentation des mammifères marins, qui se reposent sur leur sens acoustique pour se déplacer, chasser, et socialiser.
Le Pr Glotin avance l’hypothèse que la chasse collaborative pourrait « répondre à la pression du bruit environnant ». « Ils ont sûrement toujours eu cette attitude mais aujourd’hui elle est vitale, en tous cas pour chasser près de nos côtes », estime-t-il.