L’amiral Ossama Rabie, président de l’Autorité égyptienne du Canal de Suez (SCA), a précisé dans un communiqué mercredi matin que les « unités de sauvetage et remorqueurs de l’Autorité poursuiv(ai)ent leurs efforts » pour débloquer l’Ever Given, navire de 400 mètres de longueur battant pavillon panaméen.
Huit remorqueurs ont été dépêchés sur place pour aider à remettre le géant des mers à flots.
A la suite de l’incident, des dizaines de navires attentaient de pouvoir emprunter le canal, selon une source maritime.
Le retour à la normale n’était pas acquis en milieu de journée mais, selon une source à la SCA, les navires venus de Méditerranée pouvaient de nouveau commencer à se déplacer vers le sud en direction de la mer Rouge.
Reste à savoir si ces navires vont ou non devoir attendre dans la région des lacs, autour d’Ismaïlia avant de naviguer vers Suez pour sortir du canal.
L’Ever Given, qui fait plus de 220.000 tonnes, naviguait vers Rotterdam depuis l’Asie. Il venait de franchir l’entrée sud du canal à Suez, selon le site Vesselfinder.
– Manque de visibilité –
L’échouement « est dû principalement au manque de visibilité en raison des conditions météorologiques, alors que les vents ont atteint 40 noeuds (74 km/h, NDLR), ce qui a affecté le contrôle du navire qui s’est échoué », a précisé la SCA dans un communiqué. Elle a évoqué un vent de sable, phénomène courant en Egypte en cette période de l’année.
« Le porte-conteneurs s’est échoué accidentellement, probablement après avoir été frappé par une rafale de vent », avait déclaré un peu plus tôt à l’AFP la compagnie Evergreen Marine Corp, qui opère le navire.
Le tronçon historique du canal, situé dans la partie centrale de la voie d’eau, a pu être rouvert dans les deux sens de navigation, selon les autorités, mais elles n’ont pas précisé l’effet sur la résorption de la perturbation créée par l’Ever Given.
Un tel incident peut avoir des conséquences sur l’écoulement du trafic maritime dans une voie de navigation qui concentre environ 10% du commerce maritime international, selon des experts.
« Le passage dans Suez est toujours pris en compte et, quand il y a un gros incident comme celui-là, ça crée du retard et un effet domino derrière », a expliqué à l’AFP Camille Egloff, spécialiste du transport maritime au Boston Consulting Group.
Elle a précisé que le retard n’était qu’une « question d’heures » car « on est dans un environnement hyper contrôlé » mais il devrait avoir un coût « parce que ça bloque le trafic derrière ».
Les premières informations indiquant qu’un navire s’était échoué et bloquait le Canal de Suez « ont fait grimpé les cours du pétrole », a expliqué Bjornar Tonhaugen, analyste de Rystad Energy, car ce blocage « perturbe le transit du pétrole mais aussi celui d’autres marchandises ».
Près de 19.000 navires ont emprunté le Canal de Suez en 2020, selon la SCA.
Un nouveau tronçon creusé en 2014-2015 a facilité le croisement des convois et diminué la durée de la traversée.
– Source de revenus –
Ce canal est une source essentielle de revenus pour l’Egypte, à laquelle il a rapporté 5,61 milliards de dollars (4,74 milliards d’euros) en 2020.
Le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi avait annoncé en 2015 un projet de développement visant à réduire les temps d’attente et à doubler le nombre des navires d’ici 2023.
Les autorités annoncent régulièrement des records de tonnage. En août 2019, 6,1 millions de tonnes y ont transité en une journée.
Conçu à l’initiative de Ferdinand de Lesseps, entrepreneur et diplomate français, le projet colossal a nécessité dix ans de travaux (1859-1869), auxquels ont participé un million d’Egyptiens, selon les autorités actuelles.
Des dizaines de milliers d’entre eux sont morts, estiment des experts.
Long de 164 kilomètres à l’époque, le Canal de Suez n’est « pas l’apanage d’une nation: (…) il appartient à une aspiration de l’humanité », lançait en 1864 Ferdinand de Lesseps, quelque 4.000 ans après les premiers projets de canal des Pharaons.
Trait d’union maritime entre l’Europe et l’Asie, cette voie a permis de ne plus avoir à contourner un autre continent, l’Afrique, via le redoutable Cap de Bonne-Espérance. Mais elle a aussi connu plusieurs guerres et des années d’inactivité.
Cette histoire a été marquée tout particulièrement par l’année charnière 1956: le 26 juillet, Gamal Abdel Nasser, tout juste élu président, a nationalisé le Canal de Suez.