« Les marins déployés en mer Rouge ont été confrontés quasiment à toutes les menaces que l’on peut rencontrer à la mer. »
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Le capitaine de vaisseau Pascal Forissier commande la frégate multi-missions (FREMM) Provence, équipage A, une unité de premier rang de la Marine nationale. L’officier revient sur l’engagement de son bâtiment dans la protection du trafic maritime contre les frappes de la milice Houthi au large du Yémen. Un témoignage exceptionnel qui dévoile les nouveaux aspects de la guerre navale dans le contexte géostratégique international dégradé que nous connaissons.
Propos recueillis par Aurélien Duchêne

Pour prendre la mesure de l’unité que vous commandez, où se situe la FREMM dans l’ensemble des bâtiments de combat dont dispose la marine française et quels sont, comparativement, ses caractéristiques et atouts ?
La Marine est bâtie autour de deux piliers majeurs que sont le Groupe aéronaval avec le porte-avions et son escorte, et la Force océanique stratégique avec les sous-marins nucléaires lanceurs d’engins (SNLE). Pour permettre la mise en œuvre de ces deux piliers, il faut agréger un certain nombre de moyens, dont des frégates qui forment l’ossature de ce que l’on appelle la Force d’action navale, l’une des quatre grandes forces organiques de la marine (1) qui englobe tous les navires de surface. Parmi les frégates de la Force d’action navale, on a notamment des frégates de défense aérienne (FDA) et des FREMM, des frégates multi-missions. Pourquoi multi missions ? Parce qu’elles sont capables d’opérer dans tous les domaines de lutte. Elles mettent en œuvre le missile de croisière naval (MdCN) qui leur permet de frapper des cibles stratégiques à terre. Elles sont également spécialement redoutables dans la lutte anti-sous-marine, grâce à leurs sonars et à la complémentarité qu’elles ont su établir avec leur hélicoptère embarqué. Elles ont été reconnues – et c’est assez notable pour le souligner –, par les Américains, avec la remise, à trois reprises, par le commandant de la 6e Flotte américaine, du Hook’Em Award, le prix d’excellence de la lutte anti-sous-marine. Je terminerai en soulignant leur particulière discrétion dans l’ensemble des domaines, acoustique naturellement pour la lutte anti-sous-marine, mais également électromagnétique ou infrarouge. La FREMM est un bâtiment moderne, fortement automatisé, avec un système de combat intégré, une première dans la marine française, et désormais doté de capacités de traitement de la donnée puisque la FREMM Provence embarque, depuis maintenant plus d’un an, un Data hub embarqué (DHE).
La guerre en mer Noire a illustré la vulnérabilité de la marine russe, une marine puissante, face à la guerre asymétrique que lui a menée l’Ukraine jusque dans les ports. Quels enseignements en avez-vous retiré en tant que commandant de bâtiment, et plus largement, quels enseignements en a retiré la marine française ?
Je ne reviendrai pas sur ce que le vice-amiral Slaars, sous-chef d’état-major des opérations aéronavales, a dit lors du point presse du ministère des Armées du 20 février dernier. Pour autant, si je devais mettre l’accent sur un point particulier parmi ceux qui, en tant que commandant, m’ont clairement marqué, c’est peut-être l’importance de connaître la menace. La menace classique, celle à laquelle on s’attend dans les différents domaines de lutte, et celle, plus inédite liée aux innovations de l’adversaire, que l’on doit anticiper pour s’adapter et ne pas se laisser surprendre. A cet égard, la guerre en Ukraine a été remarquable, si je peux utiliser ce terme-là, dans l’emploi des drones, quel que soit le milieu dans lequel ils ont été utilisés. Pour nous, marins, cela a été l’occasion d’un retour d’expérience (RETEX) pour adapter nos tactiques et nos matériels à ce type de menace. On ne doit pas non plus écarter les menaces traditionnelles, comme celle des mines occultées pendant des années et remontant à la Première guerre mondiale. On a vu la réalité de l’emploi tactique de mines pour protéger une plage, pour gêner une flotte dans sa manœuvre, et avons, là aussi, un RETEX particulièrement riche. Plus globalement, concernant la connaissance de la menace, je dirais que le conflit en Ukraine nous a poussés à aller encore plus loin dans le travail d’acculturation de nos marins. On travaille à y faire face avec les contrôleurs opérationnels qui suivent nos opérations dans les zones où nous sommes déployés – en Méditerranée, Atlantique, Baltique, océan Indien, mer Rouge –, et avec nos différents services de renseignement.
Le deuxième enseignement que je retire du conflit ukrainien est l’importance du partage en boucle courte du retour d’expérience, de sorte que chaque unité profite en temps réel de l’expérience des unités déployées en opération au contact de l’adversaire ou du compétiteur, en tout cas au contact de la menace, ceci afin que les unités en phase d’entraînement puissent gagner en efficacité dans leur temps d’entraînement, d’acculturation et d’anticipation.
Troisième enseignement, l’importance de l’entrainement. La Marine a, par exemple, mis en place des exercices spécifiques de lutte contre les drones comme l’exercice Wildfire au cours duquel des unités ont été confrontées à des attaques en surface et aériennes, combinées, coordonnées, saturantes, pour tester nos tactiques et nos moyens de riposte, cinétiques ou électroniques.
Le quatrième enseignement est de savoir tirer profit des RETEX et des entrainements pour adapter rapidement nos procédures tactiques et nos systèmes embarqués, afin de rester dans le tempo des opérations. Des systèmes testés positivement lors d’un exercice Wildfire ont pu être très rapidement installés sur une frégate multi-missions déployée en opération. Cette démarche, que nous appelons « PERSEUS » dans la Marine, illustre mon propos sur la connaissance de la menace, le partage du RETEX en boucle courte, l’entraînement, l’adaptation de nos procédures et de nos systèmes, et la démonstration que tout cela nous sert directement en opération.
