Si le navire géant a résisté aux dernières tentatives de renflouement, une marée haute attendue en soirée pourrait faciliter la tâche des sauveteurs.
De nouvelles opérations sont en cours pour renflouer l’Ever Given –près de 220.000 tonnes– coincé depuis mardi en diagonale du canal, bloquant complètement cette voie d’eau d’environ 300 mètres de largeur parmi les plus fréquentées au monde.
Le canal de Suez, long de quelque 190 km, voit passer environ 10% du commerce maritime international et chaque journée d’indisponibilité entraîne d’importants retards et coûts aux acteurs du secteur.
Une douzaine de remorqueurs, ainsi que des dragues pour aspirer le sable sous le navire dont l’étrave est encastrée dans la rive, sont mobilisés.
Selon le porte-parole de l’Autorité égyptienne du canal de Suez (SCA), George Safwat, quelque 27.000 mètres cubes de sable ont déjà été dégagés, à 18 mètres de profondeur.
– Haute surveillance –
Le porte-conteneurs battant pavillon panaméen était entouré dimanche matin de quelques remorqueurs, selon un journaliste de l’AFP. Haut d’une soixantaine de mètres avec son chargement, il domine les champs et les palmiers alentours.
Les environs étaient placés sous haute surveillance, avec des agents de sécurité du canal mais aussi des militaires et des policiers.
Deux dragues qui se trouvaient en mer Rouge faisaient route vers le mastodonte immobilisé: l’Italienne Carlo Magno et la Néerlandaise Alp Guard, selon des sites de visualisation du trafic maritime. Et deux autres remorqueurs égyptiens doivent être mis en service, selon la SCA.
Selon la presse d’Etat égyptienne, le président Abdel Fattah al-Sissi a ordonné des « préparations » pour alléger le navire de ses conteneurs, en cas d’insuccès des manoeuvres de déblocage.
L’amiral Ossama Rabie, président de la SCA, s’est montré optimiste samedi. Selon lui, le navire a « bougé de 30 degrés sur la droite et la gauche » pour la première fois, « un bon indicateur » de l’évolution des efforts.
« Des sources proches de l’opération de sauvetage m’ont dit ce matin que l’optimisme dans l’équipe d’experts était en hausse et ils espéraient que le navire puisse être débloqué dans 24 à 48 heures », a tweeté dimanche Richard Meade, rédacteur en chef de la revue spécialisée dans le transport maritime Lloyd’s List.
Désormais, 369 bateaux sont coincés aux deux extrémités du passage reliant la mer Rouge à la mer Méditerranée, a indiqué M. Rabie dimanche à la chaîne télévisée Al-Arabiya.
L’assureur Allianz a estimé vendredi que chaque jour d’immobilisation pourrait coûter entre six et 10 milliards de dollars au commerce mondial.
Et les premières conséquences se font déjà sentir: la Syrie a indiqué samedi avoir commencé à rationner les carburants, face au retard de livraison d’une cargaison de pétrole.
En outre, onze cargos de bétail partis de Roumanie sont également bloqués. L’organisation Animals International évoque un danger de mort pour les 130.000 animaux.
Selon le journal d’Etat Al-Ahram, le ministère égyptien de l’Agriculture a envoyé trois équipes vétérinaires.
– Coûts et alternatives –
La valeur totale des biens bloqués ou devant emprunter une autre route diffère selon les estimations: de trois milliards de dollars selon Jonathan Owens, expert en logistique à l’université britannique de Salford, à 9,6 milliards selon Lloyd’s List.
Les cours du pétrole ont connu de brusques hausses depuis le début de l’incident.
Les autorités du canal ont affirmé que l’Egypte perdait entre 12 et 14 millions de dollars par jour de fermeture. Près de 19.000 navires ont emprunté le canal en 2020, selon la SCA.
En attendant la reprise du trafic, plusieurs acteurs du transport maritime international comme Maersk ou l’armateur français CMA CGM ont décidé de dérouter certains navires et de passer par le cap de Bonne-Espérance, autour du continent africain. Cela représente un détour de 6.000 km entre Singapour et Rotterdam par exemple.
« Le groupe a décidé de dérouter deux de ses navires à destination de l’Asie via le cap de Bonne-Espérance et étudie d’autres alternatives pour ses clients, le déploiement de solutions aériennes ou encore ferroviaires », a expliqué l’armateur français dimanche à l’AFP.
Trente-deux navires appartenant à Maersk ou à ses partenaires seront affectés d’ici la fin du weekend, a indiqué le géant danois du transport maritime.
Alors que les vents violents combinés à une tempête de sable avaient d’abord été pointés du doigt pour expliquer l’incident, M. Rabie a évoqué samedi une possible « erreur humaine » parmi les raisons de l’échouement.