« Les travaux sont entrés dans la phase de compte à rebours », affirme le Groupement Unis pour le canal (GUPC), consortium en charge de l’essentiel des travaux.
Selon le GUPC, qui regroupe les groupes espagnol Sacyr, italien Salini Impregilio, belge Jan de Nul et panaméen Constructora Urbana, « 95% du chantier est terminé et les tests sur les structures et les systèmes installés ont donné des résultats excellents dans tous les domaines ».
Le message se veut rassurant, après un énième soubresaut dans le plus grand chantier d’ingénierie au monde : l’apparition, révélée dans une vidéo apparemment tournée par des ouvriers, de fissures sur un mur d’une des nouvelles écluses, côté Pacifique.
Cette découverte avait fait craindre le pire pour ce projet qui compte déjà un an et demi de retard.
Mais le GUPC minimise l’incident, affirmant que les fissures seront comblées avec « un type spécial d’acier ».
Le consortium « s’est engagé à répondre à l’ensemble des exigences du contrat » et à livrer la nouvelle voie « en avril 2016 », rappelle à l’AFP Jorge Quijano, l’administrateur du canal.
Toute une série de « tests sera effectuée durant au moins trois mois, avant de pouvoir passer aux ultimes essais impliquant la navigation de navires », a-t-il précisé.
« D’un point de vue technique, ces fissures ne doivent pas retarder la livraison des nouvelles écluses », assure à l’AFP Olmedo Garcia, directeur de l’Institut du canal de Panama, qui dépend de l’université nationale, précisant qu' »une commission indépendante a effectué une révision et a conclu que ce n’était pas si grave ».
– Conflits sociaux et financiers –
Ce nouvel incident survient toutefois dans le cadre de travaux, débutés en 2007, qui ont depuis longtemps raté le rendez-vous initial d’une inauguration en 2014, censée coïncider avec le centenaire du célèbre canal.
Miné par les conflits sociaux et financiers, le chantier a explosé son budget de départ, de 5,25 milliards de dollars.
Le GUPC veut facturer les importants surcoûts, qu’il estime à au moins 2,39 milliards de dollars (environ 2 milliards d’euros), à l’Autorité du canal de Panama (ACP). La dispute a conduit au blocage des travaux pendant 15 jours en 2014 et fait désormais l’objet d’une procédure d’arbitrage international.
En août 2015, un appel à la grève des ouvriers, qui faisait suite à de précédents arrêts de travail, a lui fait planer un nouveau risque de retard sur le chantier, poussant le GUPC à concéder une augmentation des salaires pour éviter la paralysie du projet.
« Au total, ce sont près de 100 millions d’heures de travail qui ont été réalisées jusqu’ici », précise le consortium chargé des travaux.
Depuis son inauguration il y a un siècle, plus d’un million de navires ont croisé dans les eaux du canal de Panama, projet lancé par des Français puis repris par les États-Unis, qui en ont gardé la propriété jusqu’à sa rétrocession au Panama en 1999.
Avant même son élargissement, le canal a battu son record de marchandises transportées, avec 340 millions de tonnes entre octobre 2014 et septembre 2015, a indiqué jeudi Jorge Quijano à l’AFP, et des revenus proches du record historique, à 2,61 milliards de dollars.
Aujourd’hui 5% du commerce maritime mondial transite par ce canal, long de 80 kilomètres.
Ses nouvelles écluses seront « fiables durant 100 ans », un engagement stipulé dans le contrat selon Olmedo Garcia.
Djurdjica Kuntich, présidente de la Société panaméenne d’ingénieurs et architectes, souligne que c’est la responsabilité du consortium de « garantir que ce projet dure le temps prévu dans le contrat ».
Agrandir le canal est essentiel pour le pays centraméricain, car cela permettra le passage de navires dits Post-Panamax transportant jusqu’à 14.000 conteneurs, le triple de la capacité actuelle.
De quoi offrir d’importants revenus supplémentaires à l’Etat, qui en tire déjà 1 milliard de dollars par an, soit 10% de ses recettes fiscales, un chiffre qu’il espère bien tripler dès 2025.
jjr/mas/lb/str/ka/eb
SACYR