Des FREMM ont été engagées en mer Rouge pour protéger le trafic commercial contre les attaques de la milice Houthi. Les marins ont parlé de violence désinhibée. A quoi ont-ils été confrontés ?
Les marins qui ont été déployés en mer Rouge ont été confrontés quasiment à toutes les menaces que l’on peut rencontrer à la mer. La marine française l’a constaté dès décembre 2023 lorsque les Houthis ont commencé à engager les navires civils et les navires militaires qui les accompagnaient, avec des missiles antinavires, des missiles balistiques ainsi que des drones aériens et des drones de surface armés. Ceci dans une violence d’autant plus désinhibée qu’elle ciblait des navires civils se contentant d’assurer le trafic commercial, subitement pris dans une terreur voulue par les Houthis pour bloquer le flux commercial à destination de la Méditerranée. Quand j’ai été déployé en mer Rouge en novembre 2024, la situation s’était relativement calmée par rapport à l’intensité qu’on avait pu connaître au début de la crise, fin 2023 début 2024. Il ne se passait pourtant pas une journée sans que l’on ne perçoive la réalité et la permanence de cette menace dans la zone. La capacité des Houthis à mettre en œuvre de tels moyens de manière précise, soutenue dans le temps et coordonnée, suppose bien évidemment un solide soutien de la part d’une ou de plusieurs puissances étatiques, parce qu’ils ne peuvent réaliser seuls ce qu’ils ont fait et ce que l’on a constaté́.
Quel type de drones et de missiles ont été précisément utilisés par les Houthis, de quelle manière l’ont-ils été et comment ont-ils été traités ?
Je commencerai par évoquer les drones aériens. Ce sont des drones à voilure fixe qui volent à une centaine de nœuds, c’est-à-dire à peu près 180 km heure. Les plus courants sont les drones de type Samad utilisés pour délivrer une charge militaire ou pour du renseignement. Ils peuvent être téléguidés sur une cible ou voler avec une trajectoire prédéfinie, en tant que munition rodeuse par exemple, pour saisir l’occasion d’une cible et la frapper.
Les drones de surface sont des skiffs traditionnels, ces barques en bois employées par les pêcheurs dans la zone sud de la mer Rouge, équipés d’explosifs et téléguidés. Les Houthis sont allés jusqu’à les doter de mannequins pour laisser croire qu’il s’agissait de barques de pêche inoffensives et non de drones téléguidés armés. D’où le besoin pour nous de disposer de moyens de détection et d’identification suffisamment précis pour faire la distinction.
Les missiles antinavires employés sont des missiles volant très bas au-dessus de l’eau, dotés d’un autodirecteur qui leur permet d’accrocher le navire et de se diriger dessus, tout cela à une vitesse avoisinant les 1 000 km/h, ce qui laisse assez peu de temps pour la détection et la réaction.
Les missiles balistiques sont quant à eux des missiles tirés en cloche, et comme leur nom l’indique, en balistique. Certains sont tirés en balistique pure, d’autres sont probablement équipés d’autodirecteurs avec une sorte de guidage terminal permettant d’affiner leur trajectoire avant l’impact. La vitesse d’un missile balistique dépend de la distance à laquelle il a été tiré mais globalement, plus la cloche monte haut, plus le missile arrivera vite sur sa cible. On parle là de vitesse pouvant atteindre les 4 000 km/h, voire plus.
Toutes ces armes ont été utilisées de façon précise – ce qui suppose de vraies capacités de désignation d’objectifs –, et coordonnée. Les Houthis ont également fait preuve d’un vrai savoir-faire technique et tactique en mettant en œuvre, de façon coordonnée, des drones pour dans un premier temps détourner l’attention ou faire un premier impact, et ensuite des missiles, antinavires ou balistiques qui viendront immobiliser voire détruire le navire ciblé. Ils ont utilisé́ ces armes quotidiennement, pendant des mois, en dépit des frappes conduites par les Américains pour détruire leurs caches au Yémen, ce qui montre une solide filière de ravitaillement et d’importantes capacités de stockage et de protection.
Pour la détection de toutes ces menaces, nous disposons de nos systèmes radars et de nos systèmes optroniques. L’optronique est particulièrement importante pour, comme je le disais précédemment, identifier un drone habité ou pas, ou tel ou tel type de drone aérien. Concernant les missiles balistiques, on s’est appuyé, pour gagner du préavis, sur un système d’alerte avancée spécialisé dans la détection de ce type de missiles. Pour traiter ces drones et ces missiles, nous avons utilisé l’ensemble de nos systèmes d’armes, des mitrailleuses de 12.7 mm aux missiles Aster en passant par l’artillerie principale de 76 mm. Nous avons également eu recours à notre hélicoptère et à son armement embarqué, qui nous donne une allonge supplémentaire pour traiter la menace à bonne distance.

Certains observateurs ont regretté́ l’emploi de missiles Aster à 1 ou 2 millions d’euros l’unité pour détruire des drones à quelques dizaines de milliers d’euros. Qu’en pensez-vous ?
