Après plus de 15 années de discussions informelles puis formelles pour accoucher d’un texte contraignant visant à sauvegarder cette vaste zone qui couvre près de la moitié de la planète, cette 5e session devait être la dernière – comme devait déjà l’être la 4e, en mars.
Mais, malgré des discussions qui ont débordé dans la soirée de vendredi, cela n’a pas suffi.
« Nous n’avons jamais été aussi proches de la ligne d’arrivée dans ce processus », a relevé la présidente de la conférence Rena Lee.
Mais « même si nous avons fait d’excellents progrès, nous avons encore besoin d’un peu de temps pour parvenir à la ligne d’arrivée », a-t-elle ajouté, recueillant l’approbation de la plénière pour suspendre les travaux sine die. L’Assemblée générale de l’ONU va désormais être saisie de la demande de reprendre cette 5e session à une date qui reste à déterminer.
« Malgré la déception de ne pas avoir finalisé le traité pendant ces deux semaines, nous jugeons encourageants les progrès réalisés », a commenté Liz Karan, de l’ONG Pew Charitable Trusts, appelant à une nouvelle session d’ici la fin de l’année.
Parmi les sujets les plus contentieux dans ces négociations, la répartition des possibles bénéfices issus de l’exploitation des ressources génétiques de la haute mer, où industries pharmaceutiques, chimiques et cosmétiques espèrent découvrir des molécules miraculeuses.
Répondant aux demandes des pays en développement qui craignent de passer à côté de retombées potentielles faute de pouvoir conduire ces recherches coûteuses, le dernier projet de texte laissait sur la table la redistribution initiale de 2% – et à terme jusqu’à 8% – des futures ventes de produits issus de ces ressources qui n’appartiennent à personne. Mais toujours entre crochets, signifiant l’absence d’accord.
– « Opportunité ratée » –
Greenpeace avait d’ailleurs accusé jeudi l’UE, les Etats-Unis et le Canada de précipiter ces négociations vers un échec en raison de leur « avidité » à garder ces ressources pour eux. Des accusations rejetées par un négociateur européen.
Ces questions d’équité Nord-Sud traversent de nombreuses négociations internationales, en particulier celles sur le climat où les pays en développement victimes mais pas responsables du réchauffement réclament en vain aux pays riches de respecter leurs promesses d’aide financière.
Ce traité vise spécifiquement la haute mer qui commence où s’arrêtent les zones économiques exclusives (ZEE) des Etats, à maximum 200 milles nautiques (370 km) des côtes, et qui n’est donc sous la juridiction d’aucun pays.
Alors que la bonne santé des écosystèmes marins est cruciale pour l’avenir de l’humanité, notamment pour limiter le réchauffement de la planète, seulement 1% de cet espace, qui représente 60% des océans, est protégé.
Un des piliers du traité sur « la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale » est d’ailleurs d’y permettre la création d’aires marines protégées.
« Une étape cruciale dans les efforts pour protéger au moins 30% de la planète d’ici 2030 », avait souligné cette semaine Maxine Burkett, une responsable pour les océans au département d’Etat américain.
Certains experts craignent que si le traité sur la haute mer n’est pas conclu d’ici la fin de l’année, cet objectif soit hors d’atteint.
Les délégations s’opposent toujours sur le processus de création de ces aires protégées, ainsi que sur les modalités d’application de l’obligation d’études d’impact environnementales avant une nouvelle activité en haute mer.
« Quelle opportunité ratée… » a regretté sur Twitter Klaudija Cremers, chercheuse à l’Institut du développement durable et des relations internationales (IDDRI), qui comme plusieurs ONG a un siège d’observateur des négociations.