Les fonds marins généreux regorgent des crevettes et maquereaux qui composent traditionnellement les currys, la base de la nourriture quotidienne au Sri Lanka.
Mais avec la crise, il n’y a plus assez d’essence pour aller pêcher. Un phénomène qui se répercute directement sur les besoins alimentaires du pays.
« Les bons jours, il faut commencer à faire la queue dès 05H00 du matin pour espérer avoir de l’essence à 15H00 », explique à l’AFP Arulanandan, un pêcheur chevronné.
« Mais certains attendent pour rien, quand c’est leur tour, il n’y a plus de carburant », ajoute-t-il.
Autour de l’estuaire, les membres d’équipage désoeuvrés se font dorer au soleil ou restent allongés sur le bastingage des chalutiers bercés au rythme des vagues, en tirant mollement des lattes sur leur cigarette.
Leurs bateaux sont équipés pour partir au large pendant des semaines mais la pénurie de carburant a bloqué la plupart d’entre eux au port.
Elle a également immobilisé environ trois-quarts de ceux pratiquant la pêche côtière, comme Arulanandan.
La situation a des effets en chaîne: si les chalutiers spécialisés dans la pêche d’appâts ne peuvent pas partir faute d’essence, d’autres, même le réservoir rempli, sont coincés à terre.
« Quand je ne rapporte pas d’argent à la maison, mes enfants me demande: +pourquoi il n’y a rien à manger?+ », raconte Arulanandan. « Ils ne peuvent pas comprendre la tempête que nous traversons ».
– « Tout est cher aujourd’hui » –
C’est à une heure de voiture plus au sud, dans la banlieue de Colombo, que se tient le plus grand marché aux poissons du pays, un hangar à ciel ouvert, très animé, où les pêcheurs viennent de tout le pays vendre leur poisson en gros.
On y ressent de plein fouet les conséquences de la crise: beaucoup moins de poissons et fruits de mer sur les étals et beaucoup moins de clients potentiels.
« Les acheteurs viennent de loin. Faute de carburant, ils ne peuvent plus faire le trajet », décrit Mohammed Asneer, qui vend des crevettes.
« Nos ventes diminuent tandis que nos dépenses augmentent ». « Je ne veux plus vivre dans ce pays », se lamente le jeune homme, assurant que tout en travaillant sur le marché aux poissons, ils ne peut pas lui-même s’en offrir un kilo.
Le gouvernement sri-lankais s’est dit conscient que le pays vivait sa crise la plus profonde depuis l’indépendance du pays en 1948.
L’inflation atteint des sommets, le coût du gazole a presque doublé en quelques mois et les prix alimentaires augmenté de 25% en janvier, selon les statistiques officielles.
« Tout est cher aujourd’hui, ça devient très difficile de travailler », confie K.W. Shiromi, propriétaire du Mama’place, un restaurant spécialisé dans les produits de la mer dans la charmante ville de Weligama, sur la côte sud.
Tandis que ses clients, notamment des touristes, ravis, contemplent les vagues tout en déjeunant, K.W. Shiromi reconnaît avoir sérieusement revu ses prix à la hausse, pour compenser les pénuries.
« Il faudrait que le gouvernement fasse quelque chose qui améliore la situation pour que les gens soient contents », dit-il. « Sinon, tout le monde au Sri Lanka va souffrir ».