Je laisse les observateurs observer et les commentateurs commenter. Ce qu’il faut retenir, c’est que défendre le trafic civil et la liberté de navigation a un coût, et que protéger la vie de mes 150 marins n’a pas de prix. Ma responsabilité de commandant est de remplir la mission, en faisant en sorte de ramener tous mes marins à la maison. Si j’estime qu’un missile Aster s’impose pour traiter la menace, plutôt qu’une salve de 76 millimètres, je n’hésite pas un seul instant. De plus, la Marine travaille à l’amélioration des systèmes d’autodéfense de ses frégates et à l’installation de systèmes d’armes intermédiaires qui viendraient rajouter une couche supplémentaire de protection et offrir finalement des options complémentaires de réaction face à ce type de menaces, pour être le plus efficace possible.
Comment ont réagi les équipages face à une menace qui est allée croissante sur le plan de la violence et des armements utilisés ? Qu’en retirez-vous sur l’adaptabilité et la résilience de ces hommes et femmes dont la moyenne d’âge, rappelons-le, est d’environ 28 ans et plus généralement sur leur formation et leur entraînement ?
Bon nombre de mes marins étaient confrontés pour la première fois à des menaces réelles, quotidiennes, permanentes, pesant directement sur leur unité ou sur les navires qu’ils accompagnaient. Ils ont réagi de façon remarquable, que ce soit individuellement ou collectivement. Pour plusieurs raisons. Cela fait des années que nous nous entraînons face à des menaces durcies avec un retour des armes de guerre sur un théâtre d’opération. Les marins ont intégré mentalement la réalité de ces nouveaux risques et le retour d’expérience des unités déployées précédemment dans la zone. Ils ont maintes fois répété les gestes réflexes en cas d’attaque lors des nombreux entraînements réalisés avant déploiement, ce que l’on appelle le drill. Ils maîtrisent parfaitement leur matériel et ont confiance dans leur frégate et en leurs coéquipiers. Enfin, ils trouvent du sens à la mission qui consiste à défendre la liberté de navigation, à protéger le trafic civil, et quelque part aussi, d’une certaine façon, notre économie sur laquelle le détournement des flux de transport maritime peut avoir un puissant impact. En novembre dernier, lors d’une escale à Djibouti, le commandant d’une frégate sud-coréenne qui patrouillait dans la zone, m’a demandé comment je faisais pour maîtriser le niveau de stress de mon équipage dans une zone où le risque est quotidien. C’est ce que je lui ai répondu, en ajoutant quelques éléments de réponse complémentaires à ceux évoqués plus haut, qui servent aussi à mon sens le succès de la mission : la préparation mentale de nos marins lors des entraînements, la pratique du sport qui permet de gérer le niveau de stress, les activités de cohésion en équipage dès que la mission le permet, et l’accompagnement à bord par le personnel médical ou encore l’aumônier… Autant de facteurs qui permettent de renforcer la résilience de chacun et de l’équipage. Cette mission a clairement illustré combien notre système de formation et d’entraînement à la haute intensité est adapté aux réalités des missions d’aujourd’hui.

Le chef d’état-major de la Marine, comme ses prédécesseurs, alerte sur le retour de la guerre de haute intensité en mer. Qu’entend-on précisément par haute intensité, et bien sûr la Marine française y est-elle prête ?
La haute intensité, c’est la guerre contre un adversaire de même nature qui possède des armements équivalents. Là où pendant des années on s’est entraîné face à des menaces de type terroriste, la haute intensité nous confronte à des menaces de nature étatique. J’invite vos lecteurs à regarder le documentaire de Grégoire Chaumeil, « Grand large, haute tension » de l’ECPAD, qui montre comment la Marine a su s’adapter ces dernières années au basculement du monde en cours. Les dernières décennies ont été marquées par ce que l’on a appelé, à la fin de la guerre froide, les « dividendes de la paix », et par l’irruption d’une menace de nature terroriste. Aujourd’hui, on assiste au retour brutal des États-puissance et à un effacement de l’ordre international, avec un réarmement du monde extrêmement rapide. L’agression russe en Ukraine a ramené la guerre entre Etats aux portes de l’Europe et pour nous marins, la perte du croiseur russe Moskva, coulé par des missiles antinavires ukrainiens, rappelle à tous les marins, la dure réalité du combat naval. La devise de la Provence que je commande est « Semper paratus », qui signifie « Toujours prêt ». Et je peux vous dire que ce ne sont pas que des mots. A l’automne dernier, alors que j’étais déployé en Méditerranée orientale, j’ai reçu l’ordre, avec un court préavis et alors que cela n’était pas du tout prévu, de rejoindre la mer Rouge pour protéger les bâtiments civils dans le cadre de l’opération Aspides de l’Union européenne. Pour toutes les raisons que j’ai évoquées, mon équipage et moi étions prêts à faire cette bascule et à partir, en seulement quelques heures, affronter missiles balistiques et munitions rodeuses. La Provence était prête, comme l’est en fait toute la Marine qui s’entraîne depuis plusieurs années dans des exercices majeurs ultra-réalistes comme Polaris, voulu dès 2021 par le chef d’état-major de la Marine de l’époque, l’amiral Vandier. Ce type d’exercice a en effet tenu et veillé à introduire un très grand réalisme dans nos entrainements. Dans le cadre de Polaris, un navire touché est réellement privé de certains systèmes jusqu’à la fin de l’exercice, voire définitivement sorti du jeu s’il est considéré comme coulé. Un navire qui participe à Polaris ne dispose que de l’armement qu’il détient véritablement à bord. S’il a utilisé tous ses missiles, il est tenu de rejoindre un point d’appui et d’y passer un certain temps pour simuler un ravitaillement. Les aéronefs qui volent dans ces exercices coupent réellement leur IFF (système d’identification automatique). Le déroulement de l’ensemble du scénario est laissé à l’initiative des « joueurs », on appelle ça des phases de « LIVEX ». Les commandants déroulent les tactiques qu’ils ont planifiées. Cet ultra-réalisme les pousse à agir comme dans les conditions réelles du combat. Cela contribue à développer l’innovation tactique, l’audace, et des modes d’action offensifs permettant d’accroître la létalité au premier coup, c’est-à-dire être certain que l’engagement que l’on va conduire va neutraliser la partie adverse. Ce concept a été déterminant pour placer les unités au plus près des conditions réelles du combat naval. Il n’y a pas que l’entraînement. Nos systèmes évoluent également de façon agile et rapide pour s’adapter à l’exigence de la haute intensité. Je pourrais citer un système optronique, PASEO, qui à la suite des retours d’expérience, en boucle courte, d’unités déployées en mer Rouge, a été installé en quelques mois seulement à bord de plusieurs unités pour augmenter leur capacité à identifier les différents types de menace. Ce système nous permet de gagner en distance d’identification pour choisir une réponse adaptée à chaque menace identifiée. Pour terminer, je rappellerai qu’il n’y a pas d’opération navale de haute intensité sans supériorité aérienne. Or la Marine possède, avec son groupe aéronaval, bâti autour du porte-avions Charles de Gaulle, un outil extraordinaire de défense et de reconquête de cette supériorité aérienne en mer. Et à cet égard, la perspective du PANG, le futur porte-avions, illustre bien la volonté de la Marine de conserver, dans la durée, cette capacité à faire face à la haute intensité.
