Il aura mardi et mercredi des entretiens avec des poids-lourds régionaux, dont le président chinois Xi Jinping et le Premier ministre indien Narendra Modi, en marge du sommet du G20 en Indonésie.
Il espère surtout une « reconnaissance » des ambitions et de l’influence de la France lors du sommet du Forum de coopération économique Asie-Pacifique (Apec), jeudi et vendredi à Bangkok, où elle sera le premier pays européen invité.
Les défis sont nombreux, de l’ampleur de la zone dans laquelle la France essaie de se projeter, à plus de 10.000 kilomètres de l’Europe, à la faiblesse des moyens déployés par Paris, notamment militaires.
Emmanuel Macron a érigé en priorité stratégique cette vaste zone allant des côtes est-africaines aux côtes ouest-américaines – d’où son appellation « Indopacifique » – où la France compte de nombreux territoires et espaces maritimes.
« Nous avons une ambition de porter la volonté Indopacifique », a souligné la présidence française en marge du sommet du G20.
Ce centre névralgique du commerce mondial abritera 60% de la population et du PIB mondiaux en 2030. Théâtre d’une rivalité croissante entre Chine et Etats-Unis, toutes les attentions se portent sur lui.
La France y détient la majeure partie de sa zone économique exclusive (ZEE), la deuxième du monde, autour de sept territoires, de la Réunion à la Nouvelle-Calédonie et Tahiti, où vivent 1,65 million de ressortissants.
– « Grosse baffe » –
Ce vaste espace maritime lui offre un droit de regard de premier plan sur tous les enjeux environnementaux et halieutiques, ainsi que la lutte contre les trafics liés aux océans.
La France est aussi de plus en plus présente militairement, privilégiant, outre ses propres points d’appui, une coopération croissante avec les pays riverains.
Elle multiplie les exercices conjoints (Inde, Japon) et les patrouilles en mer de Chine, zone qui concentre les tensions et où Pékin multiplie les revendications.
La conclusion de l’alliance AUKUS entre l’Australie, les Etats-Unis et le Royaume-Uni, avec pour corollaire l’annulation par Canberra d’un contrat d’acquisition de 12 sous-marins français, a fortement contrarié ces ambitions en 2021.
« La grosse baffe c’est de ne pas avoir été invité, même sur un strapontin, dans l’alliance AUKUS », relève l’expert en géopolitique Jean-Marc Balencie.
La France a renforcé depuis sa coopération avec l’Indonésie, grande puissance régionale (270 millions d’habitants), et entend multiplier ces partenariats.
Jakarta a signé en février un premier contrat d’acquisition d’avions de chasse français Rafale et est intéressé par des sous-marins, des corvettes et d’autres équipements militaires.
Emmanuel Macron s’est aussi réconcilié avec son homologue américain Joe Biden, qui a fait amende honorable dans l’affaire AUKUS et l’attend le 1er décembre à Washington pour une visite d’Etat.
– Une petite place –
L’heure est aussi au réchauffement avec l’Australie et son nouveau Premier ministre, Anthony Albanese.
Paris pourrait même être de nouveau sur les rangs pour vendre des sous-marins à l’Australie en attendant ceux promis par les Etats-Unis.
L’affaire AUKUS est susceptible en outre d’avoir un effet positif inattendu en démontrant le non-alignement de la France sur Washington, alors que nombre d’Etats de la région refusent de choisir entre Etats-Unis et Chine.
« AUKUS paradoxalement nous a donné quelques arguments, on peut jouer cette voie de troisième acteur », avance l’amiral Pascal Ausseur, directeur général de la Fondation méditerranéenne d’études stratégiques (FMES). « On n’a pas un boulevard parce que les deux gros ne nous laissent pas beaucoup de place mais il y a une place ».
La marge de manoeuvre de la France reste aussi contrainte militairement. Seuls 7.000 soldats sont déployés en permanence dans la zone, ainsi que quelques patrouilleurs et avions de reconnaissance.
« Ses forces de souveraineté sur zone sont saturées par les missions de surveillance des territoires », relève Céline Pajon à l’Institut français de relations internationales (Ifri).
La stratégie française s’inscrit dans la nouvelle approche Indopacifique de l’Union européenne.
« Celle-ci, pour convaincre, doit être mise en oeuvre de manière concrète le plus rapidement possible, être lisible et visible », prévient la chercheuse.
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