Tenus à d’exigeantes performances écologiques, les futurs navires commerciaux vont être de plus en plus complexes à opérer. Pour aider les armateurs, OSE Engineering mobilise son expertise en matière de jumeau numérique. Explications Par Mikael Volut, Directur général de OSE Engineering.
***
Face aux enjeux environnementaux, réglementaires et économiques auxquels est confronté le secteur maritime, un consensus semble s’établir : il n’existe pas de solution unique pour décarboner ce mode de transport incontournable pour notre société. En revanche, la juxtaposition de nombreuses briques technologiques innovantes permettra d’entrevoir de meilleures performances écologiques à moyen terme : moteurs fonctionnant avec des carburants alternatifs, carènes améliorées, propulsion hybride utilisant partiellement la force du vent, capture de CO2, récupération de chaleur, etc.
La première conséquence de cette combinaison de technologies complémentaires est la complexité croissante des navires commerciaux, avec pour enjeu principal la nécessité de faire fonctionner ces briques de manière coordonnée, intelligente et optimisée.
LE RECOURS AU JUMEAU NUMÉRIQUE
Il est aujourd’hui possible de modéliser finement ces systèmes complexes via la conception d’un jumeau numérique, et c’est précisément le métier de OSE Engineering. Un jumeau numérique est la réplique numérique d’un objet ou d’un système, que l’on peut projeter et simuler dans n’importe quelle situation pour anticiper son comportement. Ainsi, le jumeau numérique de l’architecture énergétique d’un navire consiste à modéliser chaque sous-système physique, afin de pouvoir prédire, en s’appuyant sur des données réelles mesurées in-situ, le comportement énergétique complet du navire en opération. Le jumeau numérique permet de modéliser, de façon indépendante, les différentes briques technologiques, puis il est exploité via des algorithmes d’optimisation capables de faire des préconisations. Ces solutions visent à aider les équipages à mieux opérer leur navire et à optimiser le calendrier des différentes opérations du bord.
Elles permettent aussi aux équipages et aux armateurs de réduire la consommation de carburant et les émissions, tout en offrant à leurs clients une plus grande transparence quant au respect de leurs engagements commerciaux.
LE PROJET MERVENT 2025
Le recours aux solutions numériques d’optimisation peut notamment être illustré par le projet MerVent, piloté par l’armateur Zéphyr et Borée, qui porte la conception d’un porte-conteneurs, premier de série, très innovant. Ce navire, capable d’émettre 50% de CO2 de moins par rapport au bilan carbone du marché transatlantique sur lequel il sera positionné, sera mis à l’eau courant 2025 avant une période d’essais à la mer qui permettra la validation des systèmes.
Aux côtés des autres acteurs1 du consortium réuni sur ce projet, le rôle de OSE Engineering consiste à fournir une suite logicielle de performance opérationnelle reposant sur un jumeau numérique capable de simuler le comportement des différents composants de l’architecture énergétique globale du navire (génératrices hybride diesel-méthanol, moteurs électriques, ailes rétractables, systèmes de récupération du CO2…).
DES CENTAINES DE CAPTEURS
Plusieurs centaines de capteurs seront installés à bord du navire, afin d’alimenter les algorithmes avec des informations comportementales réelles. Le calculateur pourra ainsi ajuster, en continu, ses préconisations et proposer à l’équipage, par exemple, des réglages d’utilisation des moteurs et des ailes adaptés à la situation opérationnelle.
La solution conçue par OSE Engineering sera couplée à un outil de routage vélique innovant. Elle permettra à l’équipage de choisir la route optimale et d’identifier les réglages adéquats permettant de minimiser consommation et émissions cumulées sur la traversée.
L’intelligence numérique, combinant des savoir-faire sur la physique des systèmes complexes, des outils mathématiques avancés et une expertise en science informatique, s’inscrit, de façon croissante, au cœur de la transformation du transport maritime. Les logiciels d’optimisation de la performance opérationnelle sont aujourd’hui essentiels pour faire travailler ensemble les briques innovantes que l’industrie développe, et tirer ainsi le meilleur parti de chacune d’elles pour être capable de répondre aux exigences réglementaires futures.
Le projet MERVENT 2025, labellisé en avril 2022 par le Pôle Mer Bretagne Atlantique, vise à concevoir, faire construire, et opérer le premier porte-conteneurs industriel à propulsion hybride, voiles et carburant de synthèse. Pour cela, il est nécessaire d’adopter un mix énergétique capable de s’adapter graduellement aux contraintes réglementaires, et de dépasser à terme les objectifs de l’Organisation Maritime Internationale (OMI). Le projet s’inscrit également dans une approche de la décarbonation centrée autour de la sobriété énergétique, en travaillant sur l’efficacité énergétique, sur l’activité du navire (réduction de la vitesse, optimisation des routes, temps de manutention, formation des équipages), en économisant de l’énergie grâce à la propulsion par le vent, et en intégrant l’usage possible, par la chaine propulsive, d’un carburant de synthèse fabriqué à partir d’hydrogène vert.
Enfin, le projet permettra d’accélérer le développement des technologies de capture et de stockage du carbone qui ont une maturité encore faible mais qui seront nécessaires pour avancer vers le zéro émission. Leur objectif est d’éviter les émissions de C02 des carburants de synthèse type Méthanol ou Méthane en permettant un usage en circuit fermé du C02, et de continuer à utiliser des carburants fossiles pour accompagner la mise en place des parcs industriels nécessaires à la production à grande échelle de carburant de synthèse.