Quelles sont les technologies, les armements, en passe de résolument bouleverser le combat naval ?
Les drones assurément. En particulier les drones armés, les munitions téléopérées, qui représentent un défi redoutable dans tous les milieux. J’ai évoqué les drones aériens et les drones de surface mais il y aura demain une nouvelle menace avec les drones sous-marins. Ce défi sera encore plus redoutable lorsque tous ces drones agiront en essaim, de façon à saturer nos forces. Autre révolution dans le combat naval, les armes à énergie dirigée (armes laser) qui offriront une précision accrue et une capacité de tir illimitée. Les armes hypersoniques, capables de voler à des vitesses supérieures à Mach 5 et donc plus difficiles à détecter et à intercepter, vont aussi représenter dans le futur une menace sérieuse dans le combat naval. A cela s’ajoute la cyberguerre, déjà présente, et dont je pense qu’elle ne fera que croître. La protection de nos systèmes informatiques navals face à ces cyberattaques est une préoccupation croissante. Je suis persuadé que ces capacités de guerre cybernétique joueront un rôle crucial dans les conflits de demain. Il y a enfin, bien évidemment, l’Intelligence artificielle. Elle va révolutionner la guerre navale en automatisant des tâches complexes, en améliorant la prise de décision et en permettant de couvrir le champ de bataille, terrestre ou aéronaval, de systèmes d’armes autonomes.

S’agissant justement de l’Intelligence artificielle (IA), quel est l’enjeu aujourd’hui pour le commandant d’un bâtiment de combat de disposer ou pas d’une IA performante ?
L’enjeu, c’est d’acquérir la supériorité́ informationnelle pour décider plus vite et mieux que son adversaire. Dans un environnement complexe, surchargé d’informations, l’enjeu est de détecter les signaux faibles pour percevoir la menace au plus tôt et la détruire. Il s’agit en fait de raccourcir la boucle décisionnelle, ce que l’on appelle en anglais la « OODA loop » (Observation, Orientation, Décision, Action). Ce raccourci va permettre de l’emporter dans un combat naval qui est par nature rapide, destructeur et décisif. Cet enjeu est véritablement crucial et a poussé la Marine à lancer en 2023 la stratégie SIGNAL (« Supériorité Informationnelle pour la Guerre NavALe »).
Quelles sont les différentes utilisations de l’IA sur un bâtiment comme le vôtre ?
Dans le cadre de SIGNAL, la Provence a été la première frégate équipée de DHE (Data Hub Embarqué), qui permet de récolter, de stocker, d’analyser et d’exploiter l’ensemble des données opérationnelles captées par nos différents senseurs. Le premier objectif de l’IA est ainsi de libérer nos opérateurs de tâches qui peuvent être automatisées ce qui apporte un vrai gain tactique parce que cela leur permet de se concentrer davantage sur le suivi de la situation, la détection des éventuelles menaces et le déclenchement des actions réflexes en cas d’attaque.
Le DHE, par sa capacité d’analyse des données, est aussi particulièrement utile pour la génération de comptes rendus rapides et précis, à l’heure où l’appréciation autonome de situation est déterminante et où les décisions doivent être prises de plus en plus rapidement à partir d’éléments les plus fiables possibles. Un autre DHE permet de collecter et d’analyser les données des installations de propulsion ou de production d’énergie, et ainsi d’envisager à terme une véritable maintenance prédictive.
L’IA va également permettre d’exploiter automatiquement des données issues de senseurs déportés mis en œuvre par le bâtiment, comme des drones, des planeurs sous-marins ou gliders, c’est-à-dire de petits véhicules sous-marins autonomes et légers capables, en fonction de la mission, de passer près de 160 jours sous l’eau jusqu’à 1000 mètres de profondeur. En 2024, lors de l’exercice Mare Aperto 24 / Polaris, la Provence a été chargée de coordonner la mise en œuvre et l’emploi de 4 gliders pour collecter en temps réel des données sur l’environnement marin et apporter une contribution directe au cadre tactique. L’IA permet de faire ressortir très rapidement l’information utile de la masse d’information captée.
