Cinq thèmes qui ont focalisé l’attention et les tensions à Genève.
Réponse à la pandémie
Après deux ans et demi de lutte contre la pandémie de Covid-19, les 164 États membres de l’Organisation mondiale du commerce ont réussi à s’accorder sur une levée temporaire des brevets protégeant les vaccins anti-Covid, pendant cinq ans, pour les pays en développement.
Ce sujet a fait l’objet de longs échanges entre Pékin et Washington pour se mettre d’accord sur la définition des bénéficiaires.
Pékin avait indiqué en mai ne pas vouloir bénéficier de ce traitement spécial et différencié mais les États-Unis réclamaient un engagement écrit. Les deux pays ont fini par se mettre d’accord sur le fait que la promesse faite par la Chine était contraignante.
Au plus tard six mois à compter de la date de l’accord, les pays membres de l’OMC devront décider si l’accord est étendu « à la production et à la fourniture d’outils de diagnostic et de traitements » contre le Covid.
Dans un autre texte, les pays s’engagent à « faire preuve de modération dans l’imposition de restrictions à l’exportation » de vaccins, traitements, outils de diagnostic et autres produits médicaux essentiels liés au Covid-19, y compris leurs intrants.
Pêche
Après plus de 20 ans de négociations, les pays sont arrivés à un accord sur certaines formes de subventions qui menacent la durabilité de la pêche, mais le texte a largement été édulcoré.
L’accord interdit les subventions contribuant à la pêche illicite, non déclarée et non réglementée et les aides à la pêche concernant les stocks surexploités. Les pays en développement, y compris les pays les moins avancés, bénéficient d’une dérogation de deux ans dans leur zone économique exclusive (ZEE).
La partie concernant les subventions contribuant à la surcapacité et à la surpêche a fait les frais des réticences indiennes.
Mais, a souligné la directrice générale de l’OMC Ngozi Okonjo-Iweala, le texte fait « un premier mais important pas en avant pour réduire les subventions à la surcapacité et à la surpêche en mettant fin aux subventions à la pêche non réglementée en haute mer ».
Insécurité alimentaire
La guerre en Ukraine menée par les Russes prive le monde de céréales et d’engrais, fait flamber les prix et menace de faim des millions de gens dans le monde.
La déclaration ministérielle sur « l’insécurité alimentaire » ne mentionne pas nommément l’invasion de l’Ukraine par la Russie et la crise alimentaire qu’elle provoque.
Mais le document adopté souligne l’importance « de ne pas imposer de prohibitions ou de restrictions à l’exportation » qui soient contraires aux règles de l’OMC.
Dans une autre décision, les membres ont par ailleurs décidé de ne pas imposer de « prohibitions ou restrictions de produits alimentaires achetées à des fins humanitaires » par le Programme alimentaire mondial, une des principales agences de l’ONU. L’Inde avait fait part de ses réticences à ce sujet, avant de rejoindre le consensus.
Réforme OMC
De nombreux pays, dont les États-Unis et l’Union européenne, mais également les pays africains, réclament une réforme de l’OMC.
Comme attendu, les ministres n’ont pas élaboré de programme détaillé mais une ébauche de réforme. Le texte appelle à « améliorer toutes les fonctions » de l’organisation, dont les règles n’ont guère changé depuis sa création en 1995, et demande que le système de règlement des différends – le tribunal de l’OMC – soit à nouveau pleinement opérationnel « pour 2024 ».
L’organe d’appel du gendarme du commerce mondial, dont la nomination des juges est bloquée par Washington, n’est plus opérationnel depuis décembre 2019, faute de magistrats en nombre suffisant.
Transactions électroniques
Depuis 1998, les membres de l’OMC sont convenus de ne pas imposer de droits de douane sur les transmissions électroniques. Cette décision est prorogée à chaque ministérielle, mais cette fois un groupe de pays, l’Inde et l’Afrique du Sud en tête, contestaient ce moratoire, dénonçant son impact négatif sur leurs droits de douane.
Ces pays ont fini par décider de maintenir le moratoire jusqu’à la prochaine ministérielle qui devrait normalement avoir lieu d’ici au 31 décembre 2023. Si elle était reportée au-delà du 31 mars 2024, le moratoire expirerait à cette date à moins que les pays ne décident de le proroger.