En mer Noire, les attaques se multiplient de part et d’autre depuis que Moscou a refusé mi-juillet de reconduire un accord négocié par l’ONU et la Turquie qui autorisait les exportations de céréales ukrainiennes. Samedi, un tanker russe transportant du pétrole a été frappé par une attaque ukrainienne à l’aide d’un drone et d’explosifs.
La situation en mer Noire demeure « un vrai facteur d’incertitude, mais aujourd’hui on ne le ressent pas sur les prix » des grains, explique à l’AFP Gautier Le Molgat, du cabinet Agritel (Argus Media France).
« Le marché a été bercé par des craintes tout au long du printemps et de l’été » et a appris à relativiser, selon lui.
Mercredi sur le marché européen vers 15H30 GMT, la tonne de blé tendre reculait de 2 euros sur l’échéance de septembre.
« Désormais, ce qui se passe dans la région ne pourra faire varier le marché que » très peu, selon Ryan Nielsen de Brugler Marketing and Management qui considère « peu probable » un renouvellement de l’accord sur le corridor céréalier.
Les investisseurs ont intégré que l’offre mondiale de blé était « globalement suffisante », selon lui.
En Ukraine, l’association des céréales a revu à la hausse la semaine dernière ses prévisions de récolte de céréales et d’oléagineux grâce à « des conditions météo favorables et des rendements meilleurs que prévu ».
La guerre n’empêche pas la Russie d’avoir « un bon début de campagne et de marquer des parts de marchés sur des destinations où ils étaient déjà présents » notamment en Afrique du Nord, poursuit Gautier Le Molgat.
Mardi, l’Egypte a annoncé acheter 235.000 tonnes de blé russe (actuellement 90% de ses importations) à des prix entre 276,50 dollars et 279,69 dollars la tonne, chargement et fret compris.
A l’export, l’Europe perd du terrain face à la Russie. « Sur le début de la campagne, l’Europe n’a pas voix aux chapitre », notamment en blé face aux stocks russes importants. Premiers producteurs de l’UE, les Français s’interrogent: « Quand est-ce qu’on pourra vendre? » rapporte Damien Vercambre d’Inter-Courtage.
La baisse des exportations de l’UE est particulièrement marquée pour l’orge, après une bonne campagne 2021-22 sur fond de crise diplomatique entre la Chine et son fournisseur habituel, l’Australie. Pékin a supprimé la semaine dernière ses surtaxes sur l’orge australien.
– Le maïs américain « calme le jeu » –
D’autres incertitudes venues de Chine jouent sur les cours alors que le pays « a connu une vague de chaleur marquée puis a reçu beaucoup de pluies et subi des inondations », fait observer Ryan Nielsen.
« Leur récolte de maïs va probablement souffrir. Ils pourraient avoir besoin d’importer », avec comme fournisseurs possibles les Etats-Unis, le Brésil, l’Afrique du Sud ou même la France, selon lui.
Aux Etats-Unis, « les États du nord souffrent toujours » de la chaleur et du manque d’eau mais les autres bassins de production de maïs et de soja « vont plutôt bien », constate M. Nielsen.
« Même si c’est compliqué (dans plusieurs zones du monde, NDLR), le fait qu’on puisse compter sur les Américains avec une grosse production de maïs calme le jeu sur le marché des céréales », notamment fourragères, explique M. Le Molgat.
Plus au sud, le phénomène météorologique El Niño semble avoir favorisé les récoltes en Argentine tant pour le blé que le maïs ou le soja.