Le défi qui reste de taille est de se familiariser avec ces systèmes qui sont encore aux stades expérimentaux, et de faire évoluer les marins pour qu’ils soient en mesure d’exploiter et de discerner des informations utiles dont ils ont besoin pour orienter l’IA. Derrière tout cela, il y a un enjeu RH de formation, de développement des compétences. On a commencé à initier de vraies synergies entre les marins embarqués et les experts de la data – data engineers, data scientists –, en faisant ponctuellement embarquer ces derniers durant nos missions pour apporter la couche de compétences et d’expertises per- mettant d’adapter en temps réel, à la mer, au plus proche du besoin opérationnel, le codage de nos IA. C’est ce que l’on a fait en opération l’automne dernier, et ce que fait actuellement (2) le groupe aéronaval durant sa mission Clemenceau 2025 sur les différentes unités équipées de DHE.
L’IA associée à la robotisation nous amène-t-elle irrémédiablement vers l’ère des navires de guerre entièrement autonomes ?
C’est clairement la tendance à l’image de l’USS Vanguard, un navire de surface sans pilote (Large unmanned surface vessel) lancé en 2024 par les Etats-Unis. Je ne crois toutefois pas au développement de frégates ou de croiseurs autonomes. Le niveau de complexité de ces bâtiments et de besoin en maintenance au quotidien est tel que j’ai du mal à imaginer que l’on puisse les opérer, dans la durée et loin de leurs points d’appui, sans intervention humaine. Je pense que l’avenir est davantage à une complémentarité entre navires habités et navires autonomes, un peu à l’instar de ce qui est aujourd’hui envisagé pour nos avions de chasse dans le cadre du programme SCAF (Système de combat aérien du futur), qui prévoit l’accompagnement de la future génération d’appareils par des drones de combat aérien.
Dans ce monde volatile qui se réarme rapidement et puissamment, notamment dans le domaine naval, l’efficacité et la durabilité de la marine française dans une guerre de haute intensité ne passent-elles pas par des actions forcément menées en coalition ?
Oui, bien évidemment. Une guerre de haute intensité dans la durée ne peut aujourd’hui être menée par la marine française que dans le cadre d’une coalition internationale avec nos partenaires, et notamment les marines européennes qui disposent elles aussi d’unités de haut niveau. Ceci ne poserait pas trop de difficultés car la Marine entretient en permanence son interopérabilité avec les marines alliées. Toutes nos tactiques et procédures répondent à des standards partagés. Tout cela garantit à la fois la rapidité avec laquelle peut être formée une coalition, et son efficacité opérationnelle. Mon expérience vécue à la mer en opération montre qu’il s’agit bien là d’une réalité. J’évoquais la mission de la Provence en mer Rouge, l’automne dernier, dans le cadre de l’opération Aspides de l’Union européenne dont le chef était un amiral italien embarqué sur une frégate italienne. Intégré au sein de cette opération, quasiment sans préavis, j’ai immédiatement constaté la fluidité des relations avec la frégate italienne et les autres moyens déployés. On s’est très vite compris, parlant le même langage et étant immédiatement en confiance. Ce que j’évoque là, je l’ai aussi vécu au sein de l’état-major du groupe aéronaval français où j’ai pu constater à quel point celui-ci possédait cette capacité d’intégrer rapidement, facilement, à la façon plug and fight, des escorteurs étrangers, de pays européens et/ou membres de l’OTAN. Ceci parce que nos procédures sont identiques, nos équipements compatibles et nos communications interopérables. Je n’ai donc aucun doute, encore une fois, sur le fait que si l’on devait se battre en coalition, cela se ferait sans difficultés.
NOTES :
- Avec les sous-marins, l’aéronavale, les fusiliers marins et les commandos.
- Cette interview a été réalisée le 17 février 2025.
English version : “The sailors deployed in the Red Sea faced almost every threat that can be encountered at sea.”

Captain Pascal Forissier is in command of the Provence multi-mission (FREMM) frigate, crew “A”, a French navy first-rank multi-mission frigate. In Marine & Oceans, he describes how his ship was involved in protecting maritime traffic from attacks by the Houthi militia off the coast of Yemen. An exceptional insight that reveals new aspects of naval warfare in the current deteriorated international geostrategic context. Explanations.
Interview by Aurélien Duchêne
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To fully appreciate the scale of the vessel you are commanding, where does the FREMM rank among the French navy’s combat ships and what are her characteristics and advantages in comparison?
The French navy is built around two major pillars: the Carrier Strike Group with the aircraft carrier and her escort, and the Strategic Oceanic Force with the nuclear-powered ballistic missile submarines (SSBNs). To enable their implementation, a number of resources must be brought together, including frigates that form the backbone of what is known as the Naval Action Force, one of the French navy’s four major organic forces (1) that includes all surface vessels. The Naval Action Force’s frigates include air defence frigates (FDA) and FREMM multi-mission frigates. Why multi-mission? Because they are capable of operating in any combat situation. They use the naval cruise missile (MdCN) to strike strategic targets on land. They are also particularly effective in anti-submarine warfare, thanks to their sonar and the complementary nature of their on-board helicopter. They have been recognised – and this is noteworthy enough to be emphasised – by the Americans, with the presentation, on three occasions, by the commander of the US 6th Fleet, of the Hook’Em Award, the prize for excellence in anti-submarine warfare. I will conclude by emphasising their particular discretion in all areas, acoustics of course for anti-submarine warfare, but also electromagnetic and infrared. The FREMM is a modern, highly automated vessel with an integrated combat system, a first for the French navy, now equipped with data processing capabilities, as shown with the Provence FREMM and her on-board data hub (DHE) operating for over a year now.

