« Il est urgent de tirer la sonnette d’alarme. Il faut éviter un immense gâchis », a lancé Hubert Dejean de la Batie, vice-président (Nouveau Centre) de la région Normandie lors des assises.
Une soixantaine d’industriels et de collectivités locales ont lancé mardi un « appel de Cherbourg » face à la volonté du gouvernement d’annuler les six premiers projets de parcs éoliens au large des côtes françaises en cas d’échec des renégociations sur les tarifs de rachat d’électricité.
Ces annulations « briseraient la dynamique de l’ensemble de la filière » des EMR, selon l’appel signé par les porteurs de projets EDF (trois parcs), Engie (deux parcs), Iberdrola (un parc), Siemens-Gamesa ou GE, mais aussi Bouygues TP, Vattenfall ou Armateurs de France, ainsi que le maire de Bordeaux Alain Juppé ou le climatologue Jean Jouzel.
Selon le Syndicat des énergies renouvelables (SER), les collectivités locales ont investi 600 millions d’euros pour adapter les ports aux EMR.
Et « nous avons estimé qu’il y avait 15.000 emplois directs liés » à ces six parcs, des donneurs d’ordre aux sous-traitants, a souligné Jean-Louis Bal, président du SER.
De fait, « nous regardons le marché français avec toujours beaucoup d’espoir mais aussi beaucoup d’appréhension », a expliqué Filippo Cimitan, président de Siemens-Gamesa Reneweable Energy France qui a suspendu ses projets d’usines de construction d’éoliennes au Havre, avec 750 emplois à la clé, dans l’attente des résultats de la renégociation tarifaire qui doit aboutir fin juin ou début juillet. Siemens-Gamesa est un des leaders d’un marché « au départ européen et de plus en plus mondial ».
« Faire plus avec moins c’est simple à dire. D’un point de vue industriel, c’est pas évident », a ajouté M. Cimitan.
— « Croissance soutenue » —
Son concurrent Duncan Berry, PDG de LM Wind Power, a été moins explicite au micro. Mais, interrogé par l’AFP sur les 550 emplois direct promis dans l’usine de pales d’éoliennes que son entreprise est en train de finir de construire à Cherbourg, M. Berry parle d’une « centaine d’emplois d’ici à la fin de l’année ». Au delà, « ça dépend du marché », a dit M. Berry dont l’entreprise a 15 usines dans le monde employant 10.000 collaborateurs. « La France prend du retard. Pour rattraper ça, il faut de la clarté », ajouté M. Berry. Sa maison-mère GE emploie 120 personnes dans son usine de nacelles à Saint-Nazaire.
« En cas de décalage ou d’annulation de parcs, ce sont des centaines d’emplois qui pourraient être supprimés en Pays de la Loire en 2018 », a estimé Christophe Clergeau, président du groupe PS au conseil régional des Pays de la Loire et membre de l’Observatoire des énergies de la mer.
Les EMR affichent pour l’heure « une croissance soutenue de l’emploi en 2017 » à 2.650 équivalents temps plein (ETP) en France avec 150 millions d’euros d’investissements en 2017 en réalisant 80% du chiffre d’affaires à l’export, selon cet obervatoire.
L’État se veut rassurant. La volonté du gouvernement d’obtenir des prix « très significativement inférieurs (…) n’est pas un moment agréable pour la filière mais cela va permettre d’accélérer son développement », a estimé durant les assises Olivier David sous-directeur des énergies renouvelables au ministère de la Transition énergétique.
L’État justifie cette renégociation par le fait que les prix ont baissé ces dernières années.
« Vous ne pouvez pas demander à une industrie, en phase initiale (en France ndlr), les même performances que celles qui ont 25 ans d’expérience. Il va falloir qu’on passe par une période où l’éolien offshore sera un peu plus cher », répond M. Dejean de la Batie.
« En gros c’est Bercy qui va décider. Quand il s’agit de sujets stratégiques, c’est jamais bon », croit savoir le vice-président de la région Normandie.
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