À La Réunion, gendarmes et scientifiques oeuvrent à la protection des baleines

Saint-Paul (France), 24 oct 2024 (AFP) – Après avoir parcouru des milliers de kilomètres, de nombreuses baleines à bosse choisissent l’île de la Réunion pour donner naissance à leur baleineaux. Pour les scientifiques, c’est l’occasion de collecter de précieuses données. Mais aussi de sensibiliser le public, car la croissance du tourisme baleinier met la pression sur les cétacés.

En palmes, masque et tuba, caméra à la main, des plongeurs s’approchent le plus près possible de deux baleines qui font le show pour l’occasion.

L’une d’elle avance vers les baigneurs et remonte vers la surface pour pointer la tête hors de l’eau. Elle replonge et laisse les nageurs admirer ses grandes nageoires pectorales. Plus loin, un troisième cétacé, avec son baleineau, sonde à quelques mètres du groupe dans une eau à 24°C, chauffée par le soleil.

La Réunion, dans l’océan Indien, est un lieu de choix pour l’observation des mammifères marins, qui viennent y mettre bas ou s’accoupler entre juin et octobre.

En 2023, 1.271 baleines à bosse ont été recensées par le Groupe local d’observation et d’identification des cétacés (Globice). « Un record », selon l’association.

L’île est d’ailleurs un des rares endroits au monde à autoriser les mises à l’eau des nageurs, y compris pour l’observation des mères et des baleineaux. Mais la pratique est bien réglementée.

Professionnels de plongée, opérateurs spécialisés et simples plaisanciers doivent se former à une approche respectueuse. Et avec la croissance du tourisme, ce qui était une charte est devenue un arrêté préfectoral plus strict.

À la surface, quatre bateaux se positionnent à plusieurs centaines de mètres des animaux.

Pour Audrey Cartaud, cheffe de projet de l’équipe Quiétude au Centre d’étude et de découverte des tortues marines (CEDTM) de La Réunion, « les bateaux mettent une pression énorme sur les animaux. Certaines structures vont jusqu’à cinq ou six rotations par jour ».

– Écoute des fonds marins –

Pour faire respecter les règles – notamment la présence de cinq bateaux au maximum dans une zone de 300 mètres autour de l’animal -, la gendarmerie maritime organise régulièrement des sorties.

« Dès que la mer le permet (…) on est sur l’eau, on effectue des patrouilles sur les règles d’abordage, les armements de sécurité et le respect des décrets. Et on a aussi vocation à faire du secourisme », précise Martin L’Her, de la brigade nautique du Port (nord-ouest), depuis le zodiac qui lui permet de scruter la zone.

Le CEDTM, lui, n’est pas assermenté mais ses membres sillonnent également le secteur.

« On travaille avec la gendarmerie. On se rencontre régulièrement sur l’eau et on fait en sorte que la réglementation soit respectée du mieux possible », souligne Jonathan Cotto, chargé de mission au sein du CEDTM, à la barre de son bateau.

Pour les scientifiques, le passage des baleines est l’occasion de collecter de précieuses données. Cela passe par l’observation en surface, mais aussi par l’écoute des fonds marins: la baleine à bosse est réputée pour avoir le chant le plus complexe du règne animal.

Beverley Ecalle, en combinaison intégrale, est éthologue pour l’association Abyss, spécialisée dans la conservation des mammifères marins.

« On a vu deux souffles puis on les a perdus de vue. On reste un peu en retrait pour voir (…) si les baleines ont sondé et sont parties ailleurs. Ça nous permet d’observer l’ensemble de la zone pour voir s’il n’y a pas d’autres baleines aux alentours » et écouter leurs chants, dit-elle.

Des chants qui permettent d’évaluer les périodes et niveaux de fréquentation des baleines d’un site et d’une année sur l’autre « pour mieux comprendre les mouvements d’individus entre les sites de reproduction », selon Globice.

Sur son bateau, Yann Doh, chercheur en bioacoustique des cétacés, déroule le câble de l’hydrophone qui va permettre de recueillir les précieux chants. « On a 10 mètres de câble, on va essayer d’en mettre le plus possible pour aller enregistrer sous la couche de surface qui est très perturbée par les vagues, par les bulles, et qui va venir nous polluer notre enregistrement », souligne-t-il.

Pour le scientifique, « c’est vraiment le fait d’en savoir plus qui va nous permettre de communiquer avec le grand public, mais aussi de sensibiliser les gens ».

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