The war in the Black Sea illustrated the vulnerability of the powerful Russian navy, in the face of the asymmetrical war Ukraine waged against it right up to Russia’s ports. What lessons did you draw from this as a ship’s commander, and more broadly, what lessons did the French navy draw from it?
I will not go back over what Vice-Admiral Slaars, Deputy Chief of Staff for Air and Naval Operations, said at the press briefing of the Ministry of Defence on 20 February. But if I had to emphasise one particular point among those which, as a commander, clearly stood out for me, it would perhaps be the importance of knowing the threat. The conventional threat, expected in the various areas of conflict, and the more unusual one linked to the adversary’s innovations, which must be anticipated in order to adapt and avoid being taken by surprise. In this regard, the war in Ukraine has been particularly interesting, in the use of drones, whatever the environment in which they were used.
As sailors, this was an opportunity for us to learn from experience (RETEX) and adapt our tactics and equipment to this type of threat. But we should not rule out conventional threats, such as mines that have been hidden for years, dating back to the First World War. We have seen the reality of the tactical use of mines to protect a beach, to hinder a fleet in its manoeuvres, and RETEX in this domain is also particularly significant. More generally, regarding knowledge of the threat, I would say that the conflict in Ukraine has pushed us to go even further in the acculturation of our sailors.
We work to deal with this with the operational controllers who monitor our operations in the areas where we are deployed – in the Mediterranean, Atlantic, Baltic, Indian Ocean and Red Sea – and with our various intelligence services.
The second lesson I learned from the Ukrainian conflict is the importance of quickly sharing feedback, so that each unit benefits in real time from the experience of units deployed in operations in contact with the adversary or competitor, or in any case in contact with the threat, so that units in the training phase can become more efficient in their training, acculturation and anticipation time.
The third lesson is the importance of training. The French navy, for example, introduced specific counter-drone exercises such as Wildfire, in which units were confronted with combined, coordinated, saturating surface and air attacks to test our tactics and our kinetic or electronic response methods.
The fourth lesson is to know how to take advantage of RETEX and training to quickly adapt our tactical procedures and on-board systems, in order to keep up with operations. A certain number of systems tested with satisfying results during a Wildfire exercise were very quickly installed on a multi-mission frigate deployed on an operation. This approach, called ‘PERSEUS’ in our navy (Editor’s note, read M&O No. 285 p. 38), is a perfect illustration of what I mean about threat awareness, sharing feedback within a short time frame, training, adapting our procedures and systems, and demonstrating that all of this directly benefits us in operations.
FREMMs were deployed in the Red Sea to protect commercial traffic from attacks by the Houthi militia. The sailors described uninhibited violence. What did they face?
The sailors deployed in the Red Sea faced almost every threat that can be encountered at sea. A reality that the French navy witnessed in December 2023 as Houthis started to target the civilian ships and their military escort ships with anti-ship missiles, ballistic missiles, armed aerial drones and armed surface drones. This violence was all the more uninhibited as it targeted civilian ships simply carrying out commercial traffic, suddenly caught up in a terror intended by the Houthis to block the flow of trade to the Mediterranean. When I was deployed in the Red Sea in November 2024, the situation had calmed down somewhat compared to the intensity we had experienced at the beginning of the crisis, at the end of 2023 and the beginning of 2024.
But not a day went by without realising the reality and permanence of this threat in the area. The Houthis’ ability to deploy such resources in a precise, sustained and coordinated manner obviously required solid support from one or more state powers. They were unable, alone, to achieve what they did and what we saw.
What type of drones and missiles did the Houthis use exactly, how were they used and how did you respond?
I will first talk about aerial drones. These are fixed-wing drones capable of flying at around a hundred knots, which is roughly 180 km per hour. The most common are Samad-type drones, used to deliver a military payload or for intelligence gathering. They can be guided to a target or fly along a predefined trajectory, as a decoy weapon, for example, to seize the opportunity of a target and strike it.
The surface drones are traditional skiffs, wooden boats used by fishermen in the southern Red Sea, equipped with explosives and remote-controlled. The Houthis even used dummies to make them look like inoffensive fishing boats and hide the fact that these were actually armed, remote-controlled drones. Hence the need for us to have detection and identification means that are precise enough to make the distinction.
The anti-ship missiles used are weapons capable of flying very low above the surface, equipped with a homing device that allows them to lock onto the ship and head towards it, while travelling at a speed of around 1,000 km/h, which leaves little time for detection and reaction.
Ballistic missiles, on the other hand, are missiles fired in a bell-shaped trajectory, and as their name suggests, in ballistic flight. Some are fired in pure ballistic flight while others are probably equipped with homing heads with some kind of terminal guidance to refine their trajectory before impact. The speed of a ballistic missile depends on the distance from which it was fired, but generally speaking, the higher the bell, the faster the missile will reach its target. Speeds of up to 4,000 km/h, or even more, are possible.
All these weapons were used in a precise and coordinated manner, which requires real targeting capabilities. The Houthis also demonstrated true technical and tactical know-how by deploying drones, in a coordinated manner, to initially divert attention or make an initial impact, and then missiles, anti-ship or ballistic missiles that would immobilise or even destroy the target ship. They used these weapons every day, for months, despite the strikes carried out by the Americans to wipe out their bases in Yemen, which suggests a solid supply chain and significant storage and protection capacities.
To detect all these threats, we rely on our radar and optronic systems. Optronics are particularly important for, as I said earlier, identifying a drone, manned or unmanned, or a particular type of aerial drone. As for ballistic missiles, in order to gain advance notice, we relied on an early warning system specialised in the detection of this type of missile. To deal with these drones and missiles, we used all our weapons systems, from 12.7 mm machine guns to Aster missiles and 76 mm main artillery. We also used our helicopter and its on-board weaponry, giving us additional reach to deal with the threat from a safe distance.

