Des deux côtés de la Manche, les dirigeants ont adopté un ton plus conciliant depuis lundi en marge de la COP26 à Glasgow (Ecosse), tandis que les négociations s’accéléraient, mais Paris n’en attend pas moins d’ici mercredi une réponse à ses dernières propositions, selon l’Elysée.
Selon une source européenne à Bruxelles, les zones de pêche dans les eaux territoriales, l’île de Jersey ou encore les navires dits de remplacement, c’est-à-dire les nouveaux navires mis à l’eau en remplacement de navires anciens, sont à l’ordre du jour des discussions mais il n’y aura pas d’annonce avant mercredi.
« Nous attendons l’organisation demain d’une réunion conclusive sous la présidence de la Commission – c’est son rôle – sur les navires remplaçants », a déclaré la ministre de la Mer Annick Girardin mardi lors de la séance de questions au gouvernement à l’Assemblée nationale.
« Nous attendons aussi que Jersey accepte de considérer la liste des treize navires que la France souhaite voir obtenir très rapidement » des licences, a-t-elle ajouté.
Pour « donner une chance » aux discussions, la France a repoussé l’entrée en vigueur de mesures de rétorsion décidées contre le Royaume-Uni à « au moins jeudi », date prévue d’une réunion à Paris entre le secrétaire d’Etat britannique chargé du Brexit David Frost et le secrétaire d’État français aux Affaires européennes Clément Beaune.
Le gouvernement britannique a salué ce report, se félicitant « que la France reconnaisse que des discussions approfondies sont nécessaires pour résoudre l’ensemble des difficultés de la relation entre le Royaume-Uni et l’UE ».
En vertu de l’accord du Brexit, les pêcheurs européens peuvent continuer à travailler dans certaines eaux britanniques à condition de pouvoir prouver qu’ils y pêchaient auparavant. Mais Français et Britanniques se disputent sur la nature et l’ampleur des justificatifs à fournir.
– « On est en panne » –
Les Français prévoient notamment d’interdire aux navires de pêche britanniques de débarquer leurs cargaisons dans les ports français et de renforcer les contrôles des bateaux et des camions si Londres n’accorde pas davantage de licences aux pêcheurs français.
Avant même l’expiration de l’ultimatum, les autorités françaises ont dérouté la semaine dernière vers le Havre (nord-ouest) un chalutier britannique soupçonné d’avoir pêché sans licence. Son sort doit être fixé par la justice mercredi.
Le capitaine du chalutier, Jondy Ward, « m’a dit au téléphone hier que l’équipage pouvait maintenant quitter le bateau » avec des « restrictions de mouvements », a indiqué mardi l’élu local Michael Cholm MacGiolla Easbuig au micro de la Highland Radio de Donegal en Irlande d’où est originaire le capitaine.
Après les annonces de sanctions françaises, Londres a menacé de recourir au mécanisme de règlement des différends dans le cadre de l’accord commercial post-Brexit pour demander des « mesures compensatoires » et de renforcer les contrôles des bateaux de pêche européens.
Dans les ports français, les pêcheurs dénoncent des contrôles déjà très réguliers et une attitude « inadmissible » du Royaume-Uni.
Environ un quart des prises françaises en volume (environ 20% en valeur) proviennent des eaux britanniques, très poissonneuses et qui sont à l’origine de 650 millions d’euros de ventes annuelles pour les pêcheurs européens.
Pris entre deux feux, le ministre des Affaires intérieures de l’île anglo-normande de Jersey, Grégory Guida, a dénoncé mardi sur FranceInfo des retards dans la réception des documents permettant d’octroyer des licences. La semaine dernière, l’île a octroyé 49 licences temporaires, le temps pour les pêcheurs français de compléter leur dossier.
Ce dossier de la pêche envenime les relations entre Paris et Londres, déjà mises à mal par le torpillage d’un contrat franco-australien de sous-marins en faveur de l’accord de défense entre Grande-Bretagne, Etats-Unis et Australie.
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