L’enquête, menée depuis quatre ans par les douanes de Bordeaux et l’Office central de lutte contre les atteintes à l’environnement et à la santé publique (Oclaesp), a permis la mise en examen d’une dizaine de personnes en France et en Espagne, indique la gendarmerie nationale dans un communiqué.
Les enquêteurs ont tiré le fil de deux saisies réalisées en 2017 par les douaniers d’Arcachon (Gironde) et de Roissy de 792 kg et 200 kg de civelles – appelées « pibales » dans le sud-ouest – de contrebande, une espèce dont la population européenne a chuté de 75% en 30 ans et considérée comme menacée depuis les années 2000.
La marchandise était destinée à être exportée illégalement vers la Chine et la Thaïlande, où les civelles se vendent entre 3.000 et 4.000 euros le kg au marché noir, soit jusqu’à dix fois plus cher que le prix de vente en Europe.
Les douanes judiciaires de Bordeaux établissent qu’un même réseau de trafiquants se cache derrière ces deux saisies et joignent leurs investigations à celles de l’Oclaesp et la brigade nautique de Saintes (Charentes Maritime) qui travaillent également sur ce trafic.
Le groupe d’enquête découvre que les civelles récoltées par des mareyeurs français sont transportées en Espagne puis « acheminées vers les pays d’Asie fortement demandeurs de ce produit, via, notamment, des plateformes logistiques installées dans des pays de l’Est (Roumanie, Bulgarie, Pologne) », détaille la gendarmerie.
« La coopération policière au plan européen, via Europol, (a été) déterminante pour appréhender ce trafic d’ampleur internationale », souligne le communiqué.
Au total, les enquêteurs ont estimé à 46 tonnes la quantité de civelles exportées illégalement, avec une marchandise masquée « par l’utilisation de faux documents supposant l’envoi d’autres espèces (crevettes, congres, carpes,…) ».
Ce juteux trafic, surnommé « l’or blanc », a permis au réseau de blanchir 18,5 millions d’euros selon l’enquête, qui a démontré « l’utilisation de sociétés écrans créées en Europe et dans des paradis fiscaux (Irlande, Panama), la complicité de sociétés implantées en Chine et en Thaïlande et le recours à des rétro-commissions par des contrats sur opérations entre l’Afrique et l’Asie ».
Neuf mareyeurs et intermédiaires français ont été mis en examen en septembre 2019 puis, cette année, les gérants espagnols d’une société de transport ainsi que l’une des têtes du réseau, également espagnol.