Ce projet, nommé Bay du Nord et porté depuis des années par le géant norvégien Equinor, permettra d’exploiter un gisement pétrolier à plus d’un kilomètre de profondeur à 500 kilomètres au large de la province de Terre-Neuve. La mise en exploitation du projet est prévue en 2028.
Il s’agira de la cinquième plateforme pétrolière du genre au Canada et cela permettra l’extraction d’environ 300 millions de barils de pétrole sur 30 ans, selon l’entreprise.
« Le projet d’exploitation de Bay du Nord peut aller de l’avant, sous réserve de certaines des conditions environnementales les plus strictes jamais imposées, y compris l’exigence historique pour un projet pétrolier et gazier d’atteindre la carboneutralité d’ici 2050 », a déclaré, par communiqué, le ministre et ex-activiste pour le climat.
Selon une évaluation environnementale approfondie, le projet n’est pas susceptible d’entraîner des effets environnementaux négatifs importants, a-t-il ajouté.
« Le monde a encore besoin de pétrole », a ensuite affirmé à Radio Canada celui qui avait été choisi pour le portefeuille de ministre de l’Environnement, en octobre dernier, par Justin Trudeau, pour son passé de militant.
– Vives critiques –
L’annonce a aussitôt provoqué une levée de boucliers des groupes environnementaux. « Approuver Bay du Nord est un autre pas vers un avenir invivable », a estimé Julia Levin d’Environmental Defence, et une « gifle pour les climatologues, les communautés du Canada et du monde touchées par la crise climatique ».
Pour Greenpeace, cette décision est le « triomphe » de politiques qui ne font « qu’aggraver la crise climatique et la dépendance mondiale aux combustibles fossiles qui brûlent la planète ».
Ces organisations rappellent que le secrétaire général de l’ONU a qualifié de « folie » la dépendance persistante aux énergies fossiles, une « addiction qui nous conduit vers une destruction collective ».
Selon le dernier rapport des experts climat de l’ONU (Giec), pour respecter une hausse des températures à +1,5°C, l’usage du charbon sans capture de carbone (une technologie non mature à grande échelle) devrait être totalement stoppé et ceux du pétrole et du gaz réduits de 60% et 70%, respectivement, d’ici 2050 par rapport aux niveaux de 2019.
Plusieurs partis politiques ont également dénoncé cette décision du gouvernement canadien, notamment le Nouveau parti démocratique (NPD, gauche), allié au parlement des libéraux de Justin Trudeau. « Cela montre exactement ce qui ne va pas avec ce gouvernement. Ils écoutent leurs copains du secteur pétrolier et gazier au lieu d’écouter les spécialistes du climat », a dénoncé Laurel Collins, porte-parole du NPD en matière d’environnement.
Quant au bloc québécois, 3e formation parlementaire, il estime que le Canada « confirme sa position de cancre dans la lutte face aux changements climatiques » et que cette décision « sonne le glas de la crédibilité » du ministre de l’Environnement.
Le dilemme était tel sur ce projet que la décision a été reportée deux fois ces derniers mois, d’autant plus que Justin Trudeau a souvent été critiqué ces dernières années pour ses décisions liées au secteur pétrolier, notamment pour avoir nationalisé en 2018 un oléoduc.
Il avait pris des engagements climatiques forts pendant la dernière campagne électorale et affirmait en octobre dernier qu’il fallait « s’assurer que l’industrie pétrolière et gazière arrête d’augmenter ses émissions et commence à les réduire ».
tib/iba