Quel est le juste prix de l’alimentation ? Réponse des agriculteurs

Le mouvement des Jeunes Agriculteurs organise jusqu’à dimanche « Les Terres de Jim », plus grand événement agricole d’Europe en plein air, à Saint-Jean-d’Illac en Gironde.

L’événement accueille la finale mondiale de labour, des compétitions de découpe du bois mais aussi les « Halles de Jim », espace de vente de 1.600 mètres carrés.

A part qu’elles se trouvent en pleine campagne, sous un chapiteau, et que les clients ont les pieds noirs de terre, ces halles ressemblent en tout point à un supermarché: rayons fruits et légumes, produits frais, boucherie, boulangerie….

Mais les caissiers sont des agriculteurs et les prix ont été fixés par eux.

« On voulait avoir des prix en lien avec la réalité. Vous trouverez donc certains produits au même prix qu’ailleurs, d’autres moins chers, d’autres plus chers », explique Thierry Houel, éleveur de porcs Label rouge dans les Côtes d’Armor, qui a piloté le projet.

Une façon de dénoncer les pratiques des enseignes de la grande distribution, qui se livrent à une course aux prix bas pour attirer les consommateurs, mais qui détruisent les campagnes, selon les agriculteurs.

Ainsi, la boîte de six oeufs est vendue 80 centimes. « Ce sont des oeufs bas de gamme, sans transformation. Ils sont mis en boîte à la ferme, il n’y a donc aucun intermédiaire », justifie Thierry Houel.

En revanche, la viande est vendue plus cher. « Quand je vois des pubs pour le sauté de porc à 2,99 euros le kilo, je ne vois pas comment c’est possible », souligne l’éleveur breton.

Et quand des pommes du Centre sont à un euro le kilo, les pêches du Roussillon sont à 3,12 euros le kilo.

« Et oui, elles sont pas espagnoles celles-là », remarque M. Houel, alors que les pêches espagnoles à bas prix ont inondé les étals français cet été, suscitant une énorme frustration chez les arboriculteurs locaux.

– Les circuits courts, la solution ? –

Un peu plus loin, les boulangers pétrissent devant les passants.

Yann Foricher est meunier en Gironde. Pour lui ce genre d’initiative permet un échange avec le public, lui qui travaille dans l’ombre des boulangeries.

Sa baguette tradition est à un euro.

Ne serait-ce pas un peu cher alors que les cours des céréales ont beaucoup baissé ces derniers mois ?

« Nous, on a un prix qui n’a pas bougé depuis cinq ans. On lisse (les prix) pour ne pas répercuter au client les flambées des céréales. Alors, quand ça baisse, on garde le même prix aussi », explique-t-il.

« Et puis on essaie que sur le prix, il y ait une qualité: notre pain est fait avec du blé 100% français, du levain naturel, très peu de levure et il est très peu pétri. Nos baguettes ont ainsi plus de goût et se conservent mieux ».

Pour M. Houel, « on a tout intérêt à s’émanciper de la grande distribution. Mais si chacun ne faisait que de la vente directe et des circuits courts, il faudrait fermer neuf exploitations sur dix en Bretagne où il y a une grande densité d’agriculteurs », poursuit l’éleveur breton.

Aujourd’hui, selon les chiffres du réseau Bienvenue à la ferme, 6.500 fermes (sur un demi-million) pratiquent la vente directe. Les « drives » fermiers, où l’on peut retirer les achats commandés sur internet, poussent eux comme des champignons: il y en a déjà 22 et leur nombre devrait monter à 40 d’ici la fin de l’année.

Restent que la majorité des agriculteurs vendent leurs productions brutes à des industriels qui les transforment. Et les tensions avec l’aval de la filière sont vives car les prix pratiqués sont parfois tellement bas qu’ils ne sont plus rémunérateurs.

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