Chlordécone: la Cour de cassation écarte une QPC sur le crime d’empoisonnement

Paris, 6 fév 2025 (AFP) – La Cour de cassation a refusé de transmettre au Conseil constitutionnel une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) portant sur le crime d’empoisonnement dans le scandale de la pollution des Antilles à la chlordécone, un pesticide, a appris l’AFP de source judiciaire jeudi.

Ce dossier judiciaire a fait l’objet d’un non-lieu à Paris en janvier 2023 dont ont fait appel les parties civiles.

En novembre, la cour d’appel de Paris a accepté de transmettre à la Cour de cassation une QPC avant d’examiner au fond le dossier.

Mercredi matin, lors de l’examen de la QPC par sa chambre criminelle, l’avocate générale Alexia Bellone s’était dite défavorable à une telle transmission pour des motifs procéduraux, et ce « quelle que soit l’importance des faits dénoncés ».

Auparavant, l’avocat au conseil des parties civiles, Me Ronald Maman, avait insisté sur le caractère « emblématique » de la chlordécone car de hauts responsables, « hommes d’Etat et hommes d’affaires, ont sciemment exposé une population à un produit qu’ils savaient mortifères ».

En droit, le débat portait sur la jurisprudence de la Cour de cassation depuis 1998 et l’affaire du sang contaminé s’agissant de la définition de l’empoisonnement, considérée comme trop restrictive par les plaignants car elle nécessite d’établir une intention homicide pour être caractérisée.

Les plaignants estimaient aussi que cette jurisprudence faisait fi des contentieux environnementaux et des nouveaux droits constitutionnels apparus depuis, notamment le droit de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé, consacré par la Charte de l’environnement en 2004.

Suite à ce rejet de la QPC, le dossier va revenir pour examen au fond devant la cour d’appel. Le parquet général de Paris s’est déjà prononcé fin avril 2024 pour la confirmation de l’abandon des poursuites.

La chlordécone, pesticide répandu dans les bananeraies pour lutter contre le charançon, a été interdite aux Etats-Unis dès 1975, mais est restée autorisée en France jusqu’en 1990, et même jusqu’en 1993 – quinze ans après les premières alertes de l’OMS – aux Antilles, où elle a bénéficié d’une dérogation.

Aux Antilles, le non-lieu prononcé avait provoqué beaucoup d’amertume.

Plus de 90% de la population adulte en Guadeloupe et Martinique est contaminée, selon Santé publique France, et les populations antillaises présentent un taux d’incidence du cancer de la prostate parmi les plus élevés au monde.

Lundi, devant la cour administrative d’appel de Paris, dans le volet indemnitaire de la procédure, la rapporteure publique a réaffirmé « la faute caractérisée » et « les carences fautives » de l’Etat dès la commercialisation du pesticide en 1972.

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