« En cas d’accident nucléaire? On prend le camion et on se barre. De toute façon, on sait pas à quoi elle ressemble la sirène », lâche Olivier, vendeur de légumes sur le marché du centre-ville de Cherbourg, où peu de gens avaient lu la brochure de crise distribuée le matin sur la place et les invitant à rester chez eux pour écouter les consignes de l’Etat via les radios et télé locales.
Le maraîcher voisin, Vincent, est un des rares, parmi la bonne vingtaine de personnes interrogées par l’AFP, à connaître le signal: la sirène sonne trois fois pendant une minute et 41 secondes. « Et il faut se confiner. Où ? Euh, dans un restau? », suggère ce citoyen informé.
Et que ferait la serveuse du bar situé à quelques mètres de là? « Je fous tout le monde dehors. Je ferme le bar et je m’en vais », répond spontanément la jeune femme.
A 9h00, la sirène, difficilement audible depuis l’intérieur du bar, retentit sans déclencher aucune réaction.
Les près de 25.000 personnes résidant dans un rayon de 2 km autour de la base militaire de Cherbourg étaient invitées, si elle le souhaitaient, à participer à l’exercice. Mais peu le savaient et pratiquement personne n’a semblé jouer le jeu en dehors des écoles. Et de l’hypermarché au terminal ferry, personne n’a entendu la sirène, selon des employés interrogés sur place.
Deux des trois maires délégués du périmètre concerné « n’ont rien entendu ». « C’est un des points qu’il faudra corriger », a indiqué le préfet, Jacques Witkowski, lors d’une conférence de presse.
– C’est contre les attentats? –
A 9h25, France Bleu Cotentin, qui participe à l’exercice, diffuse un premier communiqué. Il n’y est pas question de nucléaire: « ceci est une alerte Orsec, rejoignez un espace clos, continuez à écouter la radio, ne téléphonez pas, n’allez pas chercher vos enfants à l’école, ils sont mis en sécurité par leur établissement scolaire ».
A 9h45, cas de figure non prévu, une dizaine de collégiens sont bloqués avec leur professeur devant leur établissement où les élèves qui ont démarré les cours une heure plus tôt sont confinés. Une des six voitures municipales équipées de hauts-parleurs tourne pour alerter la population: « exercice, exercice ».
A 10h10, la surveillante qui attendait les instructions sort enfin dans la cour pour ouvrir aux collégiens.
A 16h00, une nouvelle sirène sonne la fin de l’alerte.
Selon l’Etat, 9.000 élèves de 34 établissements ont été confinés pendant deux heures. « Au bout d’une heure, ça a commencé à être long », a indiqué l’inspectrice du secteur, Guylaine Marguerin.
Sur le port, les pêcheurs qui réparent paisiblement leurs filets ont entendu la sirène: « C’est une exercice contre les attentats c’est ça? ».
« La puissance théorique d’un réacteur de sous-marin, c’est en gros un vingtième de la puissance d’un réacteur de centrale. Et quand il est à quai, le réacteur est stoppé, il est mille fois moins fort », souligne le préfet maritime, Pascal Ausseur.
A l’intérieur de la base navale, l’exercice, qui n’était pas une première, a été intense, selon les autorités. Plus de 2.900 personnes travaillant sur le site y ont été mises à l’abri, selon la préfecture maritime. La base détient des comprimés d’iode qui protègeraient 25.000 habitants d’un cancer de la thyroïde en cas de fuite radioactive, selon le préfet.
Aucun des sous-marins actuellement sur la base n’est encore nucléarisé. Mais « les résidus de coeur de réacteur de six sous-marins » en démantèlement y refroidissent dans des piscines, selon la préfecture maritime.
Greenpeace France a dénoncé le périmètre « ridicule » du plan d’urgence qui a été testé.