Some observers criticised the use of Aster missiles, estimated at 1 or 2 million euros each, to destroy drones that cost only a few tens of thousands of euros. What do you think about this?
Well, observers observe and those who comment…comment. The important thing to remember is that defending civilian traffic and freedom of navigation comes at a cost, and that protecting the lives of my 150 sailors is priceless. My responsibility as commander is to fulfil the mission, ensuring that all my sailors return home. If I consider that an Aster missile is necessary to deal with the threat, rather than a 76-millimetre salvo, I don’t hesitate for a moment. In addition, the French navy is working on improving the self-defence capabilities of its frigates and installing intermediate weapon systems that will add an additional layer of protection and ultimately offer complementary response options to this type of threat, for maximum effectiveness.
How did the crews react to a threat that was escalating in terms of violence and weapons used? What lessons would you draw about the adaptability and resilience of these men and women, whose average age, let’s not forget, is around 28, and more generally about their instruction and training?
Many sailors in my crew faced, for the first time, real, daily and permanent threats directly affecting their unit or the ships they were accompanying. Their reaction was remarkable, both individually and as a group. For various reasons. We have been training for years to face intensified threats with the return of weapons of war in the theatre of operations. Sailors have mentally integrated the reality of these new risks and learned from RETEX from units previously deployed in the area. They have repeatedly practised the reflex movements in the event of an attack during the numerous training sessions carried out before deployment, a process known as drill.
They fully operate their equipment and have confidence in their frigate and their team-mates. Finally, they find meaning in the mission of defending freedom of navigation, protecting civilian traffic and, in a way, our own economy, on which the diversion of maritime transport flows may have a strong impact. Last November, during a call at Djibouti, the commander of a South Korean frigate patrolling the area asked me how I managed to control the stress level of my crew in an area where danger is a daily reality. That is exactly what I answered him, along with a few additional points to those mentioned above, which in my opinion also contribute to the success of the mission: the mental preparation of our sailors during training, the practice of sport as a way of managing stress levels, team-building activities as soon as the mission allows, and the presence on board of medical staff and the chaplain…
Together, these factors strengthen the resilience of each individual and of the crew as a whole. This mission clearly illustrated how well our high-intensity training and instruction system is adapted to the realities of our missions today.

The Chief of Staff of the French navy, like his predecessors, warns of the return of high-intensity warfare at sea. What exactly do we mean by high intensity, and of course is the French navy ready for it?
High intensity refers to war against a similar type of adversary with comparable weaponry. Whereas for years we trained to face terrorist threats, high intensity confronts us with threats of a state nature. I suggest your readers watch the ECPAD documentary by Grégoire Chaumeil, “Grand large, haute tension”, which shows how the French navy has adapted in recent years to the current global shift. The last few decades were characterised by the so-called “peace dividend” at the end of the Cold War and the emergence of a terrorist threat. Today, we face the sudden resurgence of power states and the erosion of the international order, with the world rearming at an extremely accelerated pace.
The Russian aggression in Ukraine brought interstate war to the gates of Europe, and for us sailors, the loss of the Russian cruiser Moskva, sunk by Ukrainian anti-ship missiles, reminds us all of the tough reality of naval combat. The motto of the Provence, the frigate I command, is ‘Semper paratus’, which means ‘Always ready’. And I can tell you that these are not just words. Last autumn, while I was deployed in the Eastern Mediterranean, I received orders, at short notice and quite unexpectedly, to head for the Red Sea to protect civilian vessels as part of the European Union’s Operation Aspides.
The Provence was ready, as in fact is the entire French navy, which has been training for several years in major ultra-realistic exercises such as Polaris, initiated from 2021 by Admiral Vandier, then Chief of Staff of the Navy.
This type of exercise was actually designed and implemented to introduce a high degree of realism into our training. In the Polaris exercise, when a ship is hit, she is effectively deprived of certain systems until the end of the exercise, or even permanently removed from the game if lost or sunk. A ship participating in Polaris only has the armament she normally has on board. If you’re running out of missiles, you are supposed to return to a support station and remain there for a certain period of time to simulate reloading.
Aircraft flying in these exercises cut off their IFF (automatic identification system) for real. The progression of the entire scenario is at the initiative of the “players”, these are called ‘LIVEX’ phases. The commanders carry out the tactics they have planned. This highly realistic approach encourages them to act as in real combat conditions. This helps to develop tactical innovation, daring and offensive action methods that increase the lethality of the first shot, i.e. to be sure that the engagement you are going to carry out will neutralise the opposing side. This concept has been decisive in placing the units as close as possible to the real conditions of naval combat.
But training is not the only thing. Our systems also adapt quickly and flexibly to the demands of high intensity. I would mention the Paseo (2) optronic system, which, following the feedback from units deployed in the Red Sea, was installed in just a few months on board several units to increase their ability to identify different types of threats. This system allows us to increase the identification distance to choose an appropriate response to each identified threat. Finally, I would remind that high intensity naval operations cannot be conducted without air superiority. In this respect, with its carrier strike group structured around the Charles de Gaulle carrier, the French navy possesses an extraordinary tool for defending and regaining this air superiority at sea. And in this respect, the prospect of the PANG, the new generation French aircraft carrier, clearly illustrates the French navy’s desire to maintain this capability to deal with high intensity over the long term.
Which new technologies and weapons are most likely to radically change naval combat?
