« Bien sûr, il a sentiment d’une détention injuste et disproportionnée, mais il est fort moralement et gère la situation », assure son amie danoise Christina Koll au sujet d’un militant que ses proches décrivent à l’AFP comme énergique et « toujours plein d’allant ».
Francesco Pisanu, 38 ans, est le seul ressortissant français parmi les 30 membres de l’équipage de l’Arctic Sunrise, un navire de Greenpeace, détendus depuis septembre en Russie. Ils ont été interpellés le 19 septembre alors qu’ils tentaient d’escalader une plate-forme pétrolière en mer de Barents pour dénoncer les risques environnementaux que présente cette activité pour l’Arctique.
Ils doivent répondre des accusations de « piraterie » (un crime passible de 15 ans d’emprisonnement) et de « hooliganisme » (passible de sept ans). Selon Greenpeace, leur détention provisoire prendra fin le 24 novembre mais les autorités russes ont jusqu’à dimanche pour demander une prolongation.
Francesco Pisanu, qui dispose de la double nationalité franco-italienne, a d’abord milité comme bénévole pour l’ONG avant d’accomplir des missions salariées en 2003 comme recruteur d’adhérents.
Mais sillonner les océans a rapidement attiré ce « nomade » dans l’âme: « Il a toujours voulu embarquer, les bateaux cela fait partie des gènes de Greenpeace, qui est née sur l’eau », témoigne Alain, qui a participé à des missions aux côtés de Francesco (il ne souhaite pas voir apparaître son nom de famille dans la presse).
En 2006, encore bénévole pour une première campagne de trois mois, Francesco embarque à Barcelone à bord de l’Esperanza, l’un des trois navires de l’association, pour une campagne sur le thon rouge en Méditerranée puis des observations scientifiques sur le plastique dans l’océan Indien et le Pacifique.
« Il est tombé amoureux de la mer… On aurait dit un enfant devant un arbre de Noël », se souvient Alain.
Des pompes pour être en forme
« Je pense qu’il voit la mer comme un lieu de beauté silencieuse mais aussi d’une grande force qui mérite le respect et il s’intéresse personnellement à la météo et à la navigation », ajoute Christina Koll.
L’enfant de Saint-Cyr-l’Ecole (Yvelines), qui a quitté le cursus scolaire avant le lycée et enchaîné plusieurs métiers (palefrenier, chauffeur de limousine, ambulancier…) semble avoir trouvé « sa voie » sur mer, explique un ami d’enfance, Florent Viala.
Salarié de Greenpeace comme matelot, il passe en 2010 un brevet de capitaine au lycée maritime de Nantes et occupait dans des missions récentes la fonction de bosco, le responsable de l’intendance à bord.
Pendant la campagne en mer de Barents, en septembre, « il était chargé de la surveillance en soirée et pendant la nuit dans le cadre des mesures de sécurités requises à bord », selon son amie Christina.
C’est un marin « sérieux et carré sur l’eau » mais aussi « fondamentalement toujours de bonne humeur », assure Olivier Berland, un ancien salarié de Greenpeace. Dans un bel ensemble, ses proches décrivent un homme « plein d’énergie », amateur de moto et de sports de combat mais « foncièrement non-violent » et mesuré face aux risques liés aux actions menées par l’ONG.
« Le simple fait d’agir en mer, c’est un risque en soi. On sait ce qu’on fait, personne ne nous met la pression pour faire des choses qu’on ne voudrait pas faire… Mais ce qui leur est arrivé a forcément été une désagréable surprise », estime l’ex-marin Alain.
Dans sa cellule à Saint-Pétersbourg, le militant de Greenpeace « passe une grande partie du temps à lire et à écrire, faire des pompes pour rester en forme et essayer de s’échapper en pensant à ses amis et sa famille », témoigne Christina Koll, qui a pu échanger quelques lettres et lui parler au téléphone.
Mais « ce qui lui manque peut-être le plus en ce moment », selon Alain, c’est la musique de Pink Floyd qu’il aime tant.