« J’ai hâte de rentrer au Royaume-Uni et de retrouver ce que j’aime le plus: ma famille et l’innovation dans ma spécialité », avait déclaré en juin, à l’issue du verdict rendu par un jury de San Francisco (Californie), celui qui a aussi été le conseiller de deux Premiers ministres britanniques.
Après une décennie d’accusations de malversations, l’homme d’affaires de 59 ans disait avoir commencé sa « seconde vie », qu’il comptait célébrer avec une croisière réunissant des membres de sa famille, des employés de sa société d’investissement Invoke Capital et certains de ses avocats.
Il n’aura fallu que quelques minutes dans la nuit de dimanche à lundi pour qu’une tornade ne fasse couler son voilier de luxe, le Bayesian, à 50 mètres de fond près de Palerme. Et ne mette brusquement fin à une carrière mouvementée, des balbutiements de l’informatique grand public à l’intelligence artificielle.
Avant le naufrage, dont son épouse Angela Bacares est rescapée et pour lequel sa fille de 18 ans Hannah reste portée disparue, l’homme d’affaires était à la tête d’une fortune d’environ 500 millions de livres (587 millions d’euros) selon la dernière « Rich List » du Sunday Times.
Originaire de l’est de l’Angleterre, il a fait ses débuts d’entrepreneur à la fin des années 1980 à Cambridge, où il avait obtenu un doctorat, en travaillant sur des systèmes sono pour les ordinateurs Atari puis la reconnaissance numérique des empreintes digitales.
Mais il doit son ascension -et sa chute- à Autonomy, éditeur fondé en 1996 dont les logiciels aidaient les entreprises à mieux gérer et exploiter d’énormes masses de données.
En 2011, la « success story » de ce fleuron britannique des technologies est couronnée par son rachat pour 11 milliards de dollars par le géant américain Hewlett-Packard, qui cherchait alors à se détourner des ordinateurs au profit des services aux entreprises et logiciels.
La consécration tourne rapidement au cauchemar. HP accuse Autonomy d’avoir truqué ses comptes, reprochant notamment à Mike Lynch d’avoir artificiellement gonflé les revenus déclarés, la croissance des revenus et les marges de l’entreprise.
Le groupe américain passe alors presque 9 milliards de dollars de dépréciations.
Après de multiples procédures et rebondissements, Mike Lynch a été extradé en 2023 du Royaume-Uni vers les Etats-Unis. La justice américaine estimant qu’il présentait un « risque sérieux de fuite », il a été assigné à résidence à San Francisco.
– « Bouc émissaire » –
« J’ai dû dire au revoir à tout et à tout le monde, car je ne savais pas si je reviendrais un jour », avait-il raconté fin juin au journal britannique The Times, après son retour dans son pays. « J’ai plusieurs problèmes médicaux qui auraient rendu ma survie difficile » en cas d’incarcération
Il a été finalement acquitté en juin à San Francisco dans le volet pénal du dossier.
Père de deux filles -l’aînée a 21 ans-, cet amateur de chiens – il possède deux teckels et quatre chiens de berger – habitait dans le quartier londonien cossu de Chelsea et possédait une ferme dans le Suffolk (est de l’Angleterre).
S’il avait empoché quelque 815 millions de dollars lors de la vente d’Autonomy, il réfutait toute malversation, accusant en retour HP de faire de lui un « bouc émissaire pour ses propres échecs ».
Le dossier de fraude n’est pas clos: en 2022, la justice britannique avait statué, dans un procès civil, que HP avait été dupé et elle doit encore se prononcer sur les milliards de dollars de dommages réclamés par le groupe américain.
Les démêlés judiciaires de Mike Lynch ont longtemps plombé sur une autre entreprise britannique: le groupe de cybersécurité et d’intelligence artificielle Darktrace, dont il est un investisseur de la première heure.
Mais dans un retour de fortune, Darktrace a accepté en avril une offre de rachat du fonds de capital investissement américain Thoma Bravo à 5,3 milliards de dollars, faisant s’envoler son cours de Bourse.
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