Drones, undoubtedly. Especially armed drones and remote-controlled munitions, which represent a serious challenge in all environments. I mentioned aerial drones and surface drones, but a new threat will emerge soon with underwater drones. And this issue will become even more serious when all these drones act in swarms, with the aim of overwhelming our forces. A further revolution in naval combat consists of directed energy weapons (laser weapons), which will offer increased precision and unlimited firing capacity.
A regards hypersonic weapons, they are capable of flying at Mach 5 or more. As a result, because they are more difficult to detect and intercept, they will also pose a serious threat to naval combat in the future. There is also the issue of cyber warfare, which is already a reality and which, I my opinion will become increasingly prevalent. The protection of our naval computer systems against these cyberattacks is a growing concern. I am convinced that these cyberwarfare capabilities will play a crucial role in future conflicts. Finally, of course, there is artificial intelligence. AI will soon change the game in naval warfare by automating complex tasks, improving decision-making and enabling the battlefield, whether land or air and sea, to be fully covered by autonomous weapons systems.

Precisely with regard to Artificial intelligence (AI), what is at stake today for the commanding officer of a combat ship in terms of having a high-performance AI or not?
The challenge consists of acquiring information superiority to make decisions faster and better than your adversary. In a complex environment, overloaded with information, the challenge is to identify weak signals to detect the threat as early as possible and neutralize it. It is in fact a question of shortening the decision-making process, known as the “OODA loop” (Observation, Orientation, Decision, Action). This shortened process will definitely give the advantage in naval combat, which is by nature fast, destructive and decisive. This truly crucial issue has prompted the French navy to introduce the SIGNAL (“Supériorité Informationnelle pour la Guerre NavALe” – Information Superiority for Naval Warfare) strategy in 2023.
What are the different uses of AI in a vessel like yours?
As part of the SIGNAL project, the Provence was the first frigate equipped with an on-board data hub (DHE), which enables the collection, storage, analysis and use of all the operational data captured by our various sensors. The primary objective of AI is thus to relieve our operators of tasks that can be automated, resulting in a real tactical gain as it allows them to gain attention while monitoring the situation, detecting potential threats and triggering reflex actions in the event of an attack.
Thanks to its data analysis capabilities, the DHE is also particularly useful for generating quick and accurate reports, at a time when autonomous assessment of the situation is crucial and decisions must be made increasingly quickly based on the most reliable information possible. Another DHE makes it possible to collect and analyse data from the ship’s propulsion or energy production units, thus paving the way for the implementation of real predictive maintenance in the future.
AI will also make it possible to automatically process data from remote sensors deployed from the ship, such as drones, or underwater gliders, which are small, autonomous, lightweight underwater vehicles capable, depending on the mission, of remaining nearly 160 days at a depth of up to 1,000 metres. In 2024, during the Mare Aperto 24 / Polaris exercise, the Provence was tasked with coordinating the implementation and use of 4 gliders to collect real-time data on the marine environment and make a direct contribution to the tactical framework. AI helps to quickly isolate useful information from the mass of data collected.
The remaining challenge consists of getting familiar with these systems. They are still in the experimental stages, and we’ll need to develop our sailors’ skills so that they are able to exploit and discern useful information that they need to guide the AI.
Beyond all this, it is a question of human resources training and skills development. We have started to initiate real synergies between the sailors on board and the data experts – data engineers, data scientists – by occasionally inviting them on board during our missions to provide the necessary range of skills and expertise to adapt the coding of our AIs in real time, at sea, and as closely as possible to operational needs. This is precisely what we did last autumn, and what the carrier strike group is currently doing on the occasion of its Clemenceau 2025 mission (3) on the various DHE-equipped ships.
Does AI combined with robotisation inevitably lead us to a future of fully autonomous warships?
This is clearly the trend, as seen with the USS Vanguard, a large unmanned surface vessel launched in 2024 by the United States. However, I do not believe in the development of autonomous frigates or cruisers. The level of complexity of these vessels and the need for day-to-day maintenance is so high that I cannot imagine them being operated, in the long term and far from their support stations, without any human intervention. I think that the future is more likely to involve both manned and autonomous ships complementing each other, a bit like what is currently being imagined for our fighter planes as part of the FCAS (Future Combat Air System) programme, which plans to have the next generation of fighters assisted by air combat drones.
In this unstable world, which is rapidly and powerfully rearming, particularly in the naval domain, don’t you think that the effectiveness and sustainability of the French navy in a high-intensity war will depend on actions necessarily carried out in coalition?
Absolutely. An international coalition including our partners, and particularly the European navies, which also operate high-level units is a condition for the French navy to wage a long-lasting, high intensity war. An this would not raise too many difficulties, as the French navy constantly maintains its interoperability with allied navies. All our tactics and procedures meet shared standards.
This all ensures both the ability to form a coalition quickly and its operational effectiveness. My own experience of operations at sea shows that this is indeed a reality. I mentioned the mission of the Provence in the Red Sea last autumn, as part of the European Union’s Aspides operation, headed by an Italian admiral from an Italian frigate.
Integrated into this operation, virtually without prior notice, I immediately appreciated how smoothly everything went with the Italian frigate and the other assets deployed. We understood each other very quickly, speaking the same vocabulary and immediately establishing trust.
What I’m mentioning here is something I also experienced with the French carrier strike group command, where I realised just how easy it was to quickly integrate, like “plug and fight”, foreign escorts from European countries and/or NATO members. This is because our procedures are the same, our equipment compatible and our communications interoperable. I have no doubt, once again, that if we had to fight in a coalition, it would be done without difficulty.
- With the submarines, the naval aviation, the marine fusiliers and commandos.
- Engineered and developed by Safran Electronics & Defense
- This interview was conducted on 